Passant enfin à l’offensive, la 91e division de Tsahal fend les lignes de front du Hezbollah

Il y a un peu plus d’un an, Israël était confronté à un dilemme à sa frontière nord, en plus de la menace latente qui inquiétait les responsables de la défense israélienne depuis une vingtaine d’années. Deux tentes avaient été érigées par le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah à l’intérieur du territoire israélien, qu’Israël était déterminé à démanteler.

Mais le pays était tout aussi déterminé à éviter une guerre avec le Hezbollah, qui, supposait-il, se traduirait par des milliers de roquettes et de missiles tirés chaque jour sur le pays. Israël était en réalité aussi dissuadé que la puissante armée soutenue par l’Iran l’était, du moins c’est ce qu’il espérait.

Les tentes sont restées là pendant des mois, Israël envoyant des messages au Hezbollah par l’intermédiaire de la force de maintien de la paix de l’ONU, exigeant qu’il démantèle les structures. Plusieurs responsables israéliens ont plaidé en faveur de l’usage de la force, mais les approches diplomatiques combinées à de vagues menaces verbales ont fini par convaincre le Hezbollah de faire marche arrière.

Aujourd’hui, après le pogrom perpétré par les terroristes du groupe palestinien du Hamas le 7 octobre 2023 et après un an à essuyer des roquettes et des missiles anti-char tirés par le Hezbollah, la position d’Israël a radicalement changé, de même que l’équilibre des forces. Dix jours après le début de l’opération terrestre de Tsahal au Liban, il est inconcevable qu’Israël ait pu jusqu’à récemment considérer le Hezbollah comme un adversaire à ménager.

Jeudi, l’armée israélienne a autorisé pour la première fois des journalistes israéliens à pénétrer dans un village du sud du Liban, signe clair qu’elle estime avoir pris le contrôle opérationnel de la région.

D’autres signes de la nouvelle réalité abondent. Israël a créé plusieurs brèches dans la barrière frontalière afin de permettre aux véhicules de Tsahal de pénétrer au Liban. Ces brèches ne sont plus surveillées. Les journalistes ont ainsi pénétré en territoire ennemi à bord de Hummers ouverts, sans craindre la présence de tireurs d’élite ni de mines.

Des Hummers de Tsahal roulent le long de la clôture frontalière avec le Liban, le 10 octobre 2024. (Crédit : Lazar Berman/Times of Israel)

Les soldats réservistes du 8207e bataillon de la brigade Alon de la 91e division, stationnés à l’intérieur du village chiite visité, semblaient détendus et heureux, prêts à poser pour des photos et à reprocher aux journalistes de répandre des informations défavorables.

Mais le Hezbollah n’a certainement pas dit son dernier mot. Mercredi, un soldat du bataillon a été grièvement blessé, et huit ont été légèrement blessés la veille. Tsahal a annoncé jeudi que le sergent-major réserviste franco-israélien Ronny Ganizate, du 5030e bataillon de la brigade Alon, avait été tué, et qu’un autre réserviste avait été grièvement blessé.

La défense organisée et hautement professionnelle à laquelle beaucoup s’attendaient est toutefois bien loin de la réalité. Les soldats ont indiqué qu’ils avaient essuyé des attaques non coordonnées de la part de petites cellules, qui ont immanquablement été éliminées. Des soldats d’une autre brigade ont confié au Times of Israel que les terroristes du Hezbollah qui étaient restés dans le secteur étaient pour la plupart découragés, même s’ils tendaient périodiquement des embuscades.

Une bonne partie de la destruction des forces du Hezbollah le long de la frontière a été réalisée au cours de l’année dernière, Tsahal ayant utilisé l’artillerie et les frappes aériennes pour cibler les positions ennemies dans les villages libanais avoisinants. Tsahal a également mené des dizaines de raids discrets pour réduire encore les capacités du Hezbollah.

Sous la pression, la force d’élite Radwan, entraînée pour envahir le nord d’Israël, s’est repliée de la frontière.

Ces dernières semaines, Israël est passé à la vitesse supérieure dans sa lutte contre le Hezbollah. Avec une créativité à toute épreuve, une série implacable d’attaques menées par l’armée israélienne (et probablement par le Mossad) ont permis de décimer les principaux dirigeants du groupe terroriste et de réduire son arsenal de roquettes.

Le commandant de la brigade Alon, le colonel Yaniv Malka, dans le sud du Liban, montre la cache d’armes du Hezbollah que ses troupes ont découverte, le 10 octobre 2024. (Crédit : Lazar Berman/Times of Israel)

Aujourd’hui, en longeant la frontière avec le Liban, la barrière conçue pour ralentir le Hezbollah en cas de tentative d’invasion semble rien moins que pathétique, un exemple rouillé de combien Israël a sous-estimé ses adversaires jusqu’à 6h29 du matin le 7 octobre 2023. Les fils barbelés et les barils bleus de l’ONU interdisant le passage de la ligne de démarcation n’auraient pas empêché des milliers de terroristes de Radwan de se ruer sur les kibboutzim et les bases de l’armée à proximité.

Les soldats de Tsahal au Liban ont découvert que le Hezbollah se préparait à répliquer ce scénario.

« Ce village est une position fortifiée », a expliqué le commandant de la brigade Alon, le colonel Yaniv Malka, qui se tenait dans une petite structure d’un étage. « Il n’y a pas un seul bâtiment dans tout le village, malheureusement, où nous n’avons pas trouvé munition ou renseignement. »

La maison dans laquelle le commandant se trouvait contenait du matériel militaire bien entretenu appartenant à deux combattants du Hezbollah, dont un stock de roquettes. Dans un champ voisin, les troupes ont trouvé des lanceurs dirigés vers la communauté frontalière israélienne d’Avivim.

Une cache d’armes du Hezbollah que les troupes de Tsahal ont découvert dans le sud du Liban, le 10 octobre 2024. (Crédit : Lazar Berman/Times of Israel)

« C’est pareil dans tous les bâtiments aux alentours », a ajouté Malka.

Mardi soir, le bataillon 8207 a trouvé une cache beaucoup plus importante dans une maison située à une centaine de mètres. Ils sont tombés dans une embuscade alors qu’ils investissaient la maison, et huit d’entre eux ont été blessés.

La maison comprenait trois pièces remplies d’obus de mortier, de fusils Kalachnikov, de RPG, de grenades à main, et de gilets pare-balles (Kevlar). Un fusil de sniper Dragunov et une mitrailleuse PK étaient rangés dans des caisses dans l’une des pièces, dont le mur du fond a disparu.

« Un terroriste peut venir dans le sud en jeans et en sandales », explique le général de brigade Shai Klepper, commandant de la 91e division, « récupérer ici équipement, carte, le plan qu’il avait préparé, et il est prêt à envahir ».

La planification était méticuleuse. Les soldats de l’armée israélienne ont trouvé des carnets détaillant les inspections régulières des sites par les responsables du Hezbollah depuis cinq ans.

Après près d’un an consacré à la défense, « comme un lion en cage », selon les termes d’un officier – la 91e division passe enfin à l’offensive, utilisant tout le spectre de ses capacités et mettant ses plans à exécution. Elle est déterminée à s’assurer à ce que les années de préparatifs du Hezbollah soient vaines.

« Nous détruirons chaque maison qui abrite des munitions », a indiqué Malka. « Un point c’est tout. Nous ne laisserons pas deux pierres l’une sur l’autre dans les maisons où se trouvaient des armes. »

« Nous allons nous assurer que le Hezbollah ne dispose plus de la capacité de tirer sur le nord d’Israël. »