KISSUFIM – Haggaï Grosvirt et son épouse Katrin ont réintégré leur maison du kibboutz Kissufim à la fin du mois de juin, après avoir été déplacés depuis le 7 octobre.
Le couple a échappé de justesse à la mort lorsque des dizaines de terroristes palestiniens du Hamas se sont déchaînés sur le kibboutz lors de l’assaut barbare du groupe terroriste palestinien du Hamas sur le sud d’Israël le 7 octobre, laissant dans leur sillage une traînée de mort et de destruction. Tout comme le reste des habitants du kibboutz, ils ont été évacués vers l’hôtel Noga, près de la mer Morte.
La maison des Grosvirt est située à l’extrémité ouest du kibboutz encore dévasté, à moins de deux kilomètres de la frontière avec la bande de Gaza. Une rangée d’arbres au loin empêche de voir l’enclave palestinienne, une mesure de défense contre les missiles antichars.
Parmi les 1 200 personnes assassinées dans le sud d’Israël par des milliers de terroristes déchaînés le 7 octobre, il y avait douze résidents de Kissufim et six travailleurs étrangers. Shlomo Mansour, 86 ans, membre du kibboutz, faisait partie des 251 otages enlevés dans la bande de Gaza, et onze soldats israéliens ont été tués au combat en défendant le kibboutz.
Haggaï et son épouse se sont cachés dans leur mamad – abri anti-atomique – alors que les terroristes armés du Hamas tentaient en vain de pénétrer dans leur maison. Lorsque l’armée israélienne est finalement arrivée, les Grosvirt se sont échappés ; par la suite, un terroriste a réussi à s’introduire dans la maison et à s’y cacher pendant cinq jours. Lorsque les soldats sont venus sécuriser la zone, il a ouvert le feu, blessant trois soldats avant d’être abattu. Les taches de sang du terroriste étaient encore visibles sur les murs et les rideaux du salon des Grosvirt il y a quelques semaines.
À la suite de ce pogrom, Israël a promis de rendre la zone de « l’enveloppe de Gaza » – la région connue en hébreu sous le nom d’Otef Azza – « plus forte que jamais ». Mais neuf mois plus tard, alors que la plupart des habitants de la région sont rentrés chez eux, la majeure partie du kibboutz reste déserte. Les habitants sont découragés par l’ampleur des dégâts et le risque d’attaques en provenance de Gaza, malgré les assurances du gouvernement selon lesquelles la zone est sûre.

Haggaï, 65 ans, est revenu pour aider à la reconstruction. Faisant fi du danger que représente la guerre qui fait rage à côté de chez lui, il parle de son retour avec un certain stoïcisme.
« Maintenant, je n’ai plus besoin de faire la navette tous les jours depuis Omer », a expliqué Haggaï, en faisant référence à la ville proche de Beer Sheva où lui et sa femme se sont temporairement installés après avoir quitté l’hôtel.
Au total, 34 bâtiments sont en ruine, des impacts de balles sont visibles sur les murs extérieurs du kibboutz et l’étable à vaches laitières est toujours en ruine. Mais le kibboutz est propre et bien rangé, avec des pelouses vertes et un jardinage dynamique.
« Les arbres sont tombés, les fleurs se sont fanées et sont mortes, l’herbe était haute et sèche après l’hiver… [mais] les choses ont complètement changé maintenant », a déclaré Noga Grosvirt, la nièce de Haggaï, qui aide à restaurer le kibboutz.
Noga, 22 ans, est arrivée à Kissufim en janvier pour travailler dans les champs d’avocats après avoir achevé son service militaire. « Nous avons essayé de rattraper les trois mois de travail perdus », a-t-elle souligné.
En mars, des travailleurs thaïlandais ont été embauchés et le contrat agricole de Noga a été résilié. « Nous n’avions pas prévu de partir », a-t-elle dit. « Quatre d’entre nous ont donc trouvé un nouveau travail dans le kibboutz. »
Selon Haggaï, les champs environnants, principale source de revenus du kibboutz, ont presque retrouvé leur pleine capacité. Lui et deux autres vétérans du kibboutz gèrent les plans de réhabilitation, et Noga est l’administratrice de leur bureau. Bien que les habitants ne soient pas encore revenus, le kibboutz commence à se remettre sur pied avec l’aide de jeunes hommes et femmes.
Des volontaires de l’unité de réserve le Bataillon Yaël gardent le kibboutz tout en faisant des courses pendant leur temps libre, sans être rémunérés.

