Israël en guerre - Jour 561

Rechercher
(De gauche à droite) Rabbanit Hila Naor, Shira Winter et Adva Bucholtz au centre d'incorporation de Tsahal de Tel Hashomer à Ramat Gan, le 26 novembre 2024. (Crédit : Ohr Torah Stone)
(De gauche à droite) Rabbanit Hila Naor, Shira Winter et Adva Bucholtz au centre d'incorporation de Tsahal de Tel Hashomer à Ramat Gan, le 26 novembre 2024. (Crédit : Ohr Torah Stone)

Une nouvelle section de Tsahal permet aux femmes religieuses d’être combattantes

Stimulée par le 7 octobre et renforcée par l’évolution des mœurs, une force entièrement féminine prend forme au sein de l’armée, avec un rabbanit pour répondre aux besoins spirituels des troupes pionnières

Il y a environ deux ans, lorsque Adva Bucholtz, alors âgée de 19 ans, a commencé à envisager les options qui s’offraient à elle après le lycée, elle se montrait moins encline que nombre de ses pairs religieux à laisser les lignes du code orthodoxe freiner ses ambitions.

Adolescente, elle avait déjà défié les normes de pudeur traditionnelles en enfilant un maillot de football pour jouer devant des foules comprenant des hommes. En 2020, cette attaquante et milieu de terrain prometteuse avait intégré la première équipe féminine professionnelle de football de la capitale, l’Hapoel Jerusalem.

Mais sa décision de choisir non seulement l’armée plutôt que le service national, mais aussi de s’entraîner pour un poste de combattante, en a surpris plus d’un.

Originaire de l’implantation religieuse de Neve Daniel, en Cisjordanie, et ancienne élève d’un lycée orthodoxe réservé aux filles, Bucholtz reconnaît qu’elle-même hésitait à rejoindre une unité de combat mixte de Tsahal.

« Il est assez inhabituel que des filles issues de mon lycée participent à des opérations de combat. Le message que nous recevons à l’école, et dans notre environnement en général, c’est qu’il vaut mieux laisser ce type de service aux hommes », confiait-elle en novembre, peu avant son enrôlement.

Lorsque le groupe terroriste palestinien Hamas a lancé, le 7 octobre 2023, l’attaque la plus meurtrière contre des Juifs depuis la Shoah, déclenchant une crise d’otages et une guerre sur plusieurs fronts, de nombreux jeunes Israéliens ont été inspirés non seulement à participer à l’effort de guerre, mais aussi à s’enrôler dans des unités de combat.

Parmi eux, Bucholtz et d’autres femmes religieuses qui, depuis le pogrom du 7 octobre, se sont enrôlées dans des unités de combat en nombre apparemment sans précédent.

Une soldate israélienne monte la garde devant Neve Daniel, le 1er avril 2022. (Crédit : Gershon Elinson / Flash90)

Pour répondre à la demande, l’armée a inauguré en novembre son tout premier peloton de combat exclusivement féminin destiné aux soldates pratiquantes, avec une conseillère spirituelle et une structure de commandement exclusivement féminine. Quarante futures combattantes forment cette première promotion, dont bon nombre viennent de communautés où, jusque-là, le service militaire, même dans des rôles non combattants, reste largement tabou.

Alors que Tsahal tente de résoudre les problèmes d’effectifs liés à la guerre multifrontale en cours, les partisans du projet estiment que cette initiative pourrait attirer un intérêt croissant de la part d’un vivier encore largement inexploité : celui des jeunes femmes sionistes religieuses très motivées. Ces dernières découvrent qu’il est possible de défendre leur pays sans compromettre leur foi.

« Chaque jour, je reçois des appels téléphoniques de jeunes filles religieuses qui souhaitent rejoindre la nouvelle unité de combat », témoigne le rabbin Ohad Teharlev, directeur du séminaire post-bac Midreshet Lindenbaum, qui a collaboré avec Tsahal à la création de ce peloton adapté aux besoins des femmes religieuses.

« Et il y a aussi de nombreuses jeunes femmes qui servent déjà dans des unités mixtes et qui souhaitent être transférées dans cette nouvelle unité religieuse non mixte », ajoute-t-il lors d’un entretien accordé au Times of Israel en février.

