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« Je n’avais jamais été visée ainsi auparavant »

Le Brexit aurait-il libéré l’intolérance ?

Une augmentation de 500 % des actes racistes après le vote fait craindre un retour du nationalisme

Des manifestants contre le racisme à Londres, le 2 juillet 2016. (Crédit : Isabel Infantes/Anadolu Agency/Getty Images via JTA)
Des manifestants contre le racisme à Londres, le 2 juillet 2016. (Crédit : Isabel Infantes/Anadolu Agency/Getty Images via JTA)

Pendant deux ans, pour ses voyages dans la capitale anglaise, Natalie Pitimson s’est promenée avec un sac de bibliothèque décoré d’un mot en Yiddish.

« Le mot ‘schelp’ décrit parfaitement mes excursions régulières dans le cœur de Londres », écrit Pitimson, une professeure de sociologie à l’université de Brighton, sur son blog.

Elle n’avait jusque-là rencontré aucun incident désagréable à propos du sac, dont le slogan « me rappelle mon éducation dans une famille juive très vivante, où de telles expressions émaillaient des phrases en anglais ».

Mais la semaine dernière, le sac a causé une grande inquiétude à Pitimson, quand un passager du métro l’a pris pour une invitation à une attaque verbale vicieuse. Selon Pitimson, l’homme lui aurait dit de « d’aller se faire foutre en Israël avec les autres youpins ».

L’incident du 28 juin a laissé Pitimson “tremblante et très affectée », écrit-t-elle. « Je n’ai pensé à rien d’autre de toute la journée. Je n’avais jamais été visée ainsi auparavant ».

Pitimson relie cet incident du schlep à un pic remarquable des expressions de xénophobie après le referendum du 23 juin dans au Royaume-Uni, dans lequel 52 % des votants ont soutenu une sortie du Royaume-Uni, ou Brexit, de l’Union européenne.

Alors que la nation peine à gérer les conséquences de ce vote qui créé des divisions, les opposants au Brexit citent de tels incidents comme preuve que le vote a entraîné une vague de racisme. Selon le conseil des chefs de la police nationale, 331 actes de racisme supposés ont été rapportés à la police la semaine après le vote, comparé à une moyenne hebdomadaire de seulement 63 avant (le communiqué n’a pas précisé quelle était cette période précédente).

Le Community Security Trust (CST), l’organisme de veille du judaïsme britannique sur l’antisémitisme, a exprimé son inquiétude, ainsi que d’autres groupes juifs britanniques, quant à l’augmentation de ces incidents, qui comprennent des graffiti haineux contre les immigrés polonais et des agressions verbales d’autres immigrés dans la rue.

Mais ni le CST ni la Campagne contre l’antisémitisme, une alternative plus petite et bénévole au CST, ne peuvent pointer une hausse directe des actes antisémites après le Brexit.

Dans le quartier à majorité juive de Golders Green, certains habitants disent qu’ils ne se sentent pas moins en sécurité qu’avant.

« Je ne vois aucune augmentation, rien d’inhabituel », déclare Mike Cohen, un juif pratiquant de Golders Green. « Ni dans la rue, ni à la télévision, nulle part ».

Néanmoins, des rapports de crimes haineux et d’agressions verbales se sont hissés à la Une des journaux, et dans les éditoriaux passionnés des médias libéraux britanniques. Le ministre David Cameron, qui a œuvré sans relâche contre un Brexit et qui a démissionné après son échec, a condamné la recrudescence des attaques.

« Ces derniers jours, nous avons vu un graffiti méprisable tagué sur un centre communautaire polonais, nous avons vu des individus agressés verbalement car ils sont membres de minorités ethniques », a tonné Cameron au Parlement la semaine dernière. « Nous devons nous rappeler que ces gens sont venus ici et ont magnifiquement contribué au développement de notre pays. Nous ne tolérerons pas ces crimes haineux ou ce genre d’attaques ; ils doivent être éliminés ».

Le Premier ministre britannique David Cameron (centre), la députée travailliste Hilary Benn (à g.) et le chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn (à dr.), s’apprêtent à déposer des fleurs en mémoire de la députée travailliste Jo Cox, tuée lors d’un meeting, à Bristall, nord de l’Angleterre, le 17 juin 2016. (Crédits : AFP / Oli Scarff)
Le Premier ministre britannique David Cameron (centre), la députée travailliste Hilary Benn (à g.) et le chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn (à dr.), s’apprêtent à déposer des fleurs en mémoire de la députée travailliste Jo Cox, tuée lors d’un meeting, à Bristall, nord de l’Angleterre, le 17 juin 2016. (Crédits : AFP / Oli Scarff)

Mais certains soutiens du Brexit ont suggéré que Cameron et les autres opposants exagéraient la sévérité de la situation, pour saper les résultats du Brexit.

Will Franken, un comédien et blogueur londonien conservateur, écrit que les médias et les groupes de veille qui reportent une hausse des crimes haineux « alarment inutilement » la population pour discréditer ceux qui ont voté pour quitter l’UE.

