Israël en guerre - Jour 351

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Opinion

L’opération « Bipeurs » dissuadera-t-elle le Hezbollah et l’Iran ? Israël est-il prêt à la guerre ?

Cette opération spectaculaire devait apparemment être le coup d'envoi d'une large offensive terrestre ; toutes les parties en lice évaluent maintenant leurs options - y compris celle d'un conflit à grande échelle

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Des morceaux d'un biper explosé, sur une photo circulant sur les réseaux sociaux, le 17 septembre 2024. (Crédit : Telegram)
Des morceaux d'un biper explosé, sur une photo circulant sur les réseaux sociaux, le 17 septembre 2024. (Crédit : Telegram)

L’explosion des bipeurs de milliers de terroristes du Hezbollah, dans la journée de mardi, dans tout le Liban et en Syrie, a constitué une prouesse spectaculaire en matière de renseignement, de technologie et d’exécution – un contraste saisissant avec les échecs tragiques qui avaient permis au Hamas de mener à bien son pogrom du 7 octobre avec ses meurtres en masse, ses viols et ses kidnappings dans le sud d’Israël.

L’opération, qui a consisté à faire exploser des bipeurs – une attaque qui a été largement imputée à Israël, qui, pour sa part, n’a ni confirmé, ni démenti sa responsabilité – avait apparemment été conçue pour donner le coup d’envoi, dans un avenir proche, d’une offensive terrestre majeure visant à la fois à affaiblir et à dissuader le Hezbollah. Avec un autre objectif également : Créer les conditions nécessaires au retour de la sécurité dans le nord, ce qui permettrait à des dizaines de milliers d’Israéliens contraints de quitter leurs foyers depuis près d’un an d’enfin revenir chez eux.

Dans un tel scénario, l’impact de cette vague coordonnée d’explosions aurait pu être extraordinairement fort – non seulement en mettant directement hors d’état de nuire un certain nombre d’hommes armés du Hezbollah, mais aussi en compliquant nettement, à l’heure de vérité, les communications et la logistique au sein de la milice terroriste la plus puissante au monde.

Alors que se posait un dilemme du type « maintenant ou jamais » – certains membres du Hezbollah ayant commencé à soupçonner que leurs nouveaux bipeurs faisaient office de chevaux de Troie – la décision a été prise de faire exploser les appareils. En renonçant, de toute évidence, à une opération qui aurait servi par ailleurs de premier acte dans une guerre totale.

Au mois de décembre, le ministre de la Défense, Yoav Gallant, avait averti qu’Israël était « attaqué à partir de sept arènes différentes » : Gaza, le Liban, la Syrie, la Cisjordanie, l’Irak, le Yémen et l’Iran. Les derniers jours ont mis l’accent sur la véracité de ces dires, avec des hostilités dans le nord qui ont grimpé en flèche, la poursuite des combats et des pertes à Gaza, le renforcement des déploiements de soldats pour lutter contre le terrorisme en Cisjordanie, les attaques à la roquette et aux drones des Houthis et des milices pro-iraniennes au Yémen et en Irak, respectivement. Et des ayatollahs qui tirent les ficelles en coulisse.

À la fin du mois dernier, Gallant avait déclaré aux autres ministres qu’Israël se trouvait désormais à un « carrefour stratégique ». Il avait d’abord évoqué une voie menant à un accord de cessez-le-feu ouvrant la voie à la libération des otages à Gaza, à un apaisement potentiel dans le nord du pays et à une alliance régionale renforcée, y compris avec les Saoudiens, contre l’axe du mal de l’Iran. Il avait ensuite parlé de l’autre voie qui se présentait au pays, notant que si Israël devait décider de l’emprunter, le pays risquait de se retrouver toujours plus impliqué dans la bande de Gaza, les espoirs concernant le sort réservé aux otages s’amenuiseraient et les craintes portant sur une potentielle escalade dans le nord augmenteraient, avec des soldats israéliens poussés au-delà de leurs limites.

À l’heure où j’écris ces lignes, même après le coup spectaculaire qui a été porté mardi au Hezbollah – au point de vue matériel et au point de vue psychologique – les choses peuvent encore évoluer dans un sens ou dans l’autre. Si la perspective d’un accord de « cessez-le-feu contre otages » s’est éloignée, les Américains, au moins, n’ont pas abandonné tout espoir. Israël n’a pas tiré avantage des premières heures de choc et de confusion au sein du Hezbollah pour envoyer ses troupes au Liban pour qu’elles s’y confrontent aux forces Radwan de Hassan Nasrallah. Le pays n’a pas non plus lancé de frappes aériennes pour tenter de neutraliser les missiles lourds et autres projectiles guidés de précision les plus puissants que le groupe terroriste conserve dans son arsenal.

