Loi anti-implantations en Irlande : l’ambassadrice « furieusement réprimandée »
Le ministère des Affaires étrangères a averti que l'adoption de ce texte "hypocrite et antisémite" aurait de graves répercussions sur les liens entre les deux pays
Le ministère des Affaires étrangères a réprimandé l’envoyée irlandaise en Israël, vendredi, suite à l’avancée d’un projet de loi pénalisant les produits israéliens fabriqués dans les secteurs capturés pendant la guerre de 1967.
Le ministère a fait savoir que l’ambassadrice Alison Kelly avait fait l’objet d’un « blâme furieux » en raison de cette loi « scandaleuse », adoptée jeudi par la Chambre basse du gouvernement de l’Irlande.
« Il a été clairement établi devant l’ambassadrice que cette législation hypocrite et antisémite aura de graves répercussions sur les relations entre Israël et l’Irlande et sur le statut [de l’Irlande] dans la région, s’il devait être avancé », a fait savoir le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
« Il serait préférable que l’Irlande s’occupe des sombres dictatures et des groupes terroristes plutôt que d’Israël, la seule véritable démocratie au Moyen-Orient », a continué le communiqué.
La Chambre basse du parlement irlandais a fait avancer jeudi un projet de loi qui pénaliserait l’importation ou la vente de produits israéliens originaires de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est et du plateau du Golan, entraînant une crise diplomatique avec Jérusalem.
Plus tôt, le ministère des Affaires étrangères avait vivement réclamé la condamnation du texte.
« C’est l’expression claire d’une discrimination obsessionnelle qui a doit être rejetée avec dégoût », avait fait savoir le ministère dans une déclaration.
La mesure, présentée par le parti Fianna Fáil – Parti républicain – rendrait illégales « l’importation et la vente de produits, services et ressources naturelles originaires des implantations illégales dans les territoires occupés ». Sinn Fein, un parti de gauche, a également soutenu le projet de loi.
Le Dail, la Chambre basse du parlement irlandais, a approuvé le texte par un vote de 78 « pour » et de 45 « contre », avec trois abstentions. La législation doit encore traverser trois étapes supplémentaires avant d’entrer en vigueur en tant que loi, selon des informations.
Le texte proposé déclare qu’il est illégal « qu’une personne importe ou tente d’importer des produits fabriqués dans les implantations ».
De la même manière, ceux qui « aident une personne à importer ou à tenter d’importer des produits fabriqués dans les implantations commettent un crime sanctionné par une peine maximum de cinq ans de prison ».
Au cours des débats sur le projet de loi, certains députés à Dublin ont suggéré que l’adoption de la législation mènerait Israël à fermer son ambassade à Dublin et que les relations entre l’Irlande et l’Etat juifs s’en ressentiraient.
Le porte-parole des Affaires étrangères au sein de Fianna Fáil, Niall Collins, a déclaré au journal Irish Independent, avant le vote du texte, que sa formation était « de plus en plus inquiète des actions d’Israël et de son mépris continu et flagrant de la loi internationale ».
Il a ajouté que la mesure ne nuirait pas au commerce des produits israéliens mais seulement aux échanges de ceux qui sont fabriqués dans les implantations.
La Chambre haute du parlement irlandais, le Seanad, avait adopté le projet de loi dit « des territoires occupés » au mois de décembre.
Au mois de novembre, la sénatrice indépendante Frances Black, à l’origine du texte, avait indiqué ne pas vouloir singulariser Israël, disant que le Sahara occidental pouvait être une autre cible possible.
Jeudi, elle a tweeté un émoticône représentant un drapeau palestinien pour célébrer le vote.
Amazing! First the Seanad, now the Dáil: an overwhelming majority have voted for the Occupied Territories Bill 2018 and a ban on illegal #SettlementGoods! Ireland will always stand for international law + human rights, & we're one step closer to making history. Onwards ???????????????????? pic.twitter.com/28LKTZzAw0
— Frances Black (@frances_black) January 24, 2019
Tandis que le ministère des Affaires étrangères avait fait savoir sa colère lors de l’avancée du texte au Seanad, les responsables israéliens avaient paru peu perturbés lors de discussions privées, estimant que le gouvernement de Dublin empêcherait la législation d’être promulguée – en bloquant techniquement son avancée si nécessaire.
Le gouvernement a expliqué être opposé cette loi, l’interdiction de produits étant une prérogative de l’Union européenne.