Lorsque la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas a commencé le 7 octobre, Daniel Zagury, 18 ans, était un nouvel étudiant de premier cycle à l’IE Business School de Madrid, en Espagne. Il commençait ce qui devait être un cursus de quatre ans pour l’obtention d’une licence.
Mais pour Zagury, qui a grandi principalement à Londres au sein d’une famille israélienne, il est devenu évident que les tensions entourant la guerre seraient trop difficiles à gérer en Espagne. Cette semaine, il a commencé un nouveau programme d’études en Israël.
Il fait partie des nombreux élèves de l’École internationale Raphael Recanati (RRIS ou Recanati) qui ont pris des décisions similaires après les atrocités barbares commises par le Hamas le 7 octobre. Le Times of Israel s’est rendu sur le campus verdoyant d’Herzliya le 19 novembre, jour de la rentrée, et a rencontré Zagury et d’autres étudiants dans une cafétéria animée juste avant leur premier cours.
« À Madrid, lorsque la guerre a commencé, les tensions sont immédiatement montées en flèche. J’étais très mal à l’aise », raconte Zagury. « Les gens manifestaient, venaient en groupe, beaucoup de Juifs ont reçu des menaces de mort, et il y avait du harcèlement. Après le premier jour, avant même qu’Israël ne réagisse, il y avait déjà des gens dehors avec des keffiehs et des drapeaux. »
« J’étais entouré de gens qui me détestaient à Madrid, alors pourquoi devrais-je rester là-bas ? », a-t-il ajouté.
Faisant ses valises, Zagury est venu rendre visite à sa famille en Israël et a décidé de rester. Un coup de fil et une visite rapide du campus plus tard, il était inscrit à Recanati comme étudiant en communication.
« Je trouve ça un peu fou (…). Beaucoup d’entre nous se sentent plus en sécurité en Israël au milieu de la guerre qu’en Europe ou en Amérique »
« Je trouve ça un peu fou (…). Beaucoup d’entre nous se sentent plus en sécurité en Israël au milieu de la guerre qu’en Europe ou en Amérique », dit-il.
La guerre entre Israël et le Hamas a commencé par un assaut terroriste sauvage depuis Gaza le 7 octobre, qui a coûté la vie à 1 200 Israéliens, pour la plupart des civils. Plus de 240 citoyens israéliens, dont des enfants, des nourrissons et des personnes âgées, ont été pris en otage par les terroristes palestiniens du Hamas. L’appel subséquent des forces de réserve de Tsahal, le plus important de l’histoire du pays avec quelque 360 000 personnes mobilisées, et son opération aérienne et terrestre en cours pour chasser le Hamas du pouvoir à Gaza et sauver les otages ont fait des ravages sur le système d’enseignement supérieur israélien.
Étant donné qu’un nombre important d’étudiants universitaires sont en service de réserve (selon une estimation, environ 30 % de tous les étudiants inscrits dans l’ensemble du pays), sans parler des milliers de membres du personnel universitaire qui servent également, les principales universités ont repoussé le début de l’année universitaire du 15 octobre au 24 décembre, sous réserve de la libération des réservistes de Tsahal.
Recanati – qui fait partie de l’Université Reichman (anciennement IDC Herzliya), la seule université privée d’Israël – propose des programmes de licence et de maîtrise en anglais axés sur la technologie et les affaires. Lorsque les administrateurs de Recanati ont réalisé qu’en dépit de la guerre qui faisait rage, une partie importante de leurs étudiants souhaitaient rester et poursuivre leurs études, il a été décidé d’ouvrir officiellement le programme de licence le 19 novembre dans un format hybride salle de classe/à distance. Les programmes de masters – MA et de MBA – doivent commencer en décembre.
C’est ce retard qui a permis à Zagury d’effectuer son transfert ; bien qu’il ait déjà commencé son semestre à Madrid, il a pu partir et être transféré à Recanati à temps pour commencer le semestre en Israël en même temps que tous les autres. Certains des autres programmes en anglais, comme l’École internationale Rothberg de l’Université hébraïque, ont commencé peu de temps après la date initialement prévue du 15 octobre.
Cette date a également permis à Eitan Saffra, 20 ans, de commencer un programme de licence en communication à Recanati. Saffra, originaire de New York, étudiait dans une yeshiva à Beit Shemesh lorsque la guerre a éclaté. Il avait prévu de rentrer aux États-Unis en décembre et de s’inscrire éventuellement à la Yeshiva University, mais il a été influencé par le fait « d’être ici en temps de guerre ».
