Témoin clé dans l’Affaire 1 000 : Sara Netanyahu a menacé de se suicider à cause de moi

Hadas Klein, une témoin déterminante dans le procès pour corruption du Premier ministre Benjamin Netanyahu, a déclaré dans une interview télévisée diffusée vendredi que l’épouse du Premier ministre, Sara, avait un jour menacé de se suicider et de laisser une note disant que c’était à cause de Klein et de son patron de l’époque, le milliardaire Arnon Milchan, un bienfaiteur de Netanyahu.

Klein a déclaré à la chaîne N12 qu’elle soupçonnait depuis longtemps que les diffamations à son encontre sur les réseaux sociaux étaient orchestrées « d’en haut » en représailles à son témoignage. Elle a ajouté qu’elle se sentait confortée par le reportage d’enquête de la chaîne du mois dernier qui semblait montrer que Sara Netanyahu était à l’origine des invectives en ligne.

Klein a également semblé confirmer un récent article du quotidien Haaretz selon lequel, en 2017, le chef de l’opposition de l’époque, Isaac Herzog – aujourd’hui président d’Israël – lui avait rendu visite en privé, ce qu’elle avait considéré comme une « tentative de m’influencer » dans le cadre de son témoignage contre le Premier ministre.

« Les portes de l’enfer se sont refermées sur moi », a déclaré Klein, décrivant une campagne de harcèlement soutenue et organisée contre elle, avec des milliers de messages en ligne l’accusant d’immoralité et de criminalité. Elle a déclaré que son mari, Shraga, lui avait dit qu’il avait « peur que quelqu’un lui mette une balle dans la tête ».

Klein est un témoin dans l’Affaire 1 000, dans laquelle le Premier ministre est accusé d’avoir reçu illicitement des centaines de milliers de dollars de cigares, de champagne et de bijoux, dont une grande partie à la demande de son épouse.

Selon Klein, Sara Netanyahu a notamment demandé à Milchan et à un autre bienfaiteur présumé, le milliardaire australien James Packer, de lui offrir, ainsi qu’à sa famille, un cadeau à l’occasion de leur anniversaire de mariage.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son épouse Sara à leur sortie de l’avion officiel « L’aile de Sion » à Washington, le 22 juillet 2024. (Crédit : Amos Ben Gershom/GPO)

Le cadeau, offert par Packer, était un bracelet d’une valeur de 46 500 dollars, selon une facture produite par Klein. Sara Netanyahu a ensuite demandé à échanger le cadeau après que son mari lui a dit qu’elle « ne pouvait pas le porter parce qu’il était roumain », selon Klein, qui a supposé que le Premier ministre voulait dire que le bracelet était kitsch.

« Je me suis dit qu’il avait raison, parce qu’on ne peut pas sortir avec ce genre de bracelet. »

Klein a ajouté que l’épisode du bracelet contredisait les affirmations de Netanyahu, qui a récemment témoigné dans le cadre de son procès pour corruption, selon lesquelles sa femme avait fait les demandes et qu’il n’était pas au courant.

La campagne de pression présumée de Sara Netanyahu

Quand Klein a commencé à témoigner, Sara Netanyahu a tenté de la faire renvoyer, en disant à Milchan, à tort, que Klein avait une liaison avec son chauffeur Jonathan et qu’on ne pouvait pas leur faire confiance.

Après avoir été sa secrétaire pendant 38 ans, Milchan l’a finalement licenciée à la suite de son témoignage en septembre 2022.

Par ailleurs, les médias pro-Netanyahu auraient colporté des mensonges sur la liaison de Klein avec le chauffeur de Milchan, ainsi que sur d’autres allégations similaires concernant Milchan, Packer et l’ancien chef de l’agence de renseignement du Mossad, Yossi Cohen.

Une autre rumeur accusait Klein d’avoir obtenu sa maison à Herzliya en faisant chanter le leader de l’opposition Yaïr Lapid lorsqu’il était ministre des Finances sous Netanyahu. Des militants du Likud, le parti du Premier ministre, ont rapidement affiché l’adresse de Klein et ont commencé à organiser des manifestations quotidiennes devant son domicile.

L’homme d’affaires Arnon Milchan avant son témoignage dans le procès de corruption de Netanyahu dans l’Affaire 1 000, à Brighton, le 29 juin 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

La correspondance de Hanni Bleiweiss, secrétaire de longue date du Premier ministre, citée dans le reportage de la chaîne N12 du mois dernier, indique que Sara Netanyahu avait ordonné à l’ancien collaborateur de son époux d’envoyer des militants du Likud chez Klein. À la suite de ce reportage, la procureure générale et le procureur de l’État d’Israël ont ordonné à la police d’ouvrir une enquête sur Sara Netanyahu.

Klein a raconté à la chaîne certains des comportements les plus abrasifs de Sara Netanyahu à son égard.

