GONDAR, Éthiopie — Les parents de Kefale Tayachew étaient partis pour Israël il y a 23 ans. Depuis, il n’avait pas cessé d’espérer qu’il pourrait les rejoindre, priant pour les retrouver enfin. Il avait quitté définitivement son village d’origine en Éthiopie et il menait dorénavant une existence difficile à Gondar, vivant avec sa famille nombreuse dans un appartement exigu d’une seule pièce, dans l’attente d’être enfin autorisé à s’envoler pour Israël.
L’année dernière, le père de Tayachew est mort au sein de l’État juif – père et fils n’avaient eu l’occasion de se revoir qu’à une seule occasion en l’espace de 23 ans, lors d’une bref retour en Éthiopie du patriarche, il y a environ sept ans. Au début du mois, après des décennies d’attente, Tayachew, âgé aujourd’hui de 56 ans, son épouse et leurs six enfants – l’aîné a 23 ans, le plus jeune seulement six mois – sont arrivés à bord du tout premier avion d’alyah en provenance d’Éthiopie depuis plus d’un an. L’alyah se réfère à l’immigration juive en Israël.
« Pendant 23 ans, je suis resté là à patienter et à attendre parce que je crois en Dieu et que Dieu ne trahit pas les siens », avait-il confié à un petit groupe de journalistes alors qu’il se trouvait dans son petit studio de Gondar, quelques jours avant son départ. « Je fais partie du peuple juif. »
Tayachew avait ajouté qu’il ne savait pas où il vivrait et quel travail il pourrait trouver en Israël, mais que cela n’avait guère d’importance finalement : « Tout ce que je veux, c’est enfin arriver en Israël et embrasser ma mère », avait-il expliqué par le biais d’un traducteur.
Trois jours avant le vol, il avait déclaré ne pas encore avoir dit à sa mère, qui habite à Netanya, que son immigration avait été approuvée.
« Je ne lui ai rien dit. Je veux qu’elle puisse constater que j’ai vraiment fait mon alyah« , avait-il indiqué, évoquant des décennies de promesses toujours remises au lendemain et de faux espoirs. Tayachew avait précisé qu’il prévoyait de l’appeler au téléphone quand la famille serait arrivée à Addis Ababa, la veille du grand voyage.
Toutefois, à bord de l’avion qui l’amenait en Israël, il avait reconnu qu’il n’avait pas informé sa mère qu’il était enfin parti – préférant finalement attendre d’être descendu de l’avion et de voir concrètement son rêve de 23 ans pleinement réalisé.
« Je savais que si j’attendais, ça arriverait », avait-il affirmé avant le vol. « Jamais je ne perdrai espoir dans ma vie, parce que le Dieu d’Israël ne permet pas le renoncement à l’espérance ».
Force est de reconnaître que malgré sa foi profonde, la réticence affichée par Tayachew à prévenir sa mère de son arrivée est très compréhensible. La communauté juive de Gondar a vécu des décennies de promesses non-tenues, de faux départs et de rêves sans cesse reportés au lendemain. La vaste majorité des membres de la communauté ont vécu dans le flou pendant des années, espérant et rêvant de partir en Terre sainte.
« Ces gens pensaient vraiment que leurs fils, leurs mères, leurs sœurs feraient leur alyah immédiatement après eux parce que c’est ce que leur avait dit le ministère israélien de l’Intérieur », explique Yerus Yatmin Maharat, avocat et porte-parole du groupe activiste du Combat pour l’alyah des Juifs éthiopiens. « Il leur avait été dit que tous feraient leur alyah très rapidement ».
Mais de nombreuses familles ont finalement attendu des années, sinon des décennies, pour se retrouver. Et même si des milliers d’immigrants éthiopiens doivent arriver cette année, c’est un nombre beaucoup plus important de personnes qui vont encore une fois rester derrière, sans aucune certitude de pouvoir un jour revoir leurs proches en Israël.
Tayachew et sa famille ont réalisé leur rêve à bord d’un vol qui transportait 181 nouveaux immigrants d’Éthiopie, le 1er juin. Vingt-quatre heures plus tard, ce sont 160 autres immigrés éthiopiens qui sont arrivés à Tel Aviv pour commencer une nouvelle vie au sein de l’État juif, et un autre vol est prévu en date du 21 juin.