Le rabbin Ohad Teharlev, à droite, rencontre Naftali Bennett, alors ministre de la Défense, au Midreshet Lindenbaum à Jérusalem le 16 février 2020. (Crédit : Gershon Elinson/Flash90)

Tsahal n’a pas répondu aux demandes répétées du Times of Israel sur le peloton nouvellement formé ni sur les données historiques du nombre de femmes orthodoxes pratiquantes servant dans des unités de combat.

Mais selon Ohr Torah Stone, l’organisation qui chapeaute Midreshet Lindenbaum et 31 autres institutions religieuses, environ 3 500 diplômées des lycées religieux nationaux pour filles, soit 44 % du nombre total de diplômés, se sont enrôlées dans Tsahal en 2024.

Parmi elles, environ 350 ont choisi de servir dans des unités de combat, d’après Ohr Torah Stone, qui précise que ces chiffres sont basés sur des données communiquées par l’armée.

Ces données marquent une progression par rapport à 2017, où environ
2 700 jeunes femmes issues du système scolaire national-religieux — soit 34 % de leur promotion — s’étaient engagées dans Tsahal, selon une analyse publiée en 2018 par Idit Shafran Gittleman pour l’Institut israélien de la démocratie (IDI). Cette étude citait des statistiques internes de l’armée qui n’avaient pas été rendues publiques.

Des chiffres comparables ont également été rapportés pour l’année 2021, selon le média Ynet.

Des recrues et leurs familles se rassemblent au centre d’incorporation de Tel Hashomer en Israël le 18 avril 2024. (Crédit : Yossi Aloni/Flash90)

L’idée de créer cette unité est venue de Tsahal elle-même. Engagée sur plusieurs fronts depuis 2023, l’armée cherchait à mobiliser un vivier encore peu sollicité de femmes idéalistes et très motivées, prêtes à servir leur pays.

« Ce n’est pas nous qui avons approché Tsahal, c’est Tsahal qui est venue à nous », a déclaré le rabbin Kenneth Brander, président de l’organisation Ohr Torah Stone.

Cette nouvelle unité féminine est intégrée au Combat Intelligence Collection Array, qui relève du Corps de défense des frontières de Tsahal. Les soldates y recevront une formation au combat et au maniement des armes équivalente à celle des soldats des bataillons mixtes chargés de la surveillance des frontières jordanienne et égyptienne — tels que Bardelas, Caracal et les Lions de Jordanie.

Une fois leur instruction terminée, les recrues seront déployées sur la même frontière « calme » que ces unités mixtes, où elles auront pour mission de surveiller les mouvements suspects, détecter les infiltrations et tendre des embuscades contre les trafiquants d’armes et de drogue, a précisé le colonel Ohad Teharlev.

Des soldates du bataillon mixte Caracal se préparent à une mission nocturne lors d’un entraînement, près de la frontière avec l’Égypte, le 3 septembre 2014. (Crédit : Hadas Parush / Flash90)

Les femmes seront formées pour faire face à des situations de combat si nécessaire, mais elles ne franchiront pas la frontière, ne participeront pas à des campagnes terrestres ni à des opérations antiterroristes, comme celles menées par les brigades d’infanterie Nahal, Givati ou Golani, a précisé Teharlev.

« Mais elles possèdent les capacités physiques et l’entraînement au maniement des armes nécessaires pour riposter face à des terroristes, si la situation l’exige », a-t-il ajouté.

Elles le font pour elles

La législation israélienne impose à tous les citoyens juifs — hommes comme femmes — une période de service militaire obligatoire de deux à trois ans, sauf en cas d’exemption spécifique.

Outre les exemptions quasi systématiques accordées aux ultra-orthodoxes, l’armée autorise également les femmes issues de milieux religieux à renoncer au service militaire. Elles peuvent alors se porter volontaires dans le cadre d’un service national, généralement d’une durée d’un à deux ans, dans des hôpitaux, des écoles ou auprès de populations défavorisées.

En vertu d’un accord de longue date entre Tsahal et le Grand Rabbinat d’Israël — entériné dans la loi, les femmes diplômées d’écoles religieuses féminines peuvent obtenir automatiquement une exemption du service militaire pour raisons religieuses.

Des femmes juives religieuses effectuent leur service national à la maternité d’un hôpital de Jérusalem. 28 octobre 2010. (Crédit : Abir Sultan/FLASH90)

Il y a plus de vingt ans, Teharlev a joué un rôle clé dans l’intégration des femmes orthodoxes pratiquantes au sein de Tsahal, en créant des passerelles vers des fonctions non combattantes, principalement dans les unités de renseignement et d’éducation.

