2 écoles juives de NY fermées pour non-conformité avec les normes d’enseignement laïc

JTA — Le département de l’Éducation de l’État de New York a décidé de mettre fin au financement public de deux écoles juives talmudiques de Brooklyn et a ordonné aux parents de trouver d’autres solutions éducatives pour leurs enfants l’année prochaine, invoquant le non-respect par ces écoles des normes d’éducation laïque.

Il s’agit de la série de conséquences la plus importante à laquelle a été confrontée une école dans le cadre du conflit en cours entre les responsables de l’éducation et les institutions orthodoxes à New York au sujet des lois exigeant que les écoles talmudiques, comme toutes les écoles, respectent les normes dans les matières de base telles que l’anglais et les mathématiques. Après des années de batailles devant les tribunaux, dans les couloirs du gouvernement et sur la place publique, c’est la première fois que l’État fait fermer une école orthodoxe.

Les deux écoles se trouvent à Williamsburg, berceau de la communauté hassidique Satmar. Il s’agit de la Yeshiva Bnei Shimon Yisroel de Sopron, qui gère deux écoles pour des groupes d’âge différents, et du Talmud Torah de Kasho. Selon le département de l’Éducation, elles ont été informées des décisions d’exécution le 11 février après avoir ignoré les derniers avertissements émis en décembre.

D’ici le 1er juillet, les parents doivent trouver « un autre cadre éducatif approprié » pour leurs enfants et faire part de leur choix aux autorités, selon un modèle de lettre que le département de l’Éducation a fourni aux écoles pour distribution. Trois options étaient proposées : une autre école religieuse, une école publique ou l’instruction à domicile.

Le modèle de lettre, qui existe également en yiddish, indique que les écoles ne recevront