L’Estonie fustige une université ayant coupé ses liens avec une institution israélienne

JTA – Une université estonienne a coupé ses liens avec une université israélienne, déclenchant une série de critiques de la part du gouvernement et de pressions de la part de son conseil d’administration.

Le recteur de l’Académie estonienne des arts (EKA), Mart Kalm, a déclaré que la décision de rompre les liens serait réexaminée. Il a également affirmé que les détracteurs de cette décision avaient mal interprété une « question technique » à des fins idéologiques.

« Je dois m’excuser pour ma formulation imprécise, qui a bouleversé les gens et suscité des malentendus », a déclaré Kalm lors d’un journal télévisé estonien.

Ce tollé a éclaté après que l’EKA a annulé, la semaine dernière, un atelier d’anthropologie du design avec un professeur israélien invité. Cet atelier était prévu pour février et devait être animé par Jonathan Ventura, professeur au Shenkar College de Tel Aviv.

L’EKA a également déclaré qu’elle n’avait plus de partenariat avec des universités israéliennes ou palestiniennes, en raison des « sentiments internationaux et internes difficiles » suscités par la guerre menée par Israël contre le groupe terroriste palestinien du Hamas dans la bande de Gaza. Dans un communiqué publié mardi, l’université a déclaré qu’elle « compatissait avec tous ceux qui souffrent de la guerre actuelle ».

Le communiqué ajoute que « l’EKA souhaite offrir un environnement d’étude, de travail et de création sûr à ses membres, étudiants et personnel, indépendamment de leur âge, de leur religion ou de leur vision du monde ».

L’Académie estonienne des arts. (Crédit : Wikipedia/Tõnu Tunnel/Domaine public)

Le Premier ministre estonien, Kristen Michal, a rejeté cette décision lors d’une conférence de presse.

« Je pense que l’académie devrait reconsidérer sa décision », a déclaré Michal.

Il a été rejoint par Margus Tsahkna, le ministre des Affaires étrangères, qui a déclaré que l’EKA avait fait « un pas dans la mauvaise direction » compte tenu des relations amicales qu’entretient l’Estonie avec Israël. (Lorsque le pays a récemment soutenu une résolution des Nations unies appelant Israël à mettre fin à son contrôle des Territoires palestiniens, le groupe parlementaire d’amitié Estonie-Israël au Riigikogu, ou Parlement, a qualifié cette décision d’écart regrettable par rapport à la norme).

Tsahkna a également encouragé le conseil de l’université, qui fonctionne selon un modèle similaire à celui d’un conseil d’administration aux États-Unis, à intervenir dans la décision. C’est ce qu’il a fait lors d’une réunion qui s’est tenue mardi.

« Le conseil a conseillé au recteur, ainsi qu’à ses collègues, d’examiner à nouveau cette question, qui est devenue beaucoup plus importante, et de peser le pour et le contre », a déclaré la présidente du conseil de l’EKA, Maria Mägi-Rohtmets.

Avant de déclarer qu’il réexaminerait la décision, Kalm a affirmé aux médias estoniens que la décision de l’EKA correspondait à « la plupart des universités d’art en Europe ». Au début de l’année, de nombreux établissements d’enseignement supérieur européens ont rompu leurs liens avec des institutions israéliennes ou ont accepté de se désinvestir d’entreprises liées à Israël, à la suite de manifestations d’étudiants contre les actions d’Israël à Gaza au cours de la guerre menée contre le Hamas.

Kalm a également déclaré qu’il avait correspondu avec des établissements israéliens qui avaient « exprimé leur compréhension » en se fondant sur les sentiments d’opposition à la guerre à Gaza à l’échelle internationale.

Ventura, le professeur israélien dont l’atelier a été annulé, a déclaré à la presse qu’il souhaitait éviter une flambée de tensions, qu’il a dit avoir déjà vécue dans des universités suisses.

Certains membres de la communauté juive d’Estonie ont joint leurs critiques à celles adressées à l’EKA. Le pays compte environ 2 000 Juifs.

Alla Jakobson, présidente de l’organe communautaire juif d’Estonie, a déclaré qu’il était « inacceptable » de mettre fin aux relations avec les universitaires et les étudiants israéliens pour des « raisons politiques » et a accusé l’université de contribuer à un environnement propice à l’antisémitisme.

« Cette décision envoie un signal inquiétant qui sape les liens universitaires et culturels entre l’Estonie et Israël », a déclaré l’organisme communautaire dans un communiqué.

« Elle est également contraire aux principes de liberté académique, d’échange international de connaissances et de dialogue culturel, ainsi qu’aux engagements pris par l’État estonien lorsqu’il a signé la définition de l’antisémitisme de l’International Holocaust Remembrance Alliance en 2007. »