Bien que ces options restent controversées au sein des segments les plus conservateurs du sionisme religieux, Teharlev estime qu’il est temps  de pousser le concept un peu plus loin, en canalisant l’ardeur au combat de jeunes femmes comme Bucholtz, tout en leur permettant de préserver leurs valeurs religieuses et leurs règles de conduite spirituelle.

La première condition posée est une absence totale d’hommes dans l’unité.

« En raison des nombreuses problématiques de genre que soulèvent les unités de combat mixtes, aucun rabbin sérieux ne pourrait y consentir », explique Teharlev. « Désormais, avec une section fondée sur une stricte séparation des sexes, respectueuse des exigences religieuses, et bénéficiant d’un encadrement spirituel continu assuré par une éducatrice, il n’y a plus d’obstacle halakhique. »

Dans cette unité, les femmes pourront prier ensemble et étudier la Torah, sans que cela soit obligatoire.

« Si vous êtes une femme pratiquante, le cadre que nous avons mis en place, fera en sorte que vous soyiez entourée. Nous vous rendrons visite régulièrement, nous veillerons à ce que vous ayez une mentor spirituelle, et nous nous assurerons que tous vos commandants soient des femmes », a affirmé le rabbin Kenneth Brander, président de Ohr Torah Stone.

Le rabbin Kenneth Brander (Crédit : Maayan Shoshani Markowitz via Ohr Torah Stone)

Bien que le service militaire des femmes religieuses ait gagné du terrain au sein de la communauté ces dernières dizaines d’années, de nombreux membres du courant national-religieux restent – fermement – opposés à cette idée, a fortiori à l’intégration de femmes dans des rôles de combat, et ce malgré les garde-fous spirituels désormais en place.

« La séparation totale entre les sexes n’existe pas dans Tsahal », a déclaré le rabbin Shlomo Aviner, figure éminente du courant sioniste religieux le plus rigide, connu pour son influence dans une large partie de la communauté.

Dans un entretien accordé au Times of Israel, il a qualifié de « mauvaise idée » le fait d’autoriser les femmes à servir dans Tsahal, sous quelque forme que ce soit, y compris dans une unité de combat exclusivement féminine.

Mais pour Brander, une telle approche ignore la réalité sur le terrain.

« Que nous le voulions ou non, les femmes religieuses s’enrôlent », a-t-il déclaré. « On peut s’opposer au phénomène, le dénoncer, mais ma responsabilité est de veiller à ce que ces jeunes femmes disposent d’un cadre halachique respectueux et adapté à leur engagement. »

Aviner, 81 ans, a également soutenu que l’ouverture de certains rôles militaires aux femmes, qu’elles soient religieuses ou non, nuirait à l’armée dans son ensemble.

Le rabbin Shlomo Aviner lors de l’inauguration d’un nouveau jardin d’enfants dans l’implantation de Beit El, le mercredi 26 mars 2014. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

« L’introduction de femmes dans les unités de combat abaisse les standards et les aptitudes opérationnelles des soldats », a affirmé Aviner, reprenant une idée ancienne et largement répandue qui continue de faire débat en Israël, aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

Le professeur Yuval Heled, spécialiste de la physiologie humaine et ancien physiologiste en chef du corps médical de Tsahal, a lui aussi critiqué par le passé la politique de l’armée consistant à recruter des femmes pour des postes dans l’infanterie de manœuvre ou les forces spéciales. Selon lui, d’un strict point de vue coût-bénéfice, il est peu rationnel de consacrer autant de ressources à identifier les rares femmes physiquement aptes à servir dans ces unités d’élite.

Heled s’est toutefois déclaré favorable à la création d’une unité exclusivement féminine au sein du réseau de renseignement de combat.

« Le risque que ces femmes soient confrontées à des combats au corps à corps est très faible », a déclaré le lieutenant-colonel (réserviste) Heled.
« Les exigences physiques n’ont rien à voir avec celles de l’infanterie, et encore moins avec celles des forces spéciales. Elles conduiront des véhicules, tendront des embuscades contre des trafiquants de drogue ou surveilleront des zones à distance. »

Des soldates préparent des munitions dans une zone de transit au sud d’Israël, près de la frontière avec Gaza. 1er janvier 2024. (Crédit : Tomer Neuberg/FLASH90)

« Elles devront peut-être porter des charges lourdes, mais cela ne devrait pas nous empêcher de recruter des femmes », a-t-il ajouté. « Les femmes sont tout à fait capables de conduire des chars, d’être pilotes de chasse ou de servir dans ce type d’unités semi-combattantes. Et vous avez l’avantage supplémentaire de recruter des femmes très motivées et désireuses de contribuer ».

