Netanyahu aurait fait fi de la demande du chef du Shin Bet de tuer Sinwar juste avant le 7 octobre – N12

Le chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet, Ronen Bar, a demandé au Premier ministre Benjamin Netanyahu d’approuver l’élimination du chef du Hamas Yahya Sinwar le 1ᵉʳ octobre 2023, soit six jours avant que le groupe terroriste palestinien n’envahisse le sud d’Israël et ne déclenche la guerre de Gaza. Cependant, Netanyahu aurait ignoré cette demande, préférant suivre l’avis des responsables militaires, selon un reportage diffusé samedi.

Le bureau du Premier ministre a immédiatement démenti cette allégation, affirmant que Netanyahu avait discuté d’un scénario d’assassinats ciblés à Gaza lors de la réunion en question, tandis que Bar avait en fait demandé qu’Israël offre des incitations et des avantages civils au Hamas pour acheter son silence.

La chaîne N12 a indiqué que le contenu de son reportage s’appuie sur des enquêtes menées par le Shin Bet sur ses propres échecs entourant le 7 octobre, et que ces enquêtes montraient que les agences de sécurité avaient très mal évalué les intentions du groupe terroriste palestinien du Hamas.

La nuit du 7 octobre

Le reportage indique que Bar a rencontré des hauts responsables du Shin Bet à 3h30 le 7 octobre, soit trois heures avant le début de l’assaut, après avoir reçu des preuves que le Hamas se comportait de manière suspecte.

Ces deux indicateurs, selon le reportage, étaient l’activation de dizaines de cartes SIM israéliennes à Gaza et la descente de hauts commandants de la branche armée du Hamas dans les tunnels du groupe terroriste.

Un Palestinien sur un char israélien à la barrière frontalière près de la ville de Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza après que quelque 3 000 terroristes du Hamas ont franchi la frontière et sont entrés en Israël, massacrant plus de 1 200 personnes, le 7 octobre 2023. (Crédit : Yousef Mohammed/Flash90)

Selon le reportage, Bar a d’abord cru que le Hamas se préparait à une invasion d’Israël, bien qu’il s’ait attendu à des dizaines de terroristes et non aux milliers qui allaient prendre d’assaut le pays en quelques heures.

Cependant, le reportage indique que Bar s’est peu à peu convaincu au fil de la nuit que le Hamas n’avait pas l’intention d’envahir le pays, car de hauts responsables du Shin Bet lui ont dit que les cartes SIM avaient déjà été activées par le passé et que le Hamas se préparait très probablement à repousser une éventuelle attaque israélienne.

Selon le reportage, la théorie selon laquelle le Hamas se préparait à une frappe israélienne a été transmise à Tsahal entre 4 heures et 6 heures du matin. Néanmoins, Bar a envoyé deux escadrons antiterroristes à la frontière avec Gaza, car il pensait qu’une attaque terroriste de faible envergure était possible.

À 5 heures du matin, il a été décidé d’annuler une réunion du cabinet de sécurité qui devait se tenir le dimanche 8 octobre, afin que le Hamas n’interprète pas celle-ci comme une approbation israélienne de la frappe sur Gaza et ne décide pas de lancer une attaque préventive.

Le secrétaire général Avi Gil arrivant au bureau du Premier ministre, à Jérusalem, le 3 janvier 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Toujours à 5 heures du matin, il a été décidé de réveiller immédiatement le secrétaire militaire de Netanyahu, le général de division Avi Gil, et de l’informer des renseignements qui avaient été recueillis, poursuit le reportage.

Cependant, le chef de cabinet de Bar n’a appelé Gil qu’à 6 h 13, selon le compte-rendu. Au cours de cet appel, le chef de cabinet a informé Gil « qu’il y a des signes indiquant une infiltration, mais que le téléphone [du dirigeant du Hamas Yahya Sinwar] et celui d’un autre haut responsable du Hamas se trouvent dans leurs appartements et non dans les tunnels ».

Le reportage indique qu’à 6h29, Gil a appelé Netanyahu, alors que l’assaut du Hamas, au cours duquel les terroristes allaient tuer plus de 1 200 personnes et en enlever 251 autres, venait tout juste de commencer.