« Ils travaillent dans les champs d’avocats, dans le poulailler, partout où l’on a besoin d’eux », a expliqué Haggaï.
D’autres volontaires sont arrivés de l’étranger dans le cadre du programme international Garin Tzabar destiné aux non-résidents.
« Ces [volontaires] sont plus permanents », a souligné Noga. « Ils apprennent le travail et s’installent dans une routine au point de savoir ce qu’ils doivent faire de manière autonome. Nous avons commencé avec quinze personnes, voire moins, et maintenant il y en a beaucoup plus. Cet esprit de jeunesse est spécial. »
« Si je ne pensais pas que les gens voudraient s’installer ici, je ne les recruterais pas. Nous sommes à la recherche d’une énergie nouvelle », a-t-elle ajouté. « Les gens commencent à imaginer de nouveaux projets de construction ; mon oncle dit qu’il veut reconstruire la vieille écurie qui est hors service depuis des années. »
Le retour des premiers habitants est toutefois loin d’être acquis. Selon Haggaï, les familles avec enfants auront du mal à revenir l’année prochaine si le système scolaire de la région n’est pas rétabli. Il a fait remarquer que tant que la guerre fera rage, que les alertes à la roquette continueront à retentir et que les efforts de réhabilitation se poursuivront, les gens ne reviendront pas.
Pour que les travaux de construction puissent commencer, Haggaï a estimé qu’il fallait combler un déficit de 30 % dans les indemnités versées par le gouvernement, ajoutant que les habitants méritaient « une couverture complète des préjudices ».
Un plan de réhabilitation sur cinq ans
Le pogrom du 7 octobre a donné lieu à la plus grande effusion de sang juif en une seule journée depuis la Shoah. La brutalité des massacres, qui comprenaient des viols aveugles, des tortures, des démembrements et des mutilations, ainsi que le meurtre de familles entières – certaines brûlées vives dans leur maison – est sans précédent de mémoire récente.
Aussi, les combats acharnés entre les troupes de soldats israéliens et les terroristes infiltrés, qui se sont emparés de vastes pans de territoire proche de la bande de Gaza, ont causé des dégâts considérables aux bâtiments privés et publics, aux terres agricoles, aux infrastructures et à bien d’autres choses encore.
« Otef Azza est maintenant comme Yad Vashem [le musée national israélien de la Shoah] », a déclaré un jeune bénévole, faisant référence aux nombreux mémoriaux improvisés du 7 octobre érigés le long de la Route 232, qui traverse les communautés israéliennes proches de la frontière de Gaza.
Le 19 octobre, le gouvernement israélien a créé l’Autorité Tekuma, chargée de réhabiliter la périphérie de Gaza et de s’occuper des habitants qui ont été évacués des zones de guerre au nord et au sud. Les habitants de la frontière – même ceux des villes qui n’ont pas été directement touchées par l’assaut – ont emménagé dans des hôtels financés par l’État, alors que d’importantes forces de Tsahal se déployaient dans la région en prévision d’une incursion terrestre dans la bande de Gaza.
Entre-temps, 60 000 habitants du nord d’Israël ont également été évacués en raison des attaques quasi-quotidiennes du Hezbollah, que le groupe terroriste chiite libanais promet de poursuivre jusqu’à ce que les soldats israéliens se retirent de la bande de Gaza.