Le père de Bucholtz, Yishai, s’était confié au Times of Israel en février, alors que sa fille était à mi-parcours de sa formation de base. Il avait reconnu que l’entraînement était physiquement exigeant pour Adva, mais estimait qu’elle semblait en mesure de le supporter. (Depuis son enrôlement, Bucholtz n’est plus autorisée à s’exprimer dans les médias, conformément au protocole habituel de Tsahal.)

Adva Bucholtz dribble un ballon lors d’un match de football de Hapoel Jerusalem contre Kiryat Gat à Ness Ziona, le 19 janvier 2023. (Crédit : Bernie Ardov/Hapoel Jerusalem)

« Je la vois rentrer à la maison épuisée. C’est très intense. Mais l’ambiance semble bonne, et elle a l’air heureuse », raconte-t-il. « Je suis peut-être naïf, mais j’ai une confiance fondamentale dans Tsahal : je crois qu’ils ne lui feront pas faire des choses inadaptées à la physiologie d’une femme. »

Il ajoute qu’à l’exception d’un incident isolé au cours duquel Adva et les autres recrues ont dû courir et s’entraîner en présence d’un commandant masculin, Tsahal a tenu sa promesse de maintenir une stricte non-mixité.

« Bien que je pense qu’Adva ait pu se débrouiller dans une unité mixte, la non-mixité présente un véritable avantage : il y a un langage commun », poursuit-il. « Les femmes peuvent prier, demander des jours de repos pour des raisons religieuses, sans se sentir gênées, tandis que les autres [non pratiquantes] poursuivent leur entraînement. »

Selon Teharlev, plusieurs raisons pratiques justifient l’importance de ce cadre non mixte et religieux pour les femmes pratiquantes.

« Sur le terrain, il y a peu d’intimité pour se changer ou se laver. Et l’entraînement au combat est bien plus intense et physique que le travail dans un bureau. Cela crée une proximité qu’il faut gérer autrement », explique-t-il.

La nouvelle unité est composée de femmes issues de parcours variés. Certaines ont suivi une midrasha, une sorte de yeshiva pour femmes, avant leur enrôlement, d’autres ont commencé leur service dans des unités de combat mixte, avant de demander leur transfert dans un cadre plus conforme à leurs valeurs religieuses. D’autres encore se sont engagées directement après le lycée.

Adva Bucholtz et la Rabbanit Hila Noar étudiant à la Midreshet Lindenbaum d’Ohr Torah Stone sur une photo non datée. (Crédit : Ohr Torah Stone)

Les femmes du peloton s’abstiennent, pour la plupart, de toute relation sexuelle avant le mariage, adoptent un code vestimentaire conservateur, intègrent la prière et l’étude de la Torah à leur routine quotidienne, ne consomment que de la nourriture casher et respectent le Shabbat. Elles se sentent plus à l’aise en servant aux côtés de femmes qui partagent les mêmes convictions.

« Personnellement, je pense que chaque femme doit trouver la voie qui lui convient. Et pour certaines, cela passe par le service national », déclare la Rabbanit Hila Naor, qui agira comme conseillère spirituelle de l’unité. « Mais pour celles qui en ont la capacité et qui correspondent au profil, le service militaire, y compris dans des unités de combat, est aujourd’hui la meilleure façon de servir le pays, alors que nous sommes confrontés à d’énormes défis. »

Âgée de 49 ans, Naor a elle-même servi dans la division de l’éducation de Tsahal et est actuellement sergent dans les réserves. Dans son rôle d’aumônière officieuse, elle assumera nombre de fonctions traditionnellement dévolues à un rabbin : diriger des offices de prière, dispenser des cours hebdomadaires de Torah et accompagner spirituellement les recrues, dans le cadre de ses obligations en réserve.

Naor préfère être appelée rabbanit, un titre historiquement réservé aux épouses de rabbins, mais de plus en plus utilisé pour désigner des femmes orthodoxes érudites qui, comme Naor, ont une connaissance approfondie de la halakha [loi juive] et fonctionnent essentiellement comme des rabbins, même si elles ne portent pas le titre officiel.

