L’anniversaire d’un soldat mort à Gaza célébré par ses proches un an plus tard
300 invités se sont rassemblés au kibboutz Bahan, le jour où Asaf Master aurait eu 23 ans, pour un hommage illustrant la lutte d'Israël pour continuer à vivre malgré la tragédie
KIBBUTZ BAHAN – Le 25 octobre, la famille et les amis du capitaine de Tsahal Asaf Master ont organisé une fête en l’honneur de son 23e anniversaire dans son kibboutz du centre d’Israël, sachant pertinemment que l’invité d’honneur ne serait pas présent. Master a été tué le 15 novembre 2023 lors d’une bataille contre des terroristes du groupe palestinien du Hamas à Gaza.
« L’an dernier, je lui avais écrit un message pour son anniversaire, lui promettant qu’à son retour de la guerre, nous organiserions une grande fête pour son anniversaire », a confié sa mère Michal, évoquant le caractère doux-amer de l’événement. « Voici donc la grande fête promise … mais sans lui ».
Les quelque 300 amis qui ont connu Master à différentes étapes de sa vie étaient accueillis par un DJ qui a mixé trance et house music lors de l’événement. D’élégants coussins blancs disposés sur des tapis aux couleurs vives étaient disposés à l’ombre d’un dais où les invités pouvaient s’allonger. Des stands de nourriture et le chariot à café central du kibboutz étaient disposés tout autour de la place, proposant toute une gamme de produits à la vente, dont des sandwiches à l’escalope, des pâtes, des pizzas et des toasts au fromage.
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Les enfants jouaient dans le champ adjacent et à l’aire de jeux, alors que les invités se retrouvaient et partageaient leurs souvenirs pendant la réception du midi, marquée par un sentiment d’appartenance à la communauté et de connexion. Les histoires et les souvenirs partagés par ses proches soulignent la douleur et le traumatisme qui continuent d’affecter les Israéliens en cette période de guerre.
Le père de Master, Lior, explique que son fils avait débuté son service dans une unité d’ingénierie d’élite de Tsahal, Yahalom, une unité secrète de l’armée israélienne. Après une formation d’officier, il était devenu commandant de section au sein du 601e bataillon du génie de combat.
Son père a évoqué la dernière visite familiale à Master à sa base de Tsahal, juste avant qu’il ne soit tué.
« La dernière fois que nous l’avons vu, c’était le jour de son 22e anniversaire, le 26 octobre 2023 », a confié Lior, évoquant la visite surprise de toute la famille, y compris Gili Lev, la petite amie de Master depuis quatre ans, à sa base, l’année dernière. Ils sont restés ensemble pendant une demi-heure, le temps de s’asseoir, de manger un gâteau et de serrer le soldat dans leurs bras, « puis le lendemain, son unité est entrée à Gaza », a déclaré Lior.
Cette année, pour honorer sa mémoire, ses proches ont organisé une célébration avec ses plats, boissons et musiques préférés sur la place centrale du kibboutz Bahan, où Master a grandi et où nombre de ses amis vivent encore.
Roy, le frère de Master, a expliqué avoir tenté de créer une atmosphère joyeuse malgré le deuil et le chagrin de la famille, affirmant qu’ils « voulaient que le souvenir de l’anniversaire de cette année soit une célébration joyeuse ».
Lior s’est fait l’écho de ce sentiment, affirmant que la fête reflétait la dualité de la vie en Israël, où « en fin de compte, les soldats se battent pour que la vie continue ».
Célébrer malgré une telle perte reste cependant difficile. Lev admet qu’elle n’a pas encore saisi toute l’ampleur de la perte de son compagnon de longue date.
« Je ne réalise pas que cela fait déjà un an. Pour moi, c’est comme si c’était le premier mois », a confié Lev.
Son amie Liya Lahav, qui le connaissait depuis la troisième, souligne que son histoire est malheureusement devenue tristement courante en Israël depuis un an.
« Alors même que nous marquons un an depuis le début de la guerre, des soldats continuent de tomber chaque jour », dit-elle.
Le week-end de cet « anniversaire », Tsahal a annoncé la mort de dix soldats au Liban et de trois soldats à Gaza les 24 et 25 octobre, dont l’adjudant de réserve Omri Lotan, 47 ans, du Moshav voisin de Bat Hefer.
Depuis la perte de leur fils, Michal et Lior trouvent un réconfort auprès d’un groupe de soutien pour les parents ayant perdu un enfant en service militaire.
« Nous sommes déjà des vétérans de ce groupe parce qu’Asaf a été tué en novembre », explique Michal.
Elle décrit le lourd fardeau émotionnel du conflit en cours : « L’État d’Israël n’a pas voulu cette guerre. Je ne la voulais certainement pas non plus. C’est insupportable d’être en guerre aussi longtemps, insupportable qu’il y ait encore des otages, et cette douleur est immense. »
Malgré son chagrin, Michal a tenu à souligner qu’Asaf était conscient des enjeux de son service, et Lior a décrit le conflit actuel comme « une guerre nécessaire ».
Le 7 octobre 2023, le jour du pogrom perpétré par le Hamas, au cours duquel ils ont assassiné plus de 1 200 personnes et enlevé 251 autres, Master se trouvait dans une base sur le plateau du Golan, selon Michal.
« Dans l’après-midi, lui et ses soldats ont été déployés à Sderot, envahie par les terroristes », raconte-t-elle. « En tant que commandant, il a reçu la mission de récupérer les corps. »
Nadav Beary, le meilleur ami de Master, a exprimé sa profonde tristesse face à cette perte, soulignant qu’il s’agissait d’un rappel saisissant des défis auxquels Israël est confronté.
« S’engager dans l’armée n’est pas une chose facile », a-t-il reconnu, tout en soulignant que c’est une responsabilité que les Israéliens doivent assumer pour assurer leur propre protection. « Nous comprenons que personne ne le fera à notre place. »
De son côté, Lior a souligné que les soldats comme son fils sont engagés dans un conflit qu’ils n’ont pas d’autre choix que de combattre. « Des gens ont été kidnappés, et beaucoup sont encore en captivité. Nous devons tout faire pour les ramener à la maison et nous assurer que les citoyens pourront continuer à vivre en toute sécurité aux frontières de Gaza et dans tout Israël », a-t-il déclaré.
Michal conclut que la douleur ressentie par Israël ne s’est pas arrêtée après le 7 octobre.
« Si certains pensent qu’Israël a vécu le 7 octobre puis est passé à autre chose, [ils ont tort.] nous continuons d’en subir les conséquences », dit-elle.
Michal a aussi souligné son inquiétude sur l’incompréhension de la communauté internationale quant à la nécessité de ce conflit pour restaurer une vie normale en Israël.
« Nous devons continuer à vivre ici, retourner dans le nord et le sud, et reprendre le cours de notre vie. Peut-être que nos vies ne seront plus comme avant, mais il faut trouver un moyen de continuer. »
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