Au total, l’immigration en Israël de 3 000 Éthiopiens a été approuvée par décision gouvernementale au mois de novembre – une décision qui a également permis d’allouer un budget de 570 millions de shekels à leur intégration. Contrairement aux personnes autorisés à immigrer conformément à la Loi du retour – qui accorde la citoyenneté à tout individu pouvant se prévaloir d’au-moins un grand-parent juif – les nouveaux arrivants d’Addis Abeba, dont le transport a été organisé par l’Agence juive, ont pu pénétrer sur le territoire en vertu de la Loi d’Entrée.
Chaque dossier d’immigration doit être individuellement approuvé par le ministère de l’Intérieur en fonction du respect d’un certain nombre de critères. La majorité des candidats à l’immigration ont des parents ou des enfants qui vivent déjà au sein de l’État juif et certains ont une fratrie ici (et pour la première fois, ceux dont les parents qui s’étaient installés en Israël sont depuis décédés ont été éligibles à l’alyah.) Tous les nouveaux immigrants se sont engagés à suivre un processus de conversion au judaïsme de dix mois ; s’ils ne le mènent pas à bien, ils ne pourront pas bénéficier de la citoyenneté pleine et entière mais ils pourront rester dans le pays en tant que résidents permanents.
Une préparation qui a duré des décennies
Dans les années 1980 et 1990, environ 50 000 Juifs éthiopiens, appartenant à une communauté connue sous le nom de communauté Beta Israël, étaient arrivés au sein de l’État juif par des ponts aériens massifs. Depuis la conclusion de ce qui avait été appelé l’Opération Salomon en 1991, des décisions gouvernementales sporadiques avaient été prises au fil des ans pour faire venir des groupes de laissés-pour-compte, qui appartenaient souvent à la communauté des Falash Mura – un terme qui désigne ceux qui avaient été convertis au christianisme par la force ou qui étaient devenus chrétiens par crainte de persécutions – une communauté qui n’est pas considérée comme éligible à l’alyah en vertu de la Loi du retour.
Au fil des années, le gouvernement a insisté sur le fait qu’il fallait mettre un terme à l’immigration en provenance d’Éthiopie – faisant volte-face, là aussi, de manière répétée en continuant à faire venir ceux qui attendaient encore de pouvoir enfin rejoindre leurs parents et leurs proches.
Mais combien y a-t-il encore aujourd’hui de laissés-pour-compte qui répondent néanmoins aux critères définis par le gouvernement ? Le chiffre fait l’objet de débats animés.
En 2015, le gouvernement avait approuvé l’alyah de 9 000 Éthiopiens qui auraient été les derniers Falash Mura connus. Mais au cours de ces cinq dernières années, seulement 2 500 sont arrivés sur le territoire israélien lors de voyages épisodiques et souvent reportés à maintes reprises.
En 2020, la ministre chargée de l’immigration, Pnina Tamano-Shata, avait déclaré que 8 000 Éthiopiens attendaient de pouvoir immigrer. Depuis, 2 000 se sont installés en Israël dans le cadre de la première moitié de l’Opération Tzur Yisrael (Rocher d’Israël).
Mais aujourd’hui, l’Agence juive estime qu’environ 10 000 personnes, en Éthiopie, « attendent » de pouvoir faire leur alyah – approximativement 7 000 à Gondar et 3 000 à Addis Ababa. Alors, comment savoir ?
« Le problème, ce n’est pas une histoire de mathématiques – le problème, c’est ce que les chiffres, et en particulier à Gondar, ne sont pas définitifs », explique Shay Felber, directeur de l’unité de l’Alyah et de l’Intégration de l’Agence juive, au cours d’une conversation qui a eu lieu avant le départ du premier avion d’immigrants à Gondar.
« Nous avons connaissance des personnes qui se sont inscrites et qui font partie de la communauté. Mais il peut en rester d’autres dans les secteurs environnants », poursuit-il.