Le directeur de la communication de CST, Mark Gardner, a réagi en disant que son organisation « prenait très au sérieux l’inquiétude selon laquelle l’antisémitisme pourrait être utilisé abusivement par ceux qui ont d’autres buts que la lutte contre le racisme ».

Mais Gardner a aussi affirmé que les plaintes d’une rhétorique raciste après le Brexit lui donnaient des raisons de préoccupation.

« Le racisme qui a suivi le Brexit est basé sur le principe de la ‘récupération du pays’ et, dans ce mode de pensée, il est très facile pour les Juifs d’être aussi étiquetés comme étrangers, de Britanniques inauthentiques », a-t-il expliqué.

Il a ajouté que « le Brexit avait été confisqué par des antisémites d’extrême-droite dans certains cercles sur les réseaux sociaux, qui ont célébré le vote comme une défaite des banquiers sionistes ».

Des acheteurs dans un marché du quartier juif londonien de Golders Green, le 19 juin 2015. (Crédits : Cnaan Liphshiz / JTA)
Des acheteurs dans un marché du quartier juif londonien de Golders Green, le 19 juin 2015. (Crédits : Cnaan Liphshiz / JTA)

Pitimson n’a aucun doute : son épreuve dans le métro est liée au Brexit.

« Je viens juste d’être agressée verbalement – dites-moi à nouveau que le racisme n’a joué aucun rôle dans le Brexit », a-t-elle titré son billet de blog sur son expérience.

Bien que son interlocuteur n’ait rien dit spécifiquement sur le vote, Pitimison a senti que ses actions étaient une expression d’un sentiment nationaliste, dirigé contre quiconque perçu comme un étranger. L’immigration était un thème majeur pour ceux qui voulaient quitter l’UE, lesquels ont été nombreux à citer des inquiétudes quant au flot des 1,8 million de musulmans qui sont entrés en Europe cette année, venant du Moyen-Orient. Les travailleurs migrants de l’Europe de l’Est étaient également une plainte majeure.

Dans un autre incident dans le métro londonien, le réalisateur Haïm Bresheeth a déclaré que, le 24 juin, un « Brexiter certain » l’avait confronté parce que Bresheeth parlait en hébreu au téléphone.

« Dans ce pays, nous parlons anglais ! Vous ne pouvez pas parler anglais, monsieur ? » a dit l’homme à Bresheeth, mais sans faire de référence au vote, selon le réalisateur, qui s’est exprimé sur son compte Facebook après l’incident.

Le Brexit à l’origine « d’un énorme pic du discours de haine »

Le débat sur le Brexit a provoqué « un énorme pic du discours de haine » envers les migrants, « au plus haut niveau de la classe politique britannique » et aura des répercussions en Europe, a déploré vendredi à Athènes le commissaire aux droits de l’homme au Conseil de l’Europe.

« Le débat sur le Brexit était terrifiant car vous aviez une rhétorique raciste envers les migrants au plus haut niveau de la classe politique au Royaume-Uni », a indiqué Nils Muižniek lors d’une conférence de presse.

« Surtout pendant les deux derniers mois, il y a eu un énorme pic du discours de haine », a-t-il souligné en rappelant que le Conseil de l’Europe avait envoyé un rapport au gouvernement britannique sur ce sujet.

Interrogé sur l’impact en Europe du langage raciste utilisé, le commissaire a répondu que cela « envoie un signal aux partis populistes à travers l’Europe, leur montrant comment c’est facile de manipuler le discours du jeu politique ».

Il s’est dit également inquiet « sur les répercussions plus larges en Europe » du débat sur le Brexit, surtout à l’approche « du prochain grand évènement, le référendum en Hongrie » où « les migrants ont déjà été une cible » raciste.

Dix jours après le référendum au Royaume-Uni dont le résultat a provoqué un choc en Europe, la Hongrie a annoncé un autre référendum pour le 2 octobre, portant sur le plan européen de relocalisation des migrants.

Les Hongrois doivent répondre à la question: « Voulez-vous que l’Union européenne décrète une relocalisation obligatoire de citoyens non hongrois en Hongrie sans l’approbation du Parlement hongrois? ».

M. Muižniek a effectué une visite de cinq jours en Grèce cette semaine pour enquêter sur l’impact de la crise économique, qui frappe le pays depuis sept ans, et de la crise migratoire de cette dernière année sur les droits de l’homme.

Il s’est félicité « de l’amélioration » de la situation en Grèce en matière de droits de l’homme et du fait que « des députés et membres du parti néonazi Aube dorée, accusés de crimes et violences racistes, sont actuellement jugés devant les tribunaux grecs ».

Il s’est particulièrement félicité du renforcement de l’arsenal législatif en 2014, quelques mois après l’assassinat d’un rappeur grec par un membre d’Aube dorée, ainsi que « du discours positif du gouvernement grec en faveur des migrants ».

« Ces actions envoient un message de tolérance zéro face à la xénophobie et au racisme », a souligné M. Muižniek.

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