Le nouveau président de l’Uruguay est de gauche, mais pas anti-Israël

JTA – À l’instar de beaucoup de ses homologues latino-américains, le nouveau président uruguayen est de gauche. Mais Yamandù Orsi, qui a remporté de justesse le second tour de l’élection dimanche, se distingue au moins sur un point : il n’a jamais attaqué Israël.

Gustavo Petro en Colombie, Gabriel Boric au Chili et Luiz Inácio Lula da Silva au Brésil sont tous de fervents critiques d’Israël ; certains ont même rompu leurs relations diplomatiques avec Israël en raison de la guerre menée contre le groupe terroriste palestinien Hamas à Gaza suite au pogrom du 7 octobre 2023. L’ancien président uruguayen José « Pepe » Mujica, mentor d’Orsi, est également un critique virulent d’Israël.

En revanche, Orsi avait exprimé son admiration pour la société multiculturelle d’Israël lors d’une visite l’année dernière, et a réitéré ces sentiments ce mois-ci, peu avant l’élection, suggérant même qu’il pourrait s’identifier comme sioniste. Il affirme soutenir le droit d’Israël à exister tout en soutenant la création d’un État palestinien.

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« Sur le boulevard, on voit des gens des deux religions », avait déclaré Orsi à un représentant de la communauté juive à Tel Aviv en septembre 2023. « C’est ce qui me surprend le plus, pour être honnête. Il y a ici une partie de la réalité qui est plus axée sur la coexistence que l’autre. C’est donc possible. »

Orsi participait alors à un voyage organisé par le Comité central israélite d’Uruguay et le Congrès juif latino-américain, en compagnie de représentants de ces groupes juifs, dans le cadre d’un itinéraire axé sur la science et l’innovation. Orsi, alors maire de la région uruguayenne de Canalones, a également visité des sites incontournables, dont Yad Vashem, le mémorial israélien de la Shoah.

« Je suis professeur d’histoire et j’ai donné des cours sur la Seconde Guerre mondiale et l’impact de la Shoah », avait déclaré Orsi lors d’une seconde interview à son retour. « Le guide nous a montré et expliqué des aspects que je ne connaissais pas du tout et qui, naturellement, m’ont choqué. »

Illustration : Le président Luiz Inacio Lula da Silva (à droite) posant pour une photo avec le président colombien Gustavo Petro, au palais du Planalto, à Brasilia, au Brésil, le 1er janvier 2023. (Crédit : Eraldo Peres/AP)

Orsi a été critiqué par les gauchistes anti-Israël de sa coalition, le Front large, pour s’être rendu en Israël quelques semaines avant le pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre en cours à Gaza. Lors de cet assaut barbare et sadique, quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël, tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevé 251 otages de tous âges, et commis de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle.

Il a également été critiqué par les Uruguayens pro-Israël pour un message publié sur le réseau social X pendant son séjour, dans lequel il soulignait les écarts de revenus entre les Israéliens et les Palestiniens de Gaza.

« Ma stratégie, c’est le dialogue. Je peux comprendre qu’ils veuillent imposer leur veto ou qu’ils attendent une sorte de pureté idéologique de mes actions », a déclaré Orsi à l’intervieweur à propos des critiques de gauche. « Il est clair que ce n’est pas ma voie. Le dialogue et la paix, la paix et le dialogue, je n’y renoncerai pas, pas plus qu’à la liberté d’exprimer son opinion. »

La campagne d’Orsi s’est concentrée sur l’environnement et l’économie, et la question d’Israël n’a pas occupé une place prépondérante dans le discours électoral. Cependant, juste avant le second tour de l’élection, il a longuement parlé d’Israël sur les ondes d’une importante personnalité de la radio uruguayenne.

L’interviewer, Orlando Petinatti, est juif et pro-Israël ; son émission, « Bad Thoughts », diffusée depuis 1991, est le programme radio uruguayen le plus populaire. Orsi a indiqué qu’il était d’accord avec l’affirmation de Petinatti selon laquelle il n’y a « pas d’apartheid » en Israël, rappelant qu’il avait observé des joueurs arabes dans l’équipe israélienne que l’Uruguay avait battue lors d’un match au cours de son voyage.

Orsi a également déclaré qu’il se qualifierait de sioniste selon la définition de Petinatti : « En faveur de la création d’un État pour le peuple juif sur la Terre d’Israël. » Il a toutefois ajouté que cette définition devrait s’accompagner de dispositions accordant des droits égaux aux minorités religieuses.

« J’aime le sionisme et j’aime aussi que la cause palestinienne aboutisse à la création d’un État », a-t-il ajouté. « Cela dit, je suis favorable au droit d’Israël d’exister, mais je ne suis pas toujours d’accord avec les actions du gouvernement israélien. »

Selon le Congrès juif latino-américain, l’Uruguay compte environ 15 000 Juifs, sur une population totale de 3,4 millions d’habitants. Si la plupart vivent dans la capitale, Montevideo, la ville côtière de Punta del Este abrite également une communauté juive en plein essor. L’Uruguay est le premier pays d’Amérique du Sud à avoir reconnu officiellement l’État d’Israël et a accueilli la première ambassade israélienne en Amérique latine, établie en 1948, année de la création de l’État d’Israël.

Javier Mileï, alors candidat à la présidence, tenant un drapeau israélien lors de son meeting de campagne, à Lomas de Zamora, en Argentine, le 16 octobre 2023. (Crédit : Natacha Pisarenko/AP)

Le mandat d’Orsi commence en mars et dure cinq ans. Il remplace un homme politique de centre droit, qui constituait la seule rupture dans la direction du Front large depuis 2005.

Considéré comme la démocratie la plus stable d’Amérique latine, l’Uruguay a vu 90 % des électeurs éligibles voter à chaque tour des élections de cette année. Son voisin à l’ouest, l’Argentine, est le plus grand pays de la région avec un président de droite : Javier Mileï est un fervent pro-Israël et réorganise la politique étrangère de son pays après une période de leadership de gauche, dans le but de rapprocher l’Argentine des États-Unis et d’Israël.

Le Paraguay, au nord de l’Argentine, a également un président de droite et favorable à Israël. Élu l’année dernière, Santiago Peña est en train de ramener l’ambassade de son pays à Jérusalem, après que son prédécesseur, un libéral, l’a déplacée à Tel Aviv, provoquant une crise diplomatique. Pena prévoit de se rendre en Israël la semaine prochaine pour inaugurer l’ambassade de Jérusalem.