Lors d’une conversation, elle lui aurait reproché d’avoir empêché un chef de chantier nommé par Milchan d’inspecter la résidence des Netanyahu à Césarée avant d’y effectuer des travaux de rénovation.

Au cours de cette « violente conversation », Sara Netanyahu lui aurait dit : « Je suis en retard au travail à cause de vous, ils vont me renvoyer à cause de vous », même si c’est l’épouse du Premier ministre qui avait pris l’initiative de l’appel, selon Klein.

Hadas Klein arrivant au tribunal pour témoigner dans le procès contre l’ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, au tribunal de Jérusalem, le 11 juillet 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

« Le pire, c’est qu’elle a dit : ‘Je vais me suicider et j’écrirai une note disant que c’est à cause de vous et d’Arnon’ », a ajouté Klein.

Quelques heures plus tard, Klein a reçu un appel du Premier ministre lui-même, qui tentait de justifier le comportement de son épouse.

« Vous devez comprendre qu’elle est massacrée par les médias, vous ne devriez pas être du côté des médias », aurait déclaré le Premier ministre, selon Klein.

Il aurait également justifié les cadeaux qu’il aurait reçus, selon Klein, en disant : « On n’offre pas des choses comme des appartements ou autres, qui sont interdites. Je l’expliquerai également à Arnon et Packer. »

Des dizaines de milliers de manifestants contre le projet de loi du gouvernement sur la refonte du système judiciaire, rue Kaplan, à Tel Aviv, le 22 juillet 2023. (Crédit : Gilad Furst)

Le bureau du Premier ministre a réagi à l’interview en la qualifiant de « nouveaux mensonges de Hadas Klein, dont le témoignage s’est effondré au tribunal et qui s’est révélée être une manifestante obsessionnelle de Kaplan », en référence à la rue de Tel Aviv qui a connu des manifestations hebdomadaires de masse tout au long de l’année 2023 contre le projet de refonte du système judiciaire du gouvernement. La chaîne N12 a indiqué que Klein n’avait jamais participé aux manifestations de la rue Kaplan.

Visite inhabituelle de Herzog

Le mois dernier, Haaretz a révélé que le chef de l’opposition de l’époque, Herzog, qui est également un ami de Milchan, est venu au domicile de Klein en 2017 pour lui faire part de la stratégie de défense juridique de Netanyahu. Le journal a suggéré que la visite de Herzog était une tentative d’ébranler Klein concernant son témoignage contre le Premier ministre.

Avant qu’ils ne s’assoient dans le jardin de Klein, Herzog a demandé à ce que leurs téléphones soient placés à l’intérieur afin qu’ils ne puissent pas être enregistrés, selon l’article.

Selon le journal, Herzog a dit à Klein que Netanyahu avait déclaré à la police que Milchan était celui qui insistait pour offrir des cadeaux à Netanyahu et non l’inverse.

Klein a déclaré sur la chaîne N12 que cette affirmation « m’a dérangée, parce que je me suis dit : d’accord, la prochaine chose qu’il dira, c’est que nous l’avons aussi attrapé et lui avons enfoncé un cigare dans la bouche ». Elle a ajouté que tout le monde savait que les Netanyahu étaient ceux qui avaient demandé des cadeaux à Milchan.

Klein a confirmé à la chaîne N12 qu’elle et Herzog avaient laissé leurs téléphones dans sa chambre et qu’ils avaient parlé dans son jardin. Herzog a même dû revenir chez elle parce qu’il avait oublié son téléphone dans sa chambre, a-t-elle ajouté.

Elle a également semblé confirmer la suggestion de Haaretz selon laquelle la réunion était une tentative de déstabilisation.

Le chef de l’opposition Isaac Herzog s’adressant lors d’une cérémonie marquant les 40 ans de la visite du président égyptien Anouar el-Sadate, à la Knesset, le 21 novembre 2017. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

« Ce que j’ai pensé, c’est que Herzog avait peut-être été envoyé sur ordre de Netanyahu », a indiqué Klein, ajoutant qu’elle avait eu l’impression que c’était « une façon de me duper ».

« Cela m’a mise en colère », a-t-elle ajouté.

« J’ai eu l’impression que même les personnes que je considère comme dignes de confiance venaient m’influencer. »

« Il aurait dû dire exactement ce que signifiait cette visite », a-t-elle ajouté.

« Je ne peux dire que ce que j’ai ressenti. »

Herzog a nié auprès de Haaretz avoir tenté d’influencer les poursuites engagées contre Netanyahu. Dans un autre démenti adressé à la chaîne N12, Herzog a également déclaré qu’il tenait depuis longtemps des réunions privées sans téléphone dans la pièce, et a rejeté l’insinuation que cette habitude suggérait quoi que ce soit de douteux.