« Et de voir que le reste du monde se bat les uns contre les autres, mais qu’ici, nous nous rassemblons (…). C’est chez nous, c’est ici que se trouve la famille. »
Saffra, un podcasteur en herbe, a déclaré que le fait de voir « comment la communauté [israélienne] s’est réunie et s’est entraidée était très édifiant ». « Et quand je suis venu visiter [le campus de Recanati], j’ai ressenti la même proximité et la même unité. J’ai enfin l’impression de pouvoir être passionné par l’école. »
Recanati compte habituellement environ 2 400 élèves inscrits, qui viennent pour la plupart d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Afrique du Sud. Au début de la guerre, un nombre important d’entre eux étaient encore à l’étranger ou avaient quitté le pays, mais l’administration affirme que beaucoup de ces étudiants reviennent maintenant ou rejoindront le semestre en distanciel.
Reichman dans son ensemble compte environ 8 000 étudiants. Environ la moitié d’entre eux sont actuellement en service de réserve, selon l’administration. Toutes les universités ont annoncé diverses aides pour leurs étudiants en service, et Reichman ne fait pas exception.
« Nous allons leur offrir un package très généreux, notamment des crédits académiques [pour leur service dans Tsahal] », a déclaré Jonathan Davis, qui occupe le poste de directeur de Recanati depuis le début du programme, en 2001. « Nous savons que lorsqu’ils reviendront, nous les soutiendrons, ils voyageront en classe affaires. Nous prendrons particulièrement soin d’eux. »
Davis est personnellement et profondément touché par les problèmes des étudiants étrangers et des anciens combattants de l’armée israélienne. Rencontrant ce journaliste dans son bureau du campus tapissé de souvenirs du mouvement sioniste, il raconte qu’il a lui-même passé sa licence en tant qu’oleh hadash – nouvel immigrant – de Californie en 1973 lorsque la Guerre de Kippour a éclaté, et au cours de laquelle il a combattu en tant que jeune recrue de Tsahal.
Bien que lors de cette guerre, les combats aient duré moins de trois semaines, Davis a par la suite poursuivi son service de réserve dans le Sinaï plusieurs mois durant.
Lorsque « ce professeur en particulier » est revenu à la vie civile, « la vérité académique » de cette personne n’était pas d’inclure le « service à la nation » dans sa façon de penser.
« J’avais un devoir à rendre pour terminer ma licence, et il n’a pas voulu me donner de délai supplémentaire », raconte Davis.
« La façon dont il m’a dit cela – ‘ne me prêche pas le sionisme’ – m’a marqué, m’a bouleversé, non seulement sur le plan académique, mais aussi en tant qu’oleh hadash et soldat seul », se souvient Davis, notant qu’il a finalement résolu le problème et obtenu son diplôme.
Davis qualifie cette expérience de « TSPT [trouble de stress post-traumatique] académique » et affirme que l’administration de l’Université Reichman fera tout ce qui est en son pouvoir pour aider les étudiants-soldats de retour à s’intégrer dans la vie universitaire et pour aider les futurs étudiants internationaux à s’inscrire facilement et à commencer leurs études.
Gitty Gadol, 20 ans, de Toronto, est une autre nouvelle étudiante qui a vu sa vie changer à cause du conflit et qui a bénéficié de la rentrée du 19 novembre et des admissions accélérées.
« Juste après que la guerre a frappé, j’étais à New York, et rien qu’en regardant autour de moi, c’était très isolant (…). Vous voyez ces gens et ils ne vous comprennent tout simplement pas. Je portais une étoile de David autour du cou et c’était assez effrayant », dit-elle.
Gadol dit qu’elle avait déjà l’intention de partir en Israël, mais la guerre l’a « clairement poussée beaucoup plus loin ». Elle a décidé d’immigrer sans plus attendre et a fini par s’inscrire à Recanati.
« Je portais une étoile de David autour du cou et c’était assez effrayant »
La plupart des étudiants venus de l’étranger sont Juifs, mais il y a une présence importante de divers pays asiatiques – suffisamment pour que Davis, en tant que directeur, ait par le passé planifié des célébrations étudiantes pour le Nouvel An chinois.
Junil Lee, 23 ans, est originaire de Corée du Sud et est en dernière année d’études d’informatique. Se sentant en sécurité dans les dortoirs du campus, il n’est pas rentré chez lui, dit-il, même si le gouvernement sud-coréen a envoyé un avion militaire mi-octobre pour évacuer ses quelque 163 ressortissants.
Beaucoup d’étudiants asiatiques sont rentrés chez eux et pourront poursuivre leurs études à distance. Mais, a déclaré Lee, « j’ai déjà traversé les périodes de corona, c’était très difficile, et je ne voulais pas me retrouver à nouveau dans cette situation ».
« Je suis très heureuse de ma décision, j’adore les gens ici, c’est une expérience unique. »
En quittant le café de l’université, ce journaliste a rencontré deux étudiantes de Paris, Noa Rozenfeld et Esther Watsman, toutes deux âgées de 18 ans, qui récupéraient leurs sacs pour se rendre à leur premier cours. Toutes deux affirment n’avoir même pas songé à retourner en France, malgré la guerre. »C’est mieux ici, c’est trop antisémite à Paris », a déclaré Watsman.
« La France est mon pays. Mais mon peuple est ici. »