Le Grand Rabbinat d’Israël n’autorise pas les femmes à passer les examens d’ordination rabbinique. Toutefois, certains courants de l’orthodoxie moderne ont commencé à ordonner des femmes.

Naor a suivi cinq années de formation au Susie Bradfield Women’s Institute of Halachic Learning, une institution affiliée à Ohr Torah Stone. Ce programme est équivalent à celui requis pour se présenter aux examens d’ordination du Grand Rabbinat.

La Rabbanit Hila Noar sera diplômée de l’Institut féminin Susi Bradfield de leadership halakhique en juin 2024. (Crédit : Elad Weitman)

Elle collabore depuis plusieurs années avec le rabbin Teharlev pour préparer les jeunes femmes religieuses, tant sur le plan mental que spirituel, à des rôles non combattants au sein de Tsahal. Elle connaît intimement les défis auxquels sont confrontées celles qui choisissent de s’engager dans l’armée tout en restant fidèles à leurs convictions religieuses.

Dans sa nouvelle fonction de conseillère spirituelle et halakhique pour la nouvelle unité de combat, la sergente Naor servira en tant que réserviste dans le corps du renseignement de combat. Elle n’opérera pas au sein du rabbinat militaire de Tsahal, qui, à l’instar du Grand Rabbinat d’Israël, ne reconnaît pas les femmes comme rabbins.

Naor estime qu’il est essentiel qu’une unité exclusivement féminine soit accompagnée par une femme dans le rôle de guide spirituelle, afin d’offrir un soutien adapté dans un contexte à la fois nouveau et pionnier.

« Le fait d’avoir une femme comme référente spirituelle permet aux filles de se sentir plus à l’aise pour poser des questions », explique-t-elle. « Trop souvent, elles se disent qu’elles n’ont pas le droit de déranger un rabbin pour ce genre de sujet, surtout si c’est un officier de haut rang, alors qu’elles ne sont que de simples soldates. »

« Et cela ne concerne pas uniquement les questions de santé féminine », ajoute-t-elle.

Plus de mise à l’écart

L’ouverture de cette unité de combat s’inscrit dans un mouvement amorcé depuis plusieurs années, au cours duquel les femmes se considèrent de plus en plus comme des candidates légitimes à une pleine participation aux forces de combat israéliennes. Elles ne se limitent plus à des fonctions de soutien, mais revendiquent leur place aux côtés des hommes sur les lignes de front.

En réponse à cette évolution, l’armée a élargi les opportunités proposées aux femmes. Toutefois, ces avancées ont longtemps ignoré les besoins spirituels spécifiques des femmes religieuses, un manque auquel le rabbin Teharlev a tenté de répondre à travers plusieurs initiatives.

En novembre, Tsahal a lancé un programme pilote autorisant des femmes à servir dans les unités de mobilité de l’infanterie. Un second projet pilote devrait voir le jour en novembre 2025, permettant cette fois aux femmes d’intégrer le corps blindé.

Parallèlement, l’armée a mis en place plusieurs nouvelles unités entièrement féminines ouvertes à toutes, indépendamment de leur orientation religieuse. Néanmoins, le principe de non-mixité y reste plus souple, et aucun encadrement spirituel ou halakhique n’y est proposé. Des équipes exclusivement féminines ont notamment été créées au sein du Combat Intelligence Collection Array, ainsi que dans l’unité d’ingénierie de combat d’élite Yahalom.

Des soldates opèrent un char dans le désert du Neguev, sur une photo non datée. (Crédit : Armée israélienne)

En 2022, l’armée a inauguré une compagnie de commandantes de chars entièrement féminine, à la suite d’un programme pilote de deux ans. Déployées aux côtés d’unités mixtes sur la frontière égyptienne, ces opératrices de chars sont toutefois entrées dans l’histoire le 7 octobre 2023. Ce jour-là, elles ont pris part aux combats contre les terroristes du Hamas qui massacraient les civils israéliens dans les localités proches de Gaza, devenant ainsi les premières femmes de l’histoire d’Israël à participer à une bataille active à bord de chars.

Quelques semaines plus tard, interrogée par la chaîne N12, une commandante nommée Hila a minimisé la portée symbolique de leur engagement en tant que femmes. « Et alors ? Qu’est-ce que ça change ? Les terroristes savaient-ils qu’il y avait des filles dans les chars ? Non. Vous pensez qu’ils ont vu les cheveux de Michal dépasser de son casque ? Non. Garçons, filles… quelle importance ? »

Jusqu’à récemment, les femmes orthodoxes souhaitant servir dans des unités combattantes de Tsahal n’avaient d’autre choix que d’intégrer des environnements mixtes, largement laïcs, où les relations sexuelles avant le mariage étaient banalisées, tandis que la prière et l’étude de la Torah étaient perçues comme exceptionnelles, voire marginales.

