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Une commission américaine sur la liberté religieuse accusée d’être trop tendre avec Israël

Le président de la commission sur la liberté de culte suggère que l’institution a refusé de traiter d’Israël pour maintenir un consensus bipartisan

James Zogby à Washington, D.C., en octobre 2012. (Crédit : Chip Somodevilla/Getty Images)
James Zogby à Washington, D.C., en octobre 2012. (Crédit : Chip Somodevilla/Getty Images)

WASHINGTON (JTA) – Le dernier rapport du département d’Etat américain sur les libertés religieuses comprend plus de 1 400 morts sur les accès aux lieux saints en Israël.

Le dernier rapport de la commission américaine sur la liberté de culte dans le monde n’a aucun mot sur ce sujet, ou sur quoique ce soit lié à Israël.

Il existe une raison évidente à cette contradiction : la commission sur la liberté de culte dans le monde, une institution financée par le gouvernement et ouvertement indépendante, se concentre sur un nombre limité de pays ou de groupes avec des intérêts particuliers, alors que le département d’Etat couvre tous les pays.

Mais, dans une rare contestation, le vice-président de la commission, James Zogby, a suggéré une autre explication : Israël est le troisième rail [celui qui est électrifié dans le métro], et une institution qui a été fondée précisément pour que le gouvernement reste honnête sur le sujet de la liberté de culte ne s’attaque jamais à ce pays selon lui.

Au moins l’un des anciens membres de la commission a dit à son tour que Zogby, qui est aussi le président de l’Institut arabo-américain et défend depuis longtemps les droits des Palestiniens, était obsédé par le sujet palestinien. (Les membres de la commission sont tous bénévoles.)

Deux fidèles musulmanes près du complexe de la mosquée Al-Aqsa, sur le mont du Temple, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 7 novembre 2016. (Crédit : Sebi Berens/Flash90)
Deux fidèles musulmanes près du complexe de la mosquée Al-Aqsa, sur le mont du Temple, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 7 novembre 2016. (Crédit : Sebi Berens/Flash90)

Le sujet a émergé la semaine dernière, quand le président de la commission, Thomas Reese, a publié son rapport annuel.

Pendant une conférence téléphonique organisée mercredi, Reese a souligné l’esprit bipartisan qui avait mené la commission de neuf membres à citer les « pays posant une préoccupation particulière », où les libertés religieuses sont violemment supprimées, comme en Chine, en Iran, en Birmanie et en Arabie saoudite, entre autres.

Mais pendant une conférence de presse organisée peu après, Zogby a souligné qu’Israël avait été ignoré.

Zogby, nommé par Obama et qui termine son mandat de quatre ans en mai, a publié une contestation de cinq pages portant sur plusieurs sujets, le premier d’entre eux étant l’échec de la commission à s’attaquer aux sujets israéliens.

Il a cité une lettre adressée en novembre à la commission par plusieurs associations et dirigeants chrétiens, certains basés à Jérusalem et en Cisjordanie. Ils accusaient Israël d’avoir des « lois discriminatoires profondément troublantes qui impactent la liberté de se marier, de réunir les familles, discriminent l’accès à la propriété de terrains et de logements, la liberté de mouvement, et le droit de culte sur les lieux saints. »

Zogby a également indiqué une lettre envoyée en janvier par Hiddush, une association israélo-américaine de défense de la liberté de culte, qui demande à la commission d’examiner les limites à la liberté de mariage en Israël, où le grand rabbinat orthodoxe garde un contrôle étroit sur toutes les affaires liées au mariage et au divorce.

Un mariage juif éthiopien dans la Vieille Ville de Jérusalem. Illustration. (Crédit : Nati Shohat/Flash90)
Un mariage juif éthiopien dans la Vieille Ville de Jérusalem. Illustration. (Crédit : Nati Shohat/Flash90)

« J’inclus ce sujet dans ma contestation, non seulement parce que la considération des deux lettres a été rejetée par une étroite majorité des commissaires, mais aussi parce qu’il était clair que, de la façon dont le débat a été organisé, il ne pouvait pas y avoir de discussion rationnelle sur ce sujet », a écrit Zogby.

D’autres membres de la commission ont réagi avec une telle « véhémence » à la critique d’Israël, a écrit Zogby, que ses appels ont été balayés.

« Nous étions, en effet, réduits au silence », a-t-il écrit.

Pendant sa conférence téléphonique, Reese a suggéré que la commission, qui compte cinq démocrates et quatre républicains, ne pouvait traiter correctement uniquement les sujets qui ne font pas l’objet de différences partisanes profondes.

« Le sujet d’Israël et de la Palestine est un sujet controversé dans le monde entier, ainsi qu’aux Etats-Unis, il n’est donc pas surprenant qu’il y ait quelques controverses et désaccords au sein de notre commission sur ces sujets », a répondu le président de la commission à JTA.

