David Zini aurait dit être opposé à un accord sur les otages

David Zini, l’homme qui a été nommé par Netanyahu à la tête du Shin Bet, aurait déclaré à ses collègues, lors d’une récente consultation militaire, qu’il était opposé à un accord avec le Hamas – un accord qui ouvrirait la porte à la remise en liberté et au rapatriement des otages qui sont toujours détenus à Gaza depuis le pogrom du 7 octobre.

« Je suis opposé à un accord sur les otages. C’est là une guerre éternelle », a-t-il dit, des propos qui ont été rapportés par la chaîne d’information N12.

De son côté, Haaretz a fait savoir que Netanyahu avait décidé de ne pas prendre Zini, l’année dernière, comme secrétaire militaire, expliquant sa décision à ses proches en disant que l’homme, qui est membre du mouvement national-religieux, était « trop messianique ».

Évoquant les propos tenus par le général de division sur son opposition à un accord, le Forum des familles d’otages et de disparus a écrit sur X que les familles étaient » scandalisées ».

« Si ces informations sont exactes, ce sont des paroles horribles et méprisables qui proviennent de quelqu’un qui aura la charge de déterminer le sort des otages », a déclaré l’organisation.

Faisant un jeu de mots en hébreu pour rendre profane le nom de Zini , Natali Zangauker, la sœur de l’otage Matan Zangauker, a dit qu’elle avait « honte » des paroles prononcées par le militaire.

« Je ne vais pas compter sur vous pour ramener mon frère et les autres otages », a-t-elle écrit. « Je ne vais pas compter sur vous pour protéger la vie de nos soldats qui sont sur place et pour créer les conditions qui permettront au Premier ministre du sang de conclure un accord et de mettre fin à la guerre ».

Selon un autre reportage de la chaîne N12, Zini avait laissé libre cours à sa colère à l’encontre de Herzi Halevi, qui était alors chef d’état-major de l’armée israélienne, lors d’une réunion du Commandement du sud, l’année dernière, déclarant : « Vous préférez le retour des otages à l’élimination du Hamas ».

Un responsable de la sécurité qui était présent lors des réunions de l’état-major général de Tsahal a dit explicitement devant les caméras de la Douzième chaîne que Zini « tient moins compte des otages ». Il a ajouté que si l’armée menait des opérations en évitant de porter atteinte aux otages, ce « n’était pas un paramètre » pris en compte par le militaire.

Une autre source a affirmé que les opinions de Zini étaient connues et que même si son positionnement était minoritaire et qu’il n’avait pas une grande influence, « ce sera autre chose » une fois chef du Shin Bet.

Dans ce contexte de controverse autour de la désignation du général de division à la tête de l’agence de sécurité, le député de HaMahane HaMamlahti et ancien chef d’état-major de Tsahal, Gadi Eisenkot, a demandé vendredi au militaire de refuser le poste.

Dans une lettre ouverte écrite à Zini, Eisenkot a expliqué qu’il avait connu une situation similaire en 2011, lorsque Netanyahu lui avait proposé de devenir chef d’état-major de Tsahal. Une proposition qu’il avait refusée dans la mesure où il n’était pas chef d’état-major adjoint à l’époque et qu’il voulait attendre d’avoir plus d’ancienneté.

Eisenkot avait été nommé chef d’état-major adjoint en 2015.

Eisenkot a critiqué âprement, dans sa lettre ouverte, la poursuite de la guerre à Gaza par Netanyahu, affirmant qu’il avait sapé le principal objectif de la guerre – le retour des otages – et qu’il avait également sapé les résultats obtenus à un prix très élevé sur le champ de bataille « en menant une guerre continue, une guerre qui n’est pas ciblée et qui a des objectifs dépassés ».

« Zini, j’ai été votre commandant pendant la plus grande partie de votre service militaire. J’apprécie vos capacités opérationnelles et votre courage », a écrit Eisenkot. « Je sais que vous avez la sagesse nécessaire pour choisir ce qui est la bonne chose à faire ».

Eisenkot a appelé Zini à faire ce qui est juste « pour l’État d’Israël, même si cela vous coûte personnellement », lui suggérant « d’informer le Premier ministre que la bonne chose à faire en ce moment, c’est d’attendre l’interprétation qui sera faite par la procureure-générale de la décision qui a été prise par la Haute Cour et d’autoriser ensuite la sélection d’un candidat plus expérimenté pour cette période de guerre ».