Depuis 2014, dit Felber, l’État juif ne prend en compte que les dossiers des candidats qui ont déjà de la famille au sein de l’État juif et qui ont fait appel au ministère de l’Intérieur. Selon l’Agence juive, seul le ministère de l’Intérieur connaît le nombre exact de candidats à l’Alyah. De son côté, le ministère explique que les chiffres sont entre les mains de l’Autorité chargée de la population, de l’immigration et des frontières (PIBA). Contacté, un porte-parole de cette dernière indique ne pas avoir la liste complète de tous les candidats, se refusant à faire tout autre commentaire.
Yatmin Maharat, née au sein de l’État juif de parents éthiopiens qui ont immigré dans le pays, dit qu’il lui semble logique que les chiffres évoluent de cette manière en permanence alors que les candidats à l’alyah attendent souvent des années avant de partir et que de nombreux enfants naissent dans l’intervalle.
« Si l’État d’Israël avait respecté sa décision prise en 2015, nous ne nous trouverions pas aujourd’hui dans cette situation », estime-t-elle. « Le résultat direct de la politique menée par l’État d’Israël, ça a été de briser des familles… Je ne crois pas que le problème puisse être résolu de sitôt si on ne fait pas les choses d’un seul coup maintenant. »
Faux espoirs
Au premier jour du mois hébreu de Sivan – c’était le 31 mai, cette année – des centaines de fidèles se sont rassemblés dans la synagogue de Gondar pour les prières de Rosh Hodesh. Une multitude impressionnante d’hommes, de femmes et d’enfants ont pris part à ces prières de fête qui se sont conclues par une interprétation émouvante de la « Hatikvah », l’hymne national israélien.
Aucun fidèle présent ce jour-là dans le lieu de culte n’était à bord du vol à destination d’Israël qui a quitté l’Éthiopie, le jour suivant. Un grand nombre d’entre eux n’iront probablement jamais en Israël, ne répondant pas aux critères établis par le gouvernement aux fins de l’immigration.
Après l’office, le président par intérim de l’Agence juive, Yaakov Hagoel, s’est adressé à l’assistance par le biais d’un traducteur.
« J’espère que l’année prochaine, vous serez tous avec nous à Jérusalem », a dit Hagoel.
Quelques minutes après le discours prononcé par Hagoel, Micha Feldman, émissaire légendaire de l’Agence juive qui avait supervisé l’Opération Salomon en 1991, a reconnu, pour sa part, être mitigé.
« Ce qu’il a dit ici est susceptible d’entraîner de nombreuses illusions », a-t-il confié au Times of Israel devant la synagogue. « C’est très tentant de le dire », ajoute-t-il, « mais ça nourrit tout simplement de faux espoirs ».
« Ils ne sont pas tous éligibles et tous ne le seront pas non plus », continue-t-il. « Il y a des critères auxquels la majorité des aspirants au départ – je parle même de ceux qui se trouvaient à la synagogue, ce matin – ne pourront pas répondre. »
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Adane Tadela, émissaire actuel de l’Agence juive pour l’Éthiopie, se montre – c’est compréhensible – plus diplomate.
« C’est ce qu’il croit : c’est son point de vue, c’est sa conviction », dit-il, évoquant l’allocution de Hagoel. « Il a dit ce qu’il ressentait ».
Avec des élections nationales de nouveau à l’horizon, il ne fait aucun doute que la politique tiendra un rôle dans l’avenir de l’alyah en provenance d’Éthiopie. Les activistes estiment qu’il est improbable que la vague actuelle d’immigration – et celle qui avait commencé en 2020 – ait été possible sans Tamano-Shata, qui a mené une bataille difficile pour la faire approuver et pour la mettre en œuvre.
« Je ne pense pas que ça aurait pu arriver si elle n’avait pas été là », dit Yatmin Maharat. « Mais elle ne contrôle pas tout pour autant. »
Victimes politiques
Contrairement aux décisions précédentes qui avaient été prises par le gouvernement concernant l’approbation de l’alyah des Juifs éthiopiens, celle du mois de novembre a été assortie d’un financement – ce qui lui permettra probablement de se maintenir même en cas de chute du gouvernement.