Reese a déclaré que les lettres sur Israël ont été « discutées par la commission et une majorité des commissaires n’a pas voté pour aller plus loin, je pense donc qu’il est important d’indiquer que notre rapport présente un consensus bipartisan sur les pays que nous avons étudiés. »

Le cardinal Rainer Woelki, au centre, dirige la messe de l'église de la Multiplication des Pains à Tabgha, pour sa réouverture après huit mois de rénovation, le 12 février 2017. (Crédit : Jack Guez/AFP)
Le cardinal Rainer Woelki, au centre, dirige la messe de l’église de la Multiplication des Pains à Tabgha, pour sa réouverture après huit mois de rénovation, le 12 février 2017. (Crédit : Jack Guez/AFP)

Il n’a pas précisé pourquoi le sujet d’Israël défie le « consensus bipartisan », mais les démocrates ont eu tendance ces dernières années à être plus critiques envers Israël. Les républicains voient plutôt le pays comme un rempart des valeurs occidentales au Moyen Orient.

Le mandat de la commission s’étend au-delà des pires offenseurs au monde, et comprend des critiques des parties du monde où la suppression des libertés religieuses n’a pas atteint le niveau le plus préoccupant. Un chapitre de dernier rapport de la commission porte sur les restrictions de l’abattage rituel casher et halal en Europe occidentale, par exemple.

Dans sa lettre à la commission, Hiddush avait écrit qu’il ne demandait pas le statut de pays préoccupant pour Israël, mais uniquement que la commission étudie le sujet israélien pour pousser le pays à changer.

« Nous n’affrontons heureusement pas des problèmes d’arrestations, de meurtres ou de déportations », avait écrit l’association. Elle demandait l’aide de la commission pour « attirer l’attention et renforcer les organisations de la société civile, comme Hiddush, qui travaillent pour renforcer la liberté de culte sur le terrain en Israël. »

Le Congrès américain a créé la commission sur la liberté de culte dans le monde en 1998, pour obliger la branche exécutive du gouvernement à l’honnêteté. Si le département d’Etat voulait minimiser l’oppression religieuse d’un allié potentiel, la commission serait là pour affirmer la réalité des faits.

Ce n’est cependant pas la première fois que la commission est accusée d’être politisée. Quand les républicains y étaient majoritaires, la commission a été accusée de se concentrer à l’excès sur la persécution des chrétiens à l’étranger, et de passer sous silence la souffrance des musulmans.

Zogby a déclaré que ne pas obliger Israël aux mêmes normes que les autres pays où les occupants sont vus comme oppressant les libertés de culte, comme la Turquie à Chypre ou la Russie en Crimée, nuisait à la mission de la commission.

« L’accusation selon laquelle [la commission] a un double standard nuit particulièrement à notre capacité à défendre efficacement la liberté de culte dans les pays arabes », a-t-il écrit dans sa contestation.

Zogby n’a pas cité les membres de la commission à qui il s’est opposé. JTA a adressé une question à un commissaire républicain, Clifford May, le président de la Fondation pour la défense des démocraties qui a déjà affronté Zogby dans d’autres forums, mais n’a pas reçu de réponse.

Un ancien membre de la commission, Elliott Abrams, ancien des administrations Reagan et George W. Bush, qui a été membre en même temps que Zogby, a déclaré cette semaine à Al Monitor, site d’information du Moyen Orient, que la seule mission de Zogby était de critiquer Israël.

« Jim Zogby a un seul objectif dans toutes ses critiques de la commission et toutes ses activités à la commission, c’est d’attaquer Israël », a-t-il déclaré.

Zogby a levé les yeux au ciel quand l’accusation a été présentée pendant sa conférence de presse. Il a déclaré qu’Abrams semblait avoir oublié les nombreuses occasions où ils avaient travaillé ensemble sur la restriction de la liberté de culte dans d’autres pays.

« Nous avons travaillé sur plusieurs sujets », a-t-il dit.

Israël et les associations pro-israéliennes considèrent les quelques associations chrétiennes a avoir signé la lettre de plainte et qui sont implacablement hostiles à Israël, comme Sabeel, une association de théologie de la libération palestinienne, qui voit un état binational unique comme l’objectif « idéal et le meilleur », mais qui accepte la solution à deux états. Plusieurs autres signataires sont des associations locales, comme des clubs et des associations caritatives.

Les mouvements réformé et conservateur du judaïsme américain ont refusé de soutenir la contestation de Zogby, même s’ils ont été au premier plan de la défense américaine de la liberté religieuse pour les Juifs non orthodoxes en Israël.

Un responsable du mouvement conservateur a dit à JTA que le mouvement ne cherchait pas l’intervention d’une agence gouvernementale étrangère dans ce domaine, puisque les sujets de pluralisme religieux sont des questions internes à la communauté juive mondiale et à l’Etat juif. Les représentants du mouvement réformé ont refusé de s’exprimer à ce sujet.

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