Une vidéo montre un homme, à gauche, juste avant qu’il ne soit blessé par l’explosion de son bipeur, à Beyrouth, le 17 septembre 2024. (Crédit : Capture d’écran : X)

Le Hezbollah a juré de riposter à Israël – mais cela fait onze mois qu’il s’en prend à Israël, multipliant les frappes à la roquette, lançant des drones sur des bases situées au centre du pays. Il aurait même tenté, selon nos informations, d’assassiner Moshe Yaalon, ancien chef d’état-major et ex-ministre de la Défense. Il est absolument certain qu’en ce moment-même, l’organisation terroriste est en train de finaliser ses ses derniers plans d’attaque.

Une question est de savoir si Nasrallah – et, de manière plus pertinente encore, si les Iraniens qui fournissent au Hezbollah ses missiles et ses moyens financiers – sont prêts à déclencher une guerre totale, ou si la nouvelle humiliation subie lors de l’opération des « bipeurs » les fera réfléchir aux désagréables surprises qu’Israël pourrait encore leur réserver. Une autre question est de déterminer si Israël est suffisamment préparé à un conflit qui pourrait s’aggraver de façon considérable à tout moment, éclipsant les hostilités des onze derniers mois.

Le ministre de la Défense Yoav Gallant s’adressant aux réservistes de la Brigade Oded lors d’un exercice dans le nord d’Israël, le 10 septembre 2024. (Crédit : Ariel Hermoni/Ministère de la Défense)

Il n’est pas trop tard pour réexaminer la situation

L’inconscience dont fait preuve le Premier ministre Benjamin Netanyahu dans son projet de nommer Gideon Saar au poste de ministre de la Défense, au beau milieu de cette guerre sur sept fronts, n’est qu’encore davantage soulignée par l’escalade des enjeux résultant de l’attaque menée contre les bipeurs du Hezbollah.

Que Saar, un homme sans expérience ou expertise militaire, puisse considérer qu’il est capable d’assumer sans problème la responsabilité ministérielle directe de l’establishment de la sécurité pendant la période qui est sans doute la plus dangereuse de l’histoire moderne d’Israël dépasse l’entendement.

Qu’il puisse ainsi se dérober après avoir passionnément mis en garde, pendant des années, contre la priorité accordée par Netanyahu à la survie de son poste de Premier ministre, au prix de la survie d’Israël si nécessaire, est déjà assez grave. Mais qu’il accepte lui-même un poste pour lequel il n’est « pas compétent » – ce sont les mots qui ont été utilisés par l’ancien chef d’état-major de Tsahal, Gadi Eisenkot – et que, ce faisant, il puisse exacerber les dangers qui planent sur le pays est impardonnable.

J’ai d’ores et déjà écrit ici un plaidoyer adressé à Netanyahu – qui restera certainement lettre morte – pour qu’il réexamine la situation. Et il n’est pas trop tard pour que Saar fasse de même.

Une image composite montre le Premier ministre Benjamin Netanyahu, (à gauche), et Gideon Saar, (à droite). (Crédit : Flash90)

Volonté nationale

En cette heure fatidique, décisive pour le pays, il faut noter que, contrairement à la période de complaisance sans fondement qui avait précédé le 7 octobre, Israël reconnaît aujourd’hui la puissance des menaces extérieures auxquelles il est confronté.

Il faut souligner qu’Israël a surmonté des obstacles improbables pour survivre à la guerre d’Indépendance, pour prévenir une attaque panarabe en 1967, pour se remettre des pertes et du désespoir qui avaient marqué les débuts de la guerre du Kippour et pour tenir bon face à l’assaut stratégique des attentats-suicides de la seconde Intifada.

Il faut souligner que le régime iranien qui coordonne les efforts de destruction d’Israël, des efforts menés sur plusieurs fronts, est intérieurement faible et mal-aimé par son peuple, et que les partenaires potentiels dans la guerre stratégique pour faire face au régime n’ont pas fermé la porte à Israël au cours de l’année qui vient de s’écouler.

Des troupes de la 5e brigade de réserve du Corps d’Infanterie opérant dans le corridor de Netzarim, dans le centre de Gaza, sur une photo publiée le 16 septembre 2024. (Crédit : Armée israélienne)

Il est également essentiel de rappeler que, dans ses heures les plus sombres, ce petit pays a été soutenu par la volonté de toute la nation – par la résilience d’un peuple animé d’une détermination commune à vaincre et d’un sens aiguisé des responsabilités partagées.

C’est cette volonté qui a permis à Israël de survivre et de prospérer. Sans elle, Israël est en danger. Avec elle, tous les ennemis extérieurs, sur tous les fronts, peuvent être vaincus.

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