Un soldat du bataillon mixte Caracal applique de la peinture de camouflage sur le visage d’une soldate avant un exercice en 2011. (Crédit : Ori Shifrin/Israel Defense Forces/Flickr)

Début décembre, Tsahal a lancé un programme spécial à l’intention des femmes religieuses âgées de 26 à 50 ans disposant d’une formation professionnelle dans des domaines tels que les soins infirmiers, le travail social, la programmation informatique et d’autres secteurs permettant de mettre leur expertise au service de l’armée.

Parmi les quelque 260 femmes qui ont rejoint ce nouveau programme, beaucoup avaient délibérément évité le service militaire après le lycée, estimant qu’il allait à l’encontre de leur sensibilité religieuse.

Les hommes religieux, en revanche, bénéficient depuis des dizaines d’années de divers cadres mis en place par l’armée, leur permettant de concilier engagement militaire et respect de leurs obligations religieuses, y compris dans des unités de combat.

Aujourd’hui, Tsahal se prépare à devoir intégrer des dizaines de milliers de nouveaux conscrits issus de la communauté haredi. Cette situation résulte de l’expiration imminente des exemptions massives qui dispensaient jusque-là la population ultra-orthodoxe du service militaire obligatoire, sur fond de mobilisation nationale croissante contre toute tentative de maintenir ces privilèges.

Des manifestants ultra-orthodoxes radicaux assis sur le trottoir lors d’affrontements avec la police, pendant une manifestation contre la conscription des haredim dans l’armée, devant le centre de recrutement de Tsahal à Tel Hashomer, le 5 août 2024. (Crédit : Tomer Neuberg/Flash90)

Certains craignent toutefois, que la conscription massive de Haredim, qui exigent une stricte non-mixité dans leurs cadres de service, n’entrave la poursuite de l’intégration des femmes dans l’armée.

En juillet, Naamat, le mouvement des femmes d’Israël, et le Réseau des femmes d’Israël ont adressé une lettre ouverte aux hauts gradés de Tsahal pour exprimer leur inquiétude. Elles redoutent que l’incorporation à grande échelle de soldats ultra-orthodoxes nuise à l’avancement professionnel des femmes, notamment après la révélation, par la radio de l’armée, de projets visant à créer une brigade exclusivement masculine, destinée à accueillir plus d’un millier de soldats religieux.

Carmel Eitan, porte-parole de Naamat, a déclaré au Times of Israel que son organisation n’avait pas encore pris position sur la nouvelle unité exclusivement féminine.

« Nous ne disposons pas encore de suffisamment d’informations », a déclaré Carmel Eitan. « Nous souhaitons d’abord bien comprendre les enjeux et les implications. »

Naor a raconté qu’un immense sentiment de joie régnait au centre d’incorporation de Tsahal, le 26 novembre, lorsque les recrues de la nouvelle unité ont été réunies pour la première fois afin de commencer leur service ensemble.

Adva Bucholtz, à gauche, et Shira Winter au centre d’incorporation de Tel Hashomer à Ramat Gan, le 26 novembre 2024. (Crédit : Autorisation)

Elle a salué les efforts de Tsahal pour ouvrir ses rangs à des femmes issues de tous les horizons.

« Aujourd’hui, l’armée tente de créer un environnement favorable à l’intégration des soldates, tout en veillant à leur protection », a déclaré Naor. « Nous ne vivons pas dans un monde cloisonné. À l’université, au travail, nous interagissons avec l’autre sexe. Même les jeunes filles effectuant leur service national se retrouvent, en général, dans des cadres mixtes. »

« Lorsqu’un groupe de filles religieuses se forme, elles gagnent en force, se soutiennent et se protègent mutuellement », a-t-elle ajouté.

Interrogée par le Times of Israel peu avant le début de sa formation au combat, Adva Bucholtz faisait preuve de lucidité quant aux défis et aux complications auxquels elle et les autres pionnières religieuses de son unité allaient être confrontées.

« Mais aujourd’hui, Israël a besoin de soldats, hommes et femmes. Et sur le terrain, en particulier, les femmes ont beaucoup à apporter. »

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.