Les hauts gradés de Tsahal affichent un optimisme croissant sur les progrès de la guerre et sur le processus de destruction des capacités militaires du groupe terroriste palestinien du Hamas.
L’armée ne prétend pas pour autant avoir trouvé, et encore moins détruit, tous les tunnels du Hamas. Dans la région de Rafah, par exemple, elle estime que les efforts nécessaires pour démanteler l’infrastructure souterraine seront de longue haleine, pour arriver à la rendre inopérante. Cela s’explique en partie par le fait que les voies par lesquelles le Hamas a fait passer des armes en contrebande depuis l’Égypte s’enfoncent profondément dans la ville du sud, très densément peuplée, et qu’il est très difficile de faire exploser certains tronçons de ces tunnels. Toutefois, la menace que représentent les tunnels se réduit lentement mais inexorablement, grâce notamment à l’avancée de la zone tampon d’un kilomètre de large que Tsahal est en train d’établir à l’intérieur de la bande de Gaza, tout au long de sa frontière avec Israël.
L’armée israélienne ne prétend pas non plus avoir détruit tous les arsenaux de roquettes des groupes terroristes de Gaza. Les responsables affirment en effet que le Hamas est toujours en mesure non seulement de frapper les communautés proches de la frontière, mais aussi de tirer sur le centre d’Israël, dans les régions de Jérusalem et de Tel Aviv. Les autorités israéliennes sont toutefois convaincues que le Hamas n’est plus en mesure de faire passer en contrebande des armes ou des composants, et que ses usines de fabrication de roquettes ont été en grande partie démolies.
Elle ne prétend pas avoir tué ou neutralisé ni tous les dirigeants du Hamas – Yahya Sinwar est toujours en fuite – ni même tous les membres de la milice du Hamas, forte de 30 000 hommes. Les responsables militaires estiment cependant avoir éliminé environ la moitié des terroristes du groupe. La plupart de ceux qui restent ne combattent plus, ne sont plus dans les tunnels et se cachent désormais dans des zones humanitaires désignées.
Mais en dépit de ces progrès, 120 otages sont toujours détenus à Gaza, dont 116 depuis le 7 octobre. Les agences de sécurité travaillent inlassablement à la collecte de renseignements qui pourraient faciliter les opérations de sauvetage, mais les occasions sont rares.
En contradiction flagrante avec les propos du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a déclaré samedi soir que la pression militaire exercée par Tsahal sur le Hamas depuis des mois s’était révélée insuffisante pour l’obliger à conclure un accord sur les otages, le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi, a assuré le lendemain que ses troupes avaient exercé « toute la pression nécessaire pour créer les meilleures conditions pour un tel accord, et c’est ainsi que nous procédons depuis que le précédent accord a été rompu » au mois de novembre.
Avec d’autres responsables de la Sécurité, et à l’instar du ministre de la Défense Yoav Gallant, Halevi s’est clairement exprimé sur la nécessité urgente de parvenir à un accord pour obtenir la libération du plus grand nombre d’otages possible dans les plus brefs délais.
Quant à la fin officielle de la guerre qui résulterait d’un tel accord, les responsables militaires ont déclaré qu’ils se sentaient relativement à l’aise avec cette perspective. Les raisons invoquées sont que la capacité militaire organisationnelle du Hamas est désormais suffisamment dégradée et que, au besoin, Israël pourrait reprendre ses « opérations militaires » contre des cibles du Hamas sans toutefois qualifier ces opérations de guerre.

Face à un tel optimisme, il est impératif de lancer une mise en garde contre la complaisance. Nous ne savons que trop bien où ont mené les évaluations des intentions et des capacités du Hamas en Israël le 7 octobre. Même si bon nombre de ses dirigeants et de ses membres sont morts et que les capacités actuelles du Hamas ont été sérieusement réduites, son idéologie, ses objectifs et son but premier sont exactement les mêmes qu’avant le 7 octobre : la destruction d’Israël et l’assassinat de juifs.
Selon des sources militaires, le risque d’infiltration du Hamas est très faible, cependant le territoire contrôlé par le gouvernement terroriste dans la bande de Gaza n’a pas reculé comme par enchantement : Comme je l’ai vu lundi dernier, la distance entre Shejaiyah, par exemple, où huit tunnels, dont six proches de la frontière, ont été découverts ces dernières semaines, est la même que celle qui sépare Nahal Oz et Kfar Aza, avec Saad, Alumim et Beeri juste au bout de la route.

Et malgré cela, lorsqu’un groupe de journalistes du Times of Israel s’est rendu mercredi dernier à Kfar Aza et à Beeri, et y a entendu les récits horribles des survivants du pogrom et de la prise d’otages perpétrés par le Hamas le 7 octobre, on nous a également appris qu’il n’y avait toujours pas de caméras à la barrière qui sépare ces deux kibboutzim de la bande de Gaza.