« Habituellement, quand il y a des élections, il y a des inquiétudes mais la ministre s’est vraiment battue et elle a obtenu un budget pour mettre en œuvre sa décision », explique Yatmin Maharat. « Et parce qu’il y a un budget, les choses devraient continuer à suivre leur chemin, même s’il est impossible d’avoir des certitudes là-dessus ». Si le ministère de l’Intérieur refuse d’approuver des visas d’immigration pour une raison ou une autre, alors l’opération devra s’arrêter.
En tant que membre de Kakhol lavan, Tamano-Shata – première membre d’un cabinet israélien originaire d’Éthiopie – a été ministre dans le gouvernement précédent et dans le gouvernement actuel. Mais dans un contexte d’incertitude politique face à l’avenir, il est difficile de dire qui pourrait bien se trouver à son poste dans quelques mois seulement.
Tandis que les 3 000 immigrants dont les dossiers ont été approuvés, l’année dernière, en vertu de la décision gouvernementale 713, devraient pouvoir pénétrer sur le territoire israélien indépendamment des résultats d’éventuelles élections, la probabilité que les autres éléments de la décision – prise pour mettre un point final, une fois pour toute, à la problématique de l’alyah éthiopienne – se concrétisent est bien moins évidente.
« Nous avons travaillé très dur pour que le gouvernement prenne cette décision. Après les négociations avec la ministre de l’Intérieur Ayelet Shaked, ça a été parfois très dur de négocier avec les autres responsables », a dit Tamano-Shata lors d’un discours prononcé à Addis Ababa, au début du mois, la soirée qui a précédé l’atterrissage au sein de l’État juif du premier avion. « Mais je pense que c’est Dieu qui m’a mise à la place qui est la mienne. Et non seulement il a fallu que j’exprime de la colère, mais il a aussi fallu que je sois proactive ».
Elle a aussi répété sa conviction que le gouvernement devait prendre une décision définitive concernant les critères qui déterminent qui est éligible à l’alyah en Éthiopie et qui n’obtiendra jamais la citoyenneté en Israël, « pour mettre enfin un point final à cette saga et trouver une solution ».
Aux côtés du budget alloué par le cabinet, au mois de novembre, qui porte sur l’intégration de 3 000 nouveaux immigrants, la décision a aussi ordonné la mise en place d’une équipe et la nomination d’un responsable qui « formulera un plan approfondi qui règlera définitivement la question des personnes qui attendent encore à Addis Ababa et à Gondar. » Elle a également réclamé l’approbation future d’un budget qui permettra de faire venir dans le pays les Éthiopiens répondant aux critères mais qui n’étaient pas entrés dans le cadre de la limitation à 3000 personnes.
Mais plus de six mois après l’annonce de la décision, aucune équipe n’a été formée, aucun responsable n’a été désigné et la probabilité que ces deux initiatives se concrétisent sous le gouvernement actuel est proche de zéro. Toutefois, la plus grande partie des activistes estime que mettre un point final à une telle alyah des Éthiopiens est finalement l’approche la plus humaine.
« Nous devons avoir suffisamment de courage pour dire à ceux qui ne sont pas éligibles : « Vous ne ferez pas l’alyah, nous sommes désolés’, » commente Avtamo Yosef, à la tête du département de l’immigration éthiopienne au sein de l’Agence juive. Il suggère qu’il y a un message puissant transmis « avec une ministre elle-même issue de la communauté éthiopienne qui dit d’une voix ferme que nous devons mettre un point final à cette immigration ».
La rupture de la chaîne familiale
L’objectif déclaré de cette vague d’alyah – et de ses critères définis – est de réunir les membres d’une même famille, qui ont été séparés. Et pourtant, de nombreux nouveaux immigrants – si ce n’est la majorité – laissent encore derrière eux des êtres chers.
Zemenu Atalele, 30 ans, n’a pas vu sa mère depuis dix ans, depuis qu’elle est partie pour Israël et qu’elle s’est installée à Beer Sheva. Aucun des trois enfants qu’il a eus avec son épouse, Yeshihareg, n’ont rencontré leur grand-mère.
