Un otage secouru raconte les abus de ses ravisseurs et ses retrouvailles avec sa famille
Andrey Kozlov a décrit le 8 juin comme une date "anniversaire" après le raid militaire qui lui a permis d'être sauvé avec d'autres captifs israéliens
Andrey Kozlov, qui a été sauvé le mois dernier alors qu’il était gardé en otage par le Hamas, a indiqué dans une série d’entretiens qui ont été diffusés vendredi qu’il avait été convaincu du fait que ses ravisseurs le tueraient et qu’ils filmeraient sa mort.
Mais lorsqu’il avait été enlevé alors qu’il se trouvait au festival de musique électronique Supernova qui était organisé aux abords du kibboutz Reim, Kozlov — un récent immigrant en provenance de Russie – avait pensé que les hommes qui l’emmenaient étaient venus le secourir, a-t-il déclaré au site d’information Ynet.
Kozlov, 27 ans, avait été sauvé le 8 juin en compagnie de deux autres captifs – Almog Meir Jan, 21 ans et Shlomi Ziv, 40 ans – par les forces spéciales israéliennes qui avaient lancé un raid audacieux dans le camp de réfugiés de Nuseirat, au centre de la bande de Gaza. Tous les trois avaient été kidnappés, le 7 octobre, avec des dizaines d’autres fêtards qui étaient venus à la rave-party, où les terroristes avaient massacré plus de 360 personnes.
Noam Argamani, 26, ans, qui avait elle aussi été kidnappée à Supernova, avait été secourue au cours de la même opération. Elle était gardée en otage dans un immeuble qui se trouvait à moins de 200 mètres de l’appartement où étaient emprisonnés ses trois compagnons d’infortune.
Arnon Zmora, 36 ans, qui appartenait à l’unité antiterroriste d’élite Yamam, avait perdu la vie dans le cadre de cette opération. Kozlov a confié au site Ynet que lui et ses proches étaient allés rendre visite à la famille de Zmora pour tenter de la réconforter.
« Tout le monde me dit en permanence : ‘Tu es un tel héros’, ‘tu es tellement courageux’ et j’ai envie de leur dire : ‘Non, c’est Arnon Zmora qui est un héros. Nos soldats sont des héros. Pas moi’, » a dit Kozlov.
Kozlov et Ziv travaillaient tous les deux dans l’équipe chargée d’assurer la sécurité au festival Supernova et ils avaient été kidnappés alors qu’ils se trouvaient dans la voiture de Ziv. A Gaza, ils avaient changé de lieu de détention à plusieurs reprises avant d’être transférés dans le camp de réfugiés de Nuseirat, qui est situé dans le centre de la bande, au mois de décembre. C’est là qu’ils devaient finalement être sortis des griffes de leurs ravisseurs.
Il a raconté à CNN qu’il avait d’abord eu peur de perdre la vie dans une attaque israélienne.
« Pendant les trois premiers mois, nous avions peur de toutes les bombes que nous entendions. A chaque fois, on commençait par se cacher dans un angle de la pièce », a-t-il indiqué, ajoutant que leurs geôliers riaient de leur affolement.
Kozlov a expliqué à Ynet que leurs gardiens – qui se présentaient tous sous le nom de Muhammad – se rendaient coupables de violences psychologiques et physiques à l’encontre des captifs. Ces derniers utilisaient un mot d’argot pour faire référence à l’un d’entre eux en raison de ses larges pommettes – un homme qui, selon le site, s’appelait Abdallah Aljamal et qui était un correspondant du Palestine Chronicle. Les trois otages étaient ainsi détenus chez lui.
Aljamal, selon Kozlov, souffrait d’un trouble de la personnalité. Il jouait parfois aux cartes avec les captifs et tous discutaient de manière animée du conflit israélo-palestinien. Un jour, s’est souvenu Kozlov, Aljamal s’était tourné vers lui et il lui avait dit : « Je t’aime ».
A d’autres occasions, Aljamal les brutalisait physiquement, les enfermait dans les toilettes ou il les enterrait sous des couvertures étouffantes, dans la chaleur de Gaza.
Le traitement des otages s’était amélioré avec le temps – même si, a indiqué Kozlov, les brimades n’avaient jamais cessé.
Il y avait aussi des violences psychologiques. Les ravisseurs des trois hommes avaient ainsi dit, par exemple, à Ziv que son épouse l’avait abandonnée, s’est souvenu Kozlov.
« J’essayais de ne pas croire à ce qu’ils me disaient. J’étais sûr que ma famille était en train de me rechercher. J’étais sûr que l’épouse de Shlomi cherchait encore à le retrouver. J’étais sûr qu’Israël ne voulait pas notre mort. Mais c’était des choses qui nous étaient beaucoup répétées », a-t-il expliqué.
Leurs geôliers ne cessaient de dire aux otages qu’Israël voulait leur mort, le prix d’un captif vivant étant plus élevé que celui d’un corps sans vie. En fait, a dit Kozlov à la Douzième chaîne, lorsque les troupes israéliennes étaient arrivées dans l’appartement où les trois hommes étaient détenus, lui-même n’avait pas été sûr, de prime abord, qu’elles étaient réellement venues pour les sauver. Il avait craint d’être tué.
Ce matin-là, a-t-il confié à CNN, il lisait un livre consacré à Marco Polo. Il a noté que leurs ravisseurs leur avaient donné quatre ou cinq ouvrages à lire, notamment le Coran.
Alors que le journaliste de CNN lui demandait s’il avait vu d’autres otages en captivité, Kozlov a refusé de répondre, disant seulement qu’il était inquiet pour la sécurité des otages qui se trouvent encore à Gaza. Il a néanmoins précisé que ceux qu’il avait été amené à voir étaient apparemment dans des conditions de détention pires que celles qui avaient été les siennes.
Kozlov a dit à CNN qu’il a regardé la vidéo de son sauvetage de façon répétée.
« C’est spécial pour moi », a-t-il déclaré. « C’est ma troisième date anniversaire », a-t-il continué en expliquant qu’il avait considéré le 7 octobre comme une date anniversaire et le 8 juin – le jour de son sauvetage – comme une autre. Il a montré à la caméra un tatouage, sur son bras, qui épouse les contours des blessures qu’il avait essuyées le jour de son kidnapping.
Kozlov, qui s’est exprimé en anglais, a été vif dans ces entretiens – mimant souvent les explosions et reproduisant le bruit des déflagrations. Mais sa voix est devenue d’une douceur inattendue lorsqu’il a raconté le moment de ses retrouvailles avec sa mère, en Israël.
Sur une vidéo devenue emblématique, Kozlov tombe à genoux, pleurant et serrant les jambes de sa mère qui cherche à le consoler. CNN a demandé à Kozlov s’il avait conscience des difficultés traversées par ses parents pendant ses huit mois de détention.
« J’avais si peur de ne jamais les revoir », s’est exclamé Kozlov. « Je m’imaginais que ma mère, mon père et mon frère ne pourraient plus entendre de ma bouche les mots : ‘Je vous aime’. »
Au total, sept otages ont été sauvés vivants par Tsahal, et les corps de 19 otages ont également été retrouvés, dont trois ont été tués par erreur par l’armée.
116 des 251 otages enlevés par le Hamas le 7 octobre sont toujours à Gaza, mais tous ne sont pas en vie. Une trêve d’une semaine, fin novembre, a permis la libération de 105 civils détenus par le Hamas, et quatre otages ont été libérés avant cela.