Aujourd’hui, environ 70 % des habitants ont regagné leurs maisons dans le sud. Les 30 % restants, soit quelque 5 700 personnes évacuées, demeurent dans des hôtels financés par l’État ou ont trouvé d’autres solutions provisoires telles que la location d’appartements ou la construction temporaire de sites pour pré-fabriqués. Le gouvernement a récemment prolongé jusqu’au 15 août les subventions accordées aux personnes évacuées qui séjournent dans des hôtels. Les évacués qui quittent les hôtels financés par l’État reçoivent une allocation mensuelle du gouvernement pour couvrir leurs frais de subsistance, y compris le loyer.
Les médias israéliens ont rapporté que les adultes et les enfants reçoivent respectivement 200 et 100 shekels par jour, ce qui représente 18 000 shekels par mois pour une famille de quatre personnes (en comparaison, le coût par famille dans un hôtel est de 45 000 shekels).
L’Autorité de Tekuma a reçu un budget de 19 milliards de shekels pour atteindre ses objectifs (1,5 milliard de shekels pour la construction et les rénovations) et a lancé un plan quinquennal de reconstruction de la région frontalière de Gaza.
« Nous espérons qu’ils n’auront plus besoin de nous dans cinq ans », a déclaré une source autorisée à s’exprimer au nom de l’organisme, qui a requis l’anonymat. « Nous ne pressons pas les communautés. Elles ont subi des traumatismes, elles ont encore des membres kidnappés ; notre rôle est de les accompagner à leur rythme. »

À quelques kilomètres de Kissufim, à l’extérieur du kibboutz Beeri, où cent un habitants ont été assassinés et onze kidnappés, une femme en tee-shirt rouge nettoie les tables en plastique d’un magasin de vélos qui vend également des fromages et des boissons, l’un des rares établissements de la région à être ouvert.
Elle a déclaré que « de manière réaliste, il nous faudra au moins trois ans avant de repartir ». Actuellement, elle loge dans une résidence temporaire au kibboutz Dorot, à 20 minutes de route vers l’est.
À Kfar Aza, un autre kibboutz qui a subi de lourdes pertes, la chaude sérénité du mois de juin et le doux gazouillis des oiseaux n’ont pas atténué la scène de destruction. Des dizaines de maisons en ruine noircies par la suie étaient visibles dans tout le kibboutz. Le travail du gouvernement pour identifier l’ADN des personnes décédées se poursuit, tous ces mois après l’assaut du Hamas.
Quarante-sept villes situées le long de la frontière de Gaza ont rejoint le plan de réhabilitation de l’Autorité de Tekuma. Les villes les plus proches de la frontière ont subi les pires dégâts le 7 octobre et nécessitent la plupart des efforts de réhabilitation. À l’exception de Beeri, ces villes, dont la plupart sont des kibboutzim, sont désignées comme des zones militaires fermées, ce qui ralentit leur rétablissement – bien que les personnes participant aux efforts de réhabilitation soient autorisées à y vivre. Des quartiers nouvellement construits, en tant que solution provisoire, devraient accueillir la plupart des personnes évacuées de ces villes jusqu’à ce qu’elles puissent retourner chez elles.
La source de l’Autorité de Tekuma a déclaré que, bien que les autorités chargées de l’impôt foncier et les fonds d’indemnisation du gouvernement puissent normalement subventionner jusqu’à 70 % des dévastations subies par les bâtiments en temps de guerre, l’autorité dédommagera les localités dans leur intégralité, dépassant même les dépenses liées aux dégâts.
« Cette semaine, nous avons posé la première pierre du nouveau quartier de Shikmim [où cinquante-deux maisons seront construites] dans le kibboutz Beeri. Ces communautés doivent prendre des décisions sur la manière d’aller de l’avant : quels bâtiments démolir, lesquels préserver en tant que sites commémoratifs ; ces considérations prennent du temps », a déclaré la source.
Suivre les sionistes fondateurs
Tout le monde n’attend pas les solutions du gouvernement. Les déracinés ont lancé leurs propres initiatives de réhabilitation et, avec l’aide de volontaires israéliens et étrangers, un sentiment de prudent renouveau commence à prendre forme dans la région.