Le député HaMahane HaMamlahti Gadi Eisenkot lors d’une réunion de faction à la Knesset, le 10 mars 2025. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90

Selon Eisenkot, la désignation du nouveau dirigeant du Shin Bet devra se faire « d’une manière qui créera un large consensus national », en particulier en temps de guerre – l’une des guerres « les plus longues et des plus difficiles de l’Histoire d’Israël », a-t-il noté.

Défiant directement l’ordre qui lui avait été donné par la procureure-générale, Netanyahu a annoncé, dans la soirée de jeudi, qu’il nommait Zini à la fonction de prochain chef du Shin Bet.

Une décision qu’il aurait prise à l’issue d’une courte discussion avec l’intéressé, a fait savoir la Douzième chaîne.

La conversation avait eu lieu le 8 mai alors que le Premier ministre était venu visiter la base militaire de Tzeelim, où se déroulait un exercice de l’armée israélienne.

A la fin de l’exercice, Netanyahu avait pris Zini à part. Les deux hommes avaient fait une rapide promenade qui avait été pour eux l’occasion d’aborder la question de l’enrôlement des ultra-orthodoxes – Zini étant un référent sur ce sujet au sein de Tsahal.

Le Premier ministre avait ensuite demandé à Zini de venir dans sa voiture. Après cinq minutes de discussion, Bibi avait demandé au général quels seraient ses sentiments s’il devait être amené à prendre la tête du Shin Bet.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (à droite) et le major général de Tsahal, David Zini, sur la base d’entraînement de Tzeelim, dans le sud d’Israël, le 8 mai 2025. (GPO)

Zini avait répondu qu’il préférait rester général de division au sein de l’armée – mais il avait ajouté que si Netanyahu devait insister, il accepterait alors cette proposition.

Ce soir-là, Zini avait informé l’adjoint du chef d’état-major, Eyal Zamir, de la conversation qu’il avait eue avec le Premier ministre, sans donner de détails sur le contenu de leurs échanges.

Trois jours plus tard, Zini avait appelé Zamir pour lui signaler que, lors de leur conversation, Netanyahu avait soulevé l’idée de sa nomination au poste de chef du Shin Bet – sans pour autant laisser entendre que l’offre était sérieuse.

Zamir, pour sa part, avait critiqué Zini, auquel il avait reproché de s’être entretenu avec un haut-responsable de la hiérarchie politique sans autorisation préalable, comme c’est habituellement exigé.

Et, dans la journée de jeudi – soit presque deux semaines après leur rencontre – Zamir a enfin reçu un appel de Netanyahu. Le Premier ministre l’a alors informé qu’il avait décidé de le nommer à la tête du Shin Bet.

Zamir a fait part de ses inquiétudes concernant les qualifications de Zini, qui ne vient pas du Shin Bet ou du milieu des renseignements, ainsi que sur la façon dont la nomination a été faite, a signalé N12.

Zamir a aussi appelé le principal intéressé, lui faisant part directement de ces préoccupations. Les deux militaires ont convenu de se rencontrer dans la foulée. Lors de cet entretien, Zamir a finalement confié à Zini qu’il ne serait pas en mesure de le conserver au sein de Tsahal tant que cette désignation à la barre de l’agence de sécurité serait maintenue – laissant toutefois la porte ouverte à sa réintégration, le cas échéant.

Zini devrait remplacer l’actuel chef du Shin Bet, Ronen Bar, le mois prochain – sauf intervention de la Haute Cour.

La chaîne d’information a souligné que Zini avait affirmé à Zamir qu’il n’avait pas eu d’autres entretiens avec Netanyahu, concernant sa nomination au poste de chef du Shin Bet, que la brève conversation qui a eu lieu dans la voiture du Premier ministre.

Netanyahu a annoncé la nomination du général vingt-quatre heures après que la Haute Cour de justice a rendu un jugement qui a estimé que le licenciement, par le Premier ministre, du dirigeant sortant de l’agence, Ronen Bar, avait été effectué de manière « inappropriée » et « illégale », et qu’il y avait une situation de conflit d’intérêts. La procureure-générale Gali Baharav-Miara a alors informé Netanyahu qu’il lui était interdit de désigner un successeur à Bar pendant qu’elle examinait les implications de la décision rendue par les juges.

Réagissant à la nomination de Zini, jeudi dans la soirée, Baharav-Miara a reproché au Premier ministre d’avoir agi « en violation des instructions juridiques ». Elle a déclaré qu’il y avait « de fortes inquiétudes sur le fait que le Premier ministre ait agi en situation de conflit d’intérêts », et que la justice craignait que « le processus de nomination soit défaillant ».