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Quand Marjane Satrapi recadre Sandrine Rousseau

L’autrice franco-iranienne reproche à l’écologiste de défendre le port du voile

Sandrine Rousseau, députée écologiste du Nouveau Front populaire, sur le plateau de Franceinfo, le 31 juillet 2024. (Crédit : Capture d’écran Franceinfo / X)
Sandrine Rousseau, députée écologiste du Nouveau Front populaire, sur le plateau de Franceinfo, le 31 juillet 2024. (Crédit : Capture d’écran Franceinfo / X)

« Ok, tout le monde a le droit d’être con… mais à ce moment-là, il vaut mieux se taire. » Sur Instagram, la romancière franco-iranienne Marjane Satrapi a fermement recadré la députée écologiste Sandrine Rousseau.

Dans une vidéo sur son compte, l’autrice de la célèbre bande dessinée Persepolis critique la réaction de la parlementaire à l’affaire Ahou Daryaei, du nom de cette étudiante iranienne arrêtée après s’être dévêtue en public samedi devant l’université Azad de Téhéran. Devenue une icône en quelques jours, la vidéo de la jeune femme a inondé les réseaux sociaux.

Sur son compte X, Rousseau a voulu apporter son soutien à l’étudiante en publiant un dessin à sa gloire accompagné de ce commentaire : « Notre corps, et tout ce que l’on met – ou pas – pour le vêtir, nous appartient. »

Un message qui ne passe pas pour Marjane Satrapi. La romancière reproche à l’écologiste de faire preuve d’ambiguïté et de défendre le voile : « À force de ne pas vouloir être accusée de racisme, vous jouez le jeu des fanatiques. » Une position massivement relayée sur X. Sandrine Rousseau, qui se revendique comme militante féministe, est souvent critiquée pour son indulgence vis-à-vis des défenseurs du voile islamique.

En 2022, les deux femmes s’étaient déjà opposées lors d’un rassemblement consécutif à l’arrestation et à la mort de l’Iranienne Mahsa Amini pour « port de vêtements inappropriés ».

Marjane Satrapi a rappelé cet épisode : « Le premier rassemblement organisé par le mouvement Femme-Vie-Liberté s’est tenu place de la République, en soutien à la révolution populaire survenue en Iran après l’arrestation puis la mort de Mahsa Amini pour un voile mal porté. Des dizaines de milliers de jeunes filles ont été arrêtées, violentées, emprisonnées. Vous aviez pris la parole, et tout le monde vous a huée parce que, quelques jours auparavant, vous aviez déclaré que le voile est l’embellissement de la femme. Partout, à la radio et à la télévision, vous aviez expliqué ensuite que vous aviez été huée parce que vous êtes une femme. Or nous étions six femmes, mais nous avons toutes été applaudies, sauf vous. Si vous avez été huée, c’est parce que vous êtes con. »

« Je salue le courage de cette jeune femme qui fait acte de résistance et s’est hissée au rang d’icône pour le combat des femmes en Iran, pour le combat des femmes partout où leurs droits sont menacés », a déclaré le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot sur la chaîne publique France 2.

Selon les groupes militants qui ont révélé l’affaire samedi et posté la vidéo, la jeune femme s’est déshabillée en signe de protestation après avoir été harcelée par des agents de l’université, estimant qu’elle ne respectait pas le strict code vestimentaire islamique.

Une autre vidéo la montre violemment embarquée dans une voiture par les forces de sécurité.

L’agence iranienne Fars a confirmé samedi l’incident, assurant que l’étudiante portait des vêtements « inappropriés » en classe et s’était « dévêtue » après avoir été mise en garde « calmement » par les agents de sécurité.

L’incertitude régnait mardi sur son sort. Selon le Centre pour les droits humains en Iran (CHRI, basé à New York), la jeune femme a été « transférée de force dans un hôpital psychiatrique ».

Selon le porte-parole de l’université Azad cité par les médias conservateurs, elle a été remise à la police en raison d’une conduite « immorale ». Selon lui, cette mère de deux enfants était séparée de son époux, « sous forte pression psychique et (souffrant) de troubles mentaux ».

Le média IranWire, basé à l’étranger, a assuré de son côté qu’elle était étudiante en langue française et n’avait jamais montré de troubles psychiques.

« Les autorités iraniennes utilisent systématiquement l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte comme un moyen de supprimer la dissidence et de saper la crédibilité des opposants », a déclaré le directeur exécutif du CHRI, Hadi Ghaemi, dans un communiqué.

L’organisation cite plusieurs cas, dont Afsaneh Bayegan et deux autres actrices, jugées « atteintes de maladie mentale » par un tribunal de Téhéran en juillet 2023 après avoir défié les lois islamiques sur le port du voile obligatoire.

Ou celui du rappeur kurde Saman Yasin, arrêté pendant les manifestations du mouvement « Femme Vie Liberté », et hospitalisé en établissement psychiatrique en juillet 2023.

La prix Nobel de la Paix 2003, l’avocate iranienne Shirin Ebadi, a également évoqué le transfert de la jeune femme en psychiatrie. « Faire des opposants des gens malades est une méthode éprouvée de la répression », a-t-elle déclaré, dénonçant une « torture ».

L’étudiante « a transformé son corps en symbole de dissidence », a réagi pour sa part sur les réseaux une autre prix Nobel de la Paix iranienne (2023), l’opposante emprisonnée Narges Mohammadi, réclamant « sa libération et la fin du harcèlement des femmes ».

La loi islamique en Iran impose un code vestimentaire très strict aux femmes, sommées de porter le foulard et des vêtements amples dissimulant leurs formes.

Les Iraniennes sont à l’origine de manifestations inédites dans le pays, après la mort de la jeune Kurde Mahsa Amini en septembre 2022, arrêtée pour ne pas avoir respecté ce code. Le mouvement « Femme Vie Liberté » a été massivement réprimé, avec au moins 551 morts et des milliers de personnes arrêtées, selon des ONG.

« Vous tuez, vous battez, vous emprisonnez… mais l’histoire se termine par la victoire de ceux qui refusent de se soumettre à votre oppression », a affirmé sur Instagram l’actrice iranienne en exil, Golshifteh Farahani.

Mardi, plusieurs dizaines de personnes se sont réunies place du Panthéon, à Paris, dont deux femmes en sous-vêtements portant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Aux Iraniennes insurgées, les femmes reconnaissantes », et « Femme Vie Liberté ».

« On n’a pas de nouvelles d’elle (l’étudiante, ndlr), en revanche ce qu’on sait, c’est que le script du régime bat son plein. On la présente désormais comme folle, hystérique », a dénoncé Chirinne Ardakani, avocate et présidente de l’organisation Iran justice.

« De toute façon, aucune pathologie mentale ne justifierait des coups, une arrestation arbitraire, la répression ».

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