Israël en guerre - Jour 641

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Comment une campagne de désinformation israélo-américaine a donné à l’Iran un (faux) sentiment de sécurité

Selon un responsable israélien, de multiples informations - Trump sommant Netanyahu de ne pas attaquer, le déplacement présumé d'officiels israéliens aux États-Unis - ont servi à tromper Téhéran

Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Illustration : Le président américain Donald Trump (à gauche) saluant le Premier ministre Benjamin Netanyahu avant que ce dernier ne quitte l'aile ouest de la Maison Blanche, à Washington, le 7 avril 2025. (Crédit : Mark Schiefelbein/AP)
Illustration : Le président américain Donald Trump (à gauche) saluant le Premier ministre Benjamin Netanyahu avant que ce dernier ne quitte l'aile ouest de la Maison Blanche, à Washington, le 7 avril 2025. (Crédit : Mark Schiefelbein/AP)

Israël et les États-Unis ont mené ces derniers jours une campagne de désinformation dont l’objectif visait à convaincre l’Iran qu’une frappe contre ses installations nucléaires n’était pas imminente, a déclaré vendredi un responsable israélien au Times of Israel.

Ce responsable a affirmé que le président américain Donald Trump avait participé de manière active à cette ruse et qu’il était au courant de l’opération militaire depuis que le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait lui-même décidé de donner son feu vert à l’attaque, dans la journée de lundi.

Netanyahu et Trump s’étaient entretenus au téléphone pendant 40 minutes, ce jour-là. À ce moment-là, des responsables qui avaient témoigné sous couvert d’anonymat avaient révélé à la chaîne d’information israélienne N12 que Trump avait indiqué à Netanyahu, lors d’une conversation « dramatique », de retirer de l’ordre du jour une éventuelle attaque prenant pour cible les sites nucléaires iraniens et ce, tant que les négociations entre son administration et le régime des mollahs se poursuivraient. Selon le reportage télévisé, Trump avait souligné qu’il n’y aurait aucune discussion sur une potentielle frappe militaire tant que le président n’aurait pas constaté l’échec définitif des négociations sur le nucléaire avec l’Iran.

Mais tout n’était que mensonge, a expliqué vendredi l’officiel israélien.

Le lendemain, Netanyahu avait annoncé, dans une vidéo, que des « progrès significatifs » avaient été réalisés dans les pourparlers avec le Hamas sur la question de la remise en liberté des otages. Le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, avait repris ce message dans une déclaration faite aux côtés de son homologue zambien.

Les journalistes israéliens avaient été informés par des officiels que la réunion du cabinet de jeudi porterait sur les pourparlers entre Israël et le groupe terroriste au pouvoir à Gaza.

Il y avait toutefois un problème : les responsables étrangers n’avaient pas compris pas de quels « progrès » Israël pouvait s’enorgueillir, dans la mesure où il n’y avait pas eu d’évolution majeure dans les efforts visant à conclure un accord de cessez-le-feu à Gaza, l’accord susceptible d’ouvrir la porte à la libération des captifs. Un officiel arabe proche de ces pourparlers avec le Hamas, qui s’était entretenu avec le Times of Israel, avait supposé, à ce moment-là, que Netanyahu cherchait à afficher de l’optimisme dans le but « d’effrayer » les députés ultra-orthodoxes et de les dissuader de voter en faveur de la dissolution de sa coalition – un vote qui devait avoir lieu le mercredi suivant.

Mais le responsable israélien a indiqué que l’intervention de Netanyahu avait également relevé de sa stratégie de diversion. En effet, l’État juif avait voulu faire croire à la république islamique que le gouvernement, à Jérusalem, se focalisait sur la finalisation d’un accord sur les otages – et non sur les préparatifs d’une frappe.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’exprime dans un message vidéo le 10 juin 2025 (Capture d’écran/GPO)

Dans le même temps, Israël avait dû vendre à l’Iran une histoire crédible et ne pas ignorer le problème du nucléaire. Au contraire, Israël voulait que Téhéran pense qu’il débattait encore de la question d’une possible attaque avec la Maison Blanche.

Israël avait donc annoncé que le ministre des Affaires stratégiques, Ron Dermer, et le chef du Mossad, David Barnea, allaient s’envoler pour des entretiens avec l’envoyé spécial américain Steve Witkoff avant le futur cycle de négociations entre Téhéran et Washington, prévu dimanche. Un voyage qui avait pour objectif de « clarifier le positionnement d’Israël », avait ajouté Jérusalem.