Le kibboutz Urim est situé à moins de dix km de la frontière de la bande de Gaza et ses habitants ont été évacués vers des hôtels financés par l’État. Bien qu’il ait été épargné par l’assaut du Hamas le 7 octobre, l’endroit avait besoin d’être rénové après que les troupes de Tsahal y ont séjourné pendant près de six mois, en l’absence des habitants.
Les habitants se sont tournés vers Lev Ehad (« Un Cœur »), une organisation à but non lucratif d’aide humanitaire. Fondée en 2005, l’organisation est connue pour son travail bénévole de secours d’urgence et a apporté son aide lors de la pandémie de coronavirus, des tremblements de terre dans les pays voisins et de la guerre en Ukraine.
« Après le séjour prolongé de Tsahal à Urim, le kibboutz était très différent », a expliqué Shiraz Pascal, responsable de Lev Ehad pour la région sud d’Israël, dont Otef Azza. « Ses adolescents avaient besoin d’un lieu de rassemblement, et ils n’en avaient pas. Nos bénévoles sont intervenus, nous avons collecté des dons, dont un très généreux de Palo Alto Networks, et nous avons rénové l’intérieur et l’extérieur du centre d’activités extra-scolaires d’Urim. »
« Nous ne nous contentons pas de répondre aux besoins actuels, mais nous pensons à l’avenir – comment permettre aux résidents de retourner dans les kibboutzim dans de bonnes conditions. Nous aidons à la rénovation, au jardinage, au nettoyage, à la collecte de fonds, au déménagement, etc. »

Hezi Gilboa, un combattant réserviste qui travaille à Lev Ehad, a expliqué que l’association organise également des délégations de Juifs venus de l’étranger pour se porter volontaires, faire des dons et aider de toutes les manières possibles.
« Nous mettons délibérément l’accent sur le travail avec les jeunes. Nous savons que nous ne pouvons pas nous contenter de blâmer l’ancienne génération pour la crise actuelle. Nous devons prendre nos responsabilités et corriger ce qui ne va pas. C’est ce qu’ont fait les sionistes fondateurs », a déclaré Gilboa.
Shir Diner, vice-présidente de Lev Ehad, est optimiste quant à l’avenir : « L’État ne s’occupera pas de tout, mais les citoyens de ce pays, qui sont bons et uniques, s’en chargeront », a-t-elle déclaré.
Le prochain objectif majeur de l’organisation est le lancement de trois camps d’été à travers le pays pour les adolescents évacués, et l’organisation est actuellement en train de collecter des fonds pour mener à bien ce projet.
Désormais armé
Bien qu’il soit un ancien parachutiste, Haggaï était peu enclin à porter une arme à feu avant l’assaut du Hamas. « J’étais sceptique quant à la possibilité que quelque chose [comme le 7 octobre] puisse se produire », a-t-il expliqué. Aujourd’hui, Haggaï fait partie de l’équipe d’urgence civile du kibboutz Kissufim et porte un fusil M-16 partout où il va.
Son épouse est revenue avec lui à Beeri et travaille à l’imprimerie du kibboutz. Leur fille, qui a toujours fait partie du kibboutz, est également revenue. Elle est aujourd’hui responsable des événements culturels de Kissufim.
« La communauté de Kissufim est forte. L’un de nos avantages est que notre communauté ne s’est pas dispersée. Dans les faits, nous pouvions nous asseoir dans le hall de l’hôtel Noga et discuter plus souvent que dans le kibboutz. Nous avons même apporté avec nous le pub du kibboutz », a déclaré Haggaï.

Noga a fait l’éloge du « célèbre » pub de Kissufim, rappelant que les habitants de toute la région venaient y boire un verre. Bien que l’ancien équipement du pub leur fasse défaut, les jeunes bénévoles de Kissufim ont commencé à en apporter de nouveaux et l’ont rouvert la semaine dernière.
« Nous ne savions même pas qui viendrait, mais des membres du kibboutz sont arrivés et tout le monde était très ému », a raconté Noga. « La musique, le sentiment de normalité […] C’était une expérience formidable. »
« Je ne serais pas ici si je ne pensais pas que nous pouvions reconstruire », a affirmé Haggaï.
« J’ai d’autres possibilités. Je pourrais partir dans le pays d’origine de ma femme. Mais je suis de Kissufim. Ne pas revenir signifierait que nous avons perdu la guerre. »