Ben Cohen, de Ben & Jerry’s, dit à Tucker Carlson : « J’aime Jésus-Christ »

JTA — Il y a de cela quatre ans, lorsque les fondateurs de Ben & Jerry’s prenaient la parole dans le New York Times pour expliquer le boycott, par leur marque, des implantations de Cisjordanie, les premières lignes de leur éditorial annonçaient : « Nous sommes les fondateurs de Ben & Jerry’s. Nous sommes par ailleurs juifs, et fiers de l’être. »

Pour l’un d’entre eux au moins, la donne pourrait avoir sensiblement changé.

Ben Cohen, le Ben de « Ben & Jerry’s », a été l’invité du talk-show de Tucker Carlson cette semaine, l’occasion pour lui de parler de son opposition à l’implication des États-Unis dans la guerre en Ukraine et au budget tentaculaire du Pentagone, questions sur lesquelles ses idéaux progressistes tant vantés sont susceptibles de rencontrer ceux de Carlson, manifestement d’extrême droite.

C’est à la toute fin de l’heure d’émission que Carlson a interrogé Cohen sur ses « croyances spirituelles ».

« Sur le plan spirituel, je ne suis pratiquant d’aucune religion », a répondu Cohen. « Je suis né juif. J’aime Jésus-Christ. Je pense que ses paroles sont merveilleuses, incroyables. Cela m’attriste que tant de mouvements chrétiens ne respectent pas vraiment les paroles de Jésus-Christ. »

Ce à quoi il a ajouté : « Si nous respections les paroles de Jésus-Christ et réfléchissions au Sermon sur la montagne, si nous prenions ses propos vraiment au sérieux, nous n’en serions pas là. »

Situé dans l’Évangile selon Matthieu, dans le Nouveau Testament, le Sermon sur la montagne rapporte des paroles de Jésus sur la morale.

Les inclinations religieuses de Cohen sont importantes parce que Carlson s’est bâti une réputation en invitant à son micro des antisémites, à commencer par un révisionniste de la Shoah. Elles sont également importantes parce que Cohen et son cofondateur, Jerry Greenfield, ont publiquement fait état de leur judéité pour défendre le boycott de leur entreprise en 2021.

Ce boycott avait suscité une large opposition de la part d’organisations juives du centre et de la droite, sans compter celle, légale, des autorités de l’État, prémices d’une bataille judiciaire qui aura duré plusieurs années. Cohen et Greenfield – qui ont tous deux fréquenté les bancs de l’école hébraïque de Long Island – ont revendu leur société à Unilever il y a de cela des dizaines d’années et ne la contrôlent plus, même si Cohen a parlé il y a peu d’un possible rachat.

« Le fait que nous soutenions la décision de l’entreprise n’est ni une contradiction ni un acte antisémite », ont écrit les deux hommes dans leur éditorial publié dans les pages du Times. « Nous pensons que cet acte peut et doit être considéré comme de nature à faire progresser les concepts de justice et de droits de l’homme, des principes au coeur du judaïsme. » Avant d’écrire : « En tant que partisans juifs de l’État d’Israël, nous rejetons fondamentalement l’idée qu’il soit antisémite de remettre en question les politiques de l’État d’Israël. »

L’émission de Carlson, diffusée lundi, pose par ailleurs question sur l’appartenance de Cohen aux partisans d’Israël. L’essentiel de l’interview a porté sur l’Ukraine et le budget de la défense des États-Unis, mais vers la fin de l’émission, en parlant des raisons pour lesquelles il pensait que « nous nous acheminons vers une guerre » en Iran, Cohen a évoqué Israël.

« Il semble qu’il y ait une relation étrange entre Israël et les États-Unis en vertu de laquelle les États-Unis fournissent à Israël les armes pour son génocide », a déclaré Cohen. « On m’explique qu’Israël veut un plus grand Israël. Je ne sais pas grand-chose là-dessus. » (Le terme « grand Israël » fait généralement référence au contrôle d’Israël sur certains territoires tels que la Cisjordanie ou encore Gaza, et non à son conflit régional avec l’Iran.)

En réponse à une question plus tardive, il a déclaré : « À l’heure actuelle, être américain, c’est être le plus grand exportateur d’armes au monde, avoir la plus grande armée du monde, soutenir le massacre des gens de Gaza et arrêter ceux qui protestent contre le massacre des populations de Gaza. Quelle est l’image de notre pays ? »

Ce n’est pas la première fois cette année que Cohen accuse Israël de « génocide » dans le cadre de sa guerre contre le Hamas à Gaza, ce qu’Israël rejette vigoureusement.

En mars dernier, il a notamment déclaré : « Le soutien des États-Unis à ce génocide foule aux pieds ce qui fait l’âme-même de l’Amérique », ajoutant à cela : « Ce n’est pas une guerre, c’est un massacre. Je ne pense pas qu’il y ait une grande différence entre une personne tuée par une bombe et une autre tuée dans une chambre à gaz. »

Dans son interview de lundi, Carlson n’est pas revenu sur les déclarations de Cohen à propos d’Israël mais il a approuvé l’éloge fait de Jésus par Cohen.

Cohen a par ailleurs commencé à promouvoir un site Internet créé en soutien au DOGE qui, sous la conduite d’Elon Musk, a d’ores et déjà conduit à la suppression de services entiers du gouvernement fédéral, à commencer par de grands programmes humanitaires de rayonnement mondial. La demande de commentaire faite via ce site Internet, dont Cohen fait la publicté sur son compte X, n’a pas donné lieu à réponse.