Le bureau du Premier ministre n’avait pas répondu, à cet instant-là, à une question directe du Times of Israel qui avait voulu savoir où devait avoir lieu cette réunion. Il est dorénavant clairement établi qu’elle n’avait jamais été programmée.

De la fumée s’élevant d’un site qui aurait été visé par une frappe israélienne dans la capitale iranienne, Téhéran, le 13 juin 2025. (Crédit : Chaîne Telegram officielle Sepah News du Corps des Gardiens de la Révolution islamique/AFP)

Israël espérait que les Iraniens seraient convaincus qu’il n’y aurait aucune attaque, quelle que soit sa forme, avant les discussions de dimanche.

Ensuite, Israël aura cherché à donner une impression de normalité sur tous les fronts. Le bureau de Netanyahu a diffusé jeudi un communiqué qui a souligné que, même si certaines informations disaient le contraire dans les médias dans un contexte de tensions régionales croissantes, le Premier ministre n’annulerait pas ses vacances dans le nord du pays, des vacances prévues ce week-end.

Le fils de Netanyahu, Avner, doit se marier la semaine prochaine – un événement qui avait également laissé croire à un grand nombre qu’une frappe imminente était peu probable. Les préparatifs de l’événement s’étaient poursuivis mais il a été depuis annulé. Jeudi, la police avait dressé des barrages routiers sur un périmètre de cent mètres autour d’une salle de réception luxueuse, Ronit’s Farm, située au kibboutz Yakum, au nord de Tel Aviv.

Trump, de son côté, n’a pas été en reste. « Il a joué le jeu aux côtés d’Israël », a déclaré le responsable israélien. « Il y a eu une coordination totale ».

Le président américain avait ainsi estimé, jeudi, qu’une frappe israélienne contre les sites nucléaires iraniens « pourrait très bien avoir lieu » – mais il avait déconseillé cette option, affirmant que la possibilité d’un accord était « assez proche » si Téhéran acceptait de faire des concessions sur ses ambitions atomiques dans le cadre des négociations en cours avec les États-Unis.

L’ambassadeur américain en Israël, Mike Huckabee, avait également indiqué jeudi, dans le cadre d’une interview, qu’il était peu probable qu’Israël attaque l’Iran sans obtenir le feu vert de Washington au préalable.

L’ambassadeur américain en Israël, Mike Huckabee, s’adresse à Bloomberg, le 10 juin 2025. (Capture d’écran via YouTube)

Ce n’est pas la première fois qu’Israël utilise de telles méthodes.

Avant l’opération « Plomb durci » – un raid qui avait été mené à Gaza en 2008-2009 – le bureau du Premier ministre Ehud Olmert avait déclaré qu’une réunion du cabinet de sécurité qui était prévue un mercredi serait consacrée au djihad dans le monde, alors qu’elle devait servir à préparer cette compagne militaire. Après la réunion, le communiqué avait contenu une page entière qui avait évoqué une initiative qui visait à interdire 35 groupes islamistes, tandis qu’une seule ligne était consacrée à Gaza.

Le jour suivant, le jeudi, Israël avait annoncé que les postes-frontières vers l’enclave côtière seraient ouverts et qu’Olmert organiserait d’autres réunions, le dimanche, pour discuter des tensions avec le Hamas. Israël avait lancé son attaque-surprise le samedi, bombardant des commissariats de police du Hamas et tuant plus de 200 personnes au premier jour de l’opération.

Il est trop tôt pour affirmer avec certitude que la campagne de désinformation a véritablement fonctionné. Mais le coup d’envoi de la campagne aérienne israélienne qui a pris pour cible les sites nucléaires et balistiques iraniens a été d’une efficacité stupéfiante, et il semblerait que les hauts commandants iraniens qui ont été éliminés dans leurs habitations ne s’attendaient pas à courir un tel danger.

Et – ce qui est peut-être surprenant pour Israël – les ministres n’ont rien divulgué concernant ces plans et ils ont bien tenu leur rôle. Une discipline qui, par ailleurs, a été remarquablement absente de la lutte d’Israël contre le Hamas à Gaza.

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