Des danseurs seniors donnent du panache à une compagnie de danse de Tel Aviv

Vieillir n’est pas facile et pour des danseurs, vieillir signifie souvent devenir professeur et ne plus danser.

Quatre danseurs prennent de court les idées préconçues avec leur nouvelle compagnie réservée aux danseurs de plus de 40 ans. Cette compagnie, qui n’a pas encore de nom officiel, présentera sa toute nouvelle œuvre, « Four Fathers », les 1er et 2 avril, au Centre Suzanne Dellal pour la danse et le théâtre de Tel Aviv.

Le chorégraphe Michal Samama a créé cette œuvre pour quatre danseurs – Talia Paz, Sharon Zuckerman Weiser, Moshe Shechter Avshalom et Tamar Shelef – à partir de l’histoire de leurs pères respectifs. Il utilise le langage des corps, les mots, les sons, les chansons, les costumes et même les graines de tournesol pour incarner les pères de ces quatre danseurs. Cela fait partie de l’ADN de cette compagnie qui se veut le foyer artistique des danseurs de plus de 40 ans, explique Paz, qui a cofondé et dirige la compagnie avec Shechter Avshalom.

Talia Paz, Sharon Zuckerman Weiser, Moshe Shechter Avshalom et Tamar Shelef interprètent « Four Fathers » au centre Suzanne Dellal les 1er et 2 avril 2025 (Yair Meyuchas)

« Il y a beaucoup de danseurs déjà âgés qui continuent à faire de la chorégraphie et danser », explique Paz à l’issue d’une répétition, il y a peu. « L’idée n’est pas d’avoir une chorégraphe qui crée et invite des danseurs à présenter son travail, mais que l’initiative vienne des danseurs eux-mêmes. »

« Il me manquait un foyer artistique », ajoute Paz. « Quelque part où je puisse être avec des gens qui ont vécu un peu les mêmes choses que moi. »

Les quatre danseurs et Samama terminaient une répétition, jeudi, dans l’un des studios du centre Suzanne Dellal, dont les fenêtres cintrées ouvrent sur les toits de tuiles rouges du quartier de Neve Tzedek.

Shechter Avshalom – ou plutôt son personnage – venait de disperser des graines de tournesol que lui et d’autres danseurs ramassaient ensemble. Subtil rappel qu’il s’agit là d’un collectif d’adultes qui travaillent ensemble.

« Nous avons en commun le sens du temps qui passe et aussi l’expérience, mais cette danse nous permet de continuer à apprendre des choses sur le plan professionnel, dans cet espace commun », souligne-t-il.

Shechter Avshalom explique avoir commencé à envisager l’idée il y a de cela environ quatre ans, après avoir fêté ses 40 ans. Lui qui enseigne la danse et la chorégraphie au sein de plusieurs troupes s’est demandé ce qui l’intéresserait en tant qu’interprète.

Moshe Shechter Avshalom, à l’extrême gauche, le chorégraphe Michal Samama, Talia Paz, Sharon Zuckerman Weiser et Tamar Shelef interprètent « Four Fathers » au centre Suzanne Dellal les 1er et 2 avril 2025 (Yair Meyuchas)

Shelef, qui a vécu à Paris pendant l’essentiel de ces 30 dernières années, explique avoir été attirée par cette compagnie en particulier et par l’opportunité de se trouver en Israël pendant la guerre, pour être près des siens.

Zuckerman Weiser avait déjà travaillé avec Shechter Avshalom et l’opportunité de le refaire lui a plu.

« Il n’y a pas beaucoup de gens avec qui j’aimerais danser, mais ce projet là m’a paru intéressant », dit-elle. « Nous avons tous une mentalité et une expérience similaire avec la parentalité et la vie – des vies pourtant très différentes. »

Et à chacun ses maux et ses douleurs, ajoute Zuckerman Weiser.

« C’est difficile parce que cette oeuvre montre ce que nous ne pouvons plus faire aussi facilement, que nous devons faire avec notre corps », confie-t-elle.

« C’est vrai », confirme Paz, « chacun de nous a quelque chose qui lui fait mal, ou quelque chose qu’il ne peut plus faire, comme se mettre à terre, ou se coucher de telle ou telle manière. »

Près de 16 années séparent le cadet de l’aîné de ces quatre danseurs : Shechter Avshalom, le bébé du groupe, a 44 ans tandis que son aîné, Shelef, en a 60.

« Il y a des différences entre nous », dit Paz.

« Mais il y a aussi beaucoup de force dans tout ça », ajoute Shechter Avshalom. « C’est très puissant pour moi de travailler avec un collectif qui a une telle expérience et une telle profondeur artistique. »

La compagnie donnera d’autres représentations après les deux avant-premières des « Quatre Pères », mais ses membres changeront à chaque nouvelle production.

« À chaque fois, nous chercherons le mélange parfait pour l’oeuvre en question », affirme Paz. « C’est notre goût de l’inattendu, de la surprise et notre curiosité qui nous poussent. Ce n’est pas tant l’âge qui compte, sinon le qui et le quoi. »