« Les Mémoires de la Shoah », une immense enquête désormais en bande dessinée

À l’origine, « Les Mémoires de la Shoah » sont une série d’articles publiés par Annick Cojean dans le journal Le Monde en 1995. La journaliste avait mené une longue enquête, récoltant les témoignages de plus de 3 000 rescapés du génocide et de descendants de nazis pour « raconter l’indicible ».

Cojean, qui avait reçu le prestigieux Prix Albert Londres pour son travail, avait également interrogé l’enseignement de la Shoah.

En janvier 2025, à l’occasion des 80 ans de la libération du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau, la scénariste Théa Rojzman et la dessinatrice Tamia Baudouin ont ravivé « Les Mémoires de la Shoah » à travers une bande dessinée dans laquelle Baudouin illustre l’horreur au moyen de métaphores et d’allégories graphiques.

Théa Rojzman, petite-fille de rescapée de la Shoah, s’est emparée des archives de la journaliste Annick Cojean et en a tiré un scénario, avant de contacter Tamia Baudouin pour que celle-ci donne vie au texte, selon le quotidien régional de Haute-Savoie Le Messager.

La dessinatrice, originaire d’Annecy et relativement peu connue avant la sortie des « Mémoires de la Shoah », a défini son stylé de « plutôt réaliste mais nourri d’autres influences artistiques.

Interrogée par Le Messager sur le témoignage retranscrit dans la bande dessinée qui l’a le plus marquée, Baudouin évoque, la larme à l’œil, celui d’Abraham P., un jeune Hongrois débarqué à Auschwitz et séparé de ses parents au moment de la sélection. Annick Cojean avait partagé son témoignage dans le premier article de sa série de 1995 :

« Je me suis penché vers mon petit frère en lui disant : ‘Solly, va rejoindre papa et maman’. Et comme un petit bonhomme, il y est allé. Si j’avais su que je l’envoyais droit au crématoire ! Je… J’ai ce sentiment de l’avoir tué. Je me suis demandé s’il avait pu rejoindre mes parents, je pense que oui. Il a dû leur dire : ‘Abraham m’a dit d’aller avec vous !’ Je me demande ce que mon père et ma mère ont pensé, surtout quand ils sont rentrés ensemble dans le crématoire… Je ne peux pas me retirer cela de la tête. Cela me fait si mal, et je ne sais pas que faire. »

Dans la bande dessinée, on retrouve également les témoignages de descendants d’anciens nazis, dont celui de la fille de Hermann Göring, commandant de l’armée de l’Air allemande et numéro deux du régime, qui, à l’époque, disait encore admirer son père, selon Le Monde.

« Les Mémoires de la Shoah » a été publié aux éditions Dupuis, en janvier dernier.