« J’appartiens à la nation d’Israël et je veux retrouver ma famille-là bas », m’avait dit Atalele dans son petit studio poussiéreux de Gondar, quelques jours avant d’embarquer à bord de l’avion en direction d’Israël.
Interrogé sur la profession qu’il aimerait avoir en Israël, il avait répondu : « Tout ce qui m’importe est de revoir ma mère ».
Mais revoir sa mère signifiait également laisser derrière lui son père et les quatre frères de ce dernier en Éthiopie, avait-il expliqué, ajoutant qu’il espérait qu’une fois au sein de l’État juif, il pourrait faire en sorte de les faire venir aussi.
« C’est très dur de rompre la chaîne familiale », commente le directeur des opérations de l’Agence juive, Yehuda Setton. « La question est : où la brise-t-on ? »
« Il n’y a pas une solution unique », ajoute-t-il, notant que pendant des années, voire des décennies, il a été dit à de nombreux Éthiopiens qu’ils seraient, un jour, éligibles à l’alyah. « C’est très, très compliqué », regrette-t-il.
Les longues attentes ont obligé un grand nombre de candidats à l’immigration en Israël à mettre leur vie en suspens. Dans l’incertitude d’un appel susceptible de survenir à n’importe quel moment, un grand nombre d’entre eux travaillent à la journée et ils ont des difficultés à trouver des logements à long-terme. Nombreux sont ceux qui ont quitté une vie plus facile dans leur village d’origine, où ils travaillaient dans l’agriculture, pour vivre à proximité de l’Agence juive à Gondar et à proximité de la synagogue, espérant ainsi faciliter la procédure d’immigration.
Pour certains, cette même incertitude a même plongé dans le flou toute vie personnelle.
Au début du mois, Teshager Gerem, 63 ans, son épouse Alemitu, 60 ans, accompagnés leurs sept enfants aujourd’hui adultes sont arrivés au sein de l’État juif, retrouvant les deux filles aînées de la famille qui avaient fait leur alyah il y a maintenant 17 ans.
Aucun de ces enfants – ils sont âgés de 17 à 35 ans – ne s’est marié ou a lui-même eu une descendance car ils étaient trop inquiets, ont-ils expliqué, qu’une telle initiative ne mette en danger leur péril pour l’État juif. Les critères du gouvernement stipulent que tous les Éthiopiens éligibles pourront faire venir avec eux leur époux, leurs enfants mineurs et tout enfant de plus de 18 ans s’il n’est pas marié et s’il n’a pas d’enfant.
« Nous étions heureux que nos filles s’installent en Israël parce que ça nous avait donné l’espoir de pouvoir un jour les rejoindre », avait expliqué le patriarche de la famille peu avant le grand départ.
Chalachew, l’aîné de la fratrie, âgé de 35 ans, avait confié que l’attente avait été difficile pour la famille.
« Nous ressentons un peu de tristesse parce qu’attendre a été très long », avait-il déclaré. « Nous ressentons même de la colère, parfois ».
Au moment du tout premier vol d’alyah de cette vague, en date du 1er juin, près d’un millier d’Éthiopiens avaient d’ores et déjà obtenu l’approbation finale leur permettant de venir vivre au sein de l’État juif, et ils arriveront aussitôt que la bureaucratie aura terminé son travail et que l’avion aura été dûment affrété. Les 2 000 autres devraient faire le voyage d’ici le mois de novembre, si des élections israéliennes ne viennent pas perturber les choses.
Mais les autres membres de la communauté qui resteront derrière vont continuer à vivre dans le flou, sans savoir s’ils apprendront un jour que leur dossier de candidature à l’immigration en Israël a été approuvé.
Yatmin Maharat dit être optimiste sur le sort qui sera réservé aux milliers de Juifs qui se trouvent encore en Éthiopie. Elle jure néanmoins de ne jamais cesser le combat pour les faire venir sur le territoire israélien.
« On ne peut pas abandonner tout espoir et nous, les activistes, on continuera la lutte jusqu’à ce qu’il ne reste plus personne là-bas », s’exclame-t-elle.
« On ne peut tout simplement pas oublier un frère, on ne peut pas oublier une mère, on ne peut pas oublier une grand-mère », poursuit-elle.