Le reportage indique également que, de manière générale avant le 7 octobre, le Shin Bet ne considérait pas les terroristes de l’unité dite « Nukhba » (« élite » en arabe) du Hamas qui ont mené l’invasion comme une menace stratégique. L’agence de sécurité intérieure estimait au contraire que la barrière frontalière de sécurité constituait une défense efficace contre les attaques terrestres du groupe terroriste.

Le Shin Bet était, semble-t-il, bien plus préoccupé par la menace potentielle des unités navales du Hamas, entre autres dangers. Des commandos navals du Hamas ont effectivement infiltré Israël par la mer le 7 octobre, tuant 19 civils et 14 soldats aux abords de la plage Zikim.

Pourtant, les chefs successifs du Shin Bet, Yoram Cohen, Nadav Argaman et Bar, ont reconnu que le Hamas se renforçait. Pendant des années, ils ont exhorté Netanyahu à donner son feu vert à l’élimination de Sinwar et du chef de la branche armée du Hamas, Muhammad Deif, qui ont finalement été éliminés par Israël l’année dernière, rappelle le reportage.

« Mais Netanyahu a préféré la position de l’armée israélienne, du calme en échange du calme », poursuit le reportage. Les agences de sécurité se sont également opposées avec acharnement à la politique de Netanyahu qui encourageait le Qatar à injecter de l’argent à Gaza.

Des membres d’une « académie de police » dirigée par le Hamas participant à une session de formation dans la ville de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 2 août 2023. (Crédit : Saïd Khatib/AFP)

Au cours de l’année précédant le 7 octobre, Bar a également tenté d’avertir Netanyahu des dangers de la division interne en Israël concernant la refonte judiciaire, et de l’audace potentielle des ennemis d’Israël qui en résulterait, mais le Premier ministre l’aurait ignoré, selon le reportage de la chaîne N12.

Début septembre 2023, le Shin Bet avait organisé une réunion sur la préparation d’une opération à Gaza, à laquelle avaient également participé des officiers des opérations de Tsahal. La possibilité d’une invasion du Hamas n’avait pas été abordée, mais il avait été conclu que la situation dans la bande de Gaza et en Cisjordanie s’envenimait et qu’il fallait se préparer, ajoute le reportage.

Bar a également demandé une réunion des chefs de la sécurité avec Netanyahu. Mi-septembre, il avait averti que « nous nous dirigeons vers une opération sur plusieurs fronts ».

Le 1ᵉʳ octobre, le Premier ministre a tenu une réunion des chefs de la sécurité au cours de laquelle Bar a recommandé de tuer Sinwar. Le Premier ministre a ignoré la demande.

Le bureau de Netanyahu rejette le reportage

Le bureau du Premier ministre a qualifié le reportage de la chaîne N12 de « véritable mensonge », ajoutant que « c’est tout le contraire ».

Dans un communiqué, il a confirmé qu’une réunion des chefs de la sécurité s’était tenue le 1ᵉʳ octobre, présidée par Netanyahu, concernant Gaza. Mais lors de cette réunion, a-t-il précisé, Bar « a recommandé d’accorder des avantages civils au Hamas en échange du calme ».

Le bureau du Premier ministre a affirmé que Bar aurait en réalité déclaré que « des frappes ciblées ne devraient pas être menées à Gaza et au Liban pour éviter une nouvelle vague de guerre à Gaza ».

Le leader du Hamas dans la bande de Gaza, Yahya Sinwar, s’exprimant lors d’une conférence de presse pour la Journée mondiale d’Al-Qods (Jérusalem) dans la ville de Gaza, le 30 mai 2019. (Crédit : Mohammed Abed/AFP)

En revanche, lors de cette réunion, Netanyahu aurait recommandé « un scénario d’escalade en éliminant les dirigeants du Hamas à Gaza ».

Le communiqué précise également que le 3 octobre, Bar avait déclaré avec certitude que le Hamas cherchait à éviter un nouveau conflit avec Israël et que le calme pourrait être maintenu pendant un certain temps « si Israël offrait un horizon économique à Gaza ».

Selon de nombreux médias, Netanyahu se préparerait à congédier Bar et l’aurait retiré de l’équipe chargée de négocier l’accord de cessez-le-feu en cours.