Un membre des équipes de défense civile qui ont combattu avec acharnement le Hamas le 7 octobre – il n’y avait que 26 Israéliens armés à Beeri, contre plus de 300 terroristes du Hamas pendant des heures – nous a également raconté qu’au cours des trois années précédant le 7 octobre, ces équipes de sécurité héroïques avaient reçu l’ordre de réduire drastiquement leurs effectifs. De plus, ces mêmes équipes avaient reçu l’ordre de garder leurs armes et munitions, dont la quantité était déjà scandaleusement limitée, non pas chez elles, mais dans l’armurerie du kibboutz, où, en ce jour terrible, les terroristes attendaient certains d’entre eux.
Il est scandaleux, nous a-t-on également dit, que neuf mois après l’invasion catastrophique à laquelle ils ont si vaillamment tenté de résister, ces escouades de défense civile n’ont toujours pas été correctement reconstituées, financées et armées.
Un contrariant admirable
Les responsables israéliens de la Sécurité se montrent de plus en plus confiants que le principal co-conspirateur de Sinwar, Muhammad Deif, a bel et bien été tué lors de l’attaque de samedi matin contre un bâtiment appartenant à la famille du commandant du bataillon du Hamas à Khan Younes, Rafaa Salameh, dont la mort dans l’attaque a été confirmée.
Contrairement aux déclarations du Hamas, largement relayées par la presse internationale, selon lesquelles 90 personnes auraient été tuées, dont de nombreux civils, l’armée, qui a montré aux journalistes des images vidéo de l’attaque, estime que le nombre de morts est bien inférieur, qu’il y avait des dizaines de terroristes du Hamas dans cette zone très précise et qu’il est très peu probable qu’il y ait eu de nombreuses victimes civiles.

Il ne devrait pas être nécessaire de souligner que la rapidité et la précision requises pour la frappe – et l’impératif de calculer les risques d’échec et de décider de la poursuite de l’opération – ont nécessité la supervision de professionnels extrêmement expérimentés des services de sécurité et de la direction politique.
Et pourtant, cela s’est avéré nécessaire après que des membres de sa coalition aient appelé publiquement le Premier ministre Benjamin Netanyahu à limoger le ministre de la Défense Yoav Gallant pour avoir osé exprimer des opinions responsables sur des questions fondamentales telles que la possibilité d’un accord de cessez-le-feu et la libération des otages, la nécessité d’une commission d’enquête nationale sur le 7 octobre et la conscription des Haredim.
Netanyahu, qui devient de plus en plus mégalomane, se montre de plus en plus irrité par la présence de Gallant. Ce dernier prend parfois des positions opposées à celles du Premier ministre et anathème aux partis de la coalition ultra-orthodoxe et d’extrême-droite non sioniste dont dépend le soutien de Netanyahu. Tous ces éléments renforcent l’importance du ministre de la Défense au sein de la coalition d’urgence, aux côtés du Premier ministre, et plus encore depuis le départ de Benny Gantz.

Au demeurant, dire aux familles endeuillées des soldats observatrices, comme l’a fait Netanyahu mardi, que vous ne saviez pas que leurs filles avaient tenté en vain d’avertir tous leurs supérieurs et autres avant le 7 octobre que le Hamas était sur le point d’attaquer, que vous ne saviez pas que les soldates ne disposaient pas d’armes et que vous ignoriez que de nombreuses familles endeuillées n’avaient pas reçu une seule visite de condoléances de la part d’un ministre ou d’un député, est franchement peu crédible, surtout si l’on considère que toutes ces questions ont été largement soulevées au cours des mois qui ont suivi le désastre.
Une telle déclaration sur un prétendu manque de connaissances n’est pas non plus très intelligente de la part d’un Premier ministre qui refuse de reconnaître sa responsabilité personnelle dans les événements du 7 octobre – en tant que dirigeant expérimenté et décideur politique sous le mandat duquel ces événements ont pu se produire – et qui refuse de s’engager dans une commission d’enquête publique manifestement essentielle sur le pire échec politique et sécuritaire de l’histoire moderne d’Israël.
Il ne faudrait pas non plus enrôler ceux qui n’étudient pas dans les yeshivot !
Dimanche, Tsahal s’apprête normalement à envoyer les premiers ordres de conscription aux hommes ultra-orthodoxes qui ne sont pas enrôlés. L’objectif est de procéder à la conscription de 3 000 d’entre eux au cours de l’année à venir et d’augmenter progressivement ce nombre au cours des dix prochaines années, jusqu’à ce que cette insupportable inégalité liée au service national soit corrigée.
Il est probable que nous aurons droit à des barrages routiers et autres manifestations d’extrémistes haredim contre ce qui devrait être l’application évidente de l’État de droit.
Ce que nous avons déjà vu et entendu, c’est l’intransigeance de nombreux « chefs spirituels » ultra-orthodoxes qui ont complètement perdu le contact avec le judaïsme authentique, ses valeurs et ses principes, et qui affirment ouvertement que même les jeunes hommes qui n’étudient pas dans les yeshivot ne devraient pas se présenter au service national.

Il est maintenant clair que ce refus tout à fait contraire aux principes du judaïsme de partager le fardeau de la citoyenneté n’est pas seulement, ou peut-être même pas principalement, une défense de l’aberration que constitue l’étude massive et à plein temps de la Torah par des adultes, subventionnée par le contribuable, mais une tentative de maintenir délibérément une main de fer sur la communauté et d’empêcher l’intégration sociale de ses membres, ainsi que leur poursuite d’une éducation solide et d’un plus grand épanouissement personnel.
Israël n’aurait jamais dû en arriver à une situation où ses dirigeants tentent de forcer une partie de la population à contribuer à la défense de la nation. Une voie sensible et négociée était et reste la meilleure solution. Il est tragique de constater que c’est l’intransigeance de ceux qui parlent au nom de la communauté ultra-orthodoxe qui a empêché Israël, qui lutte contre des ennemis redoutables à l’extérieur, de résoudre une crise qui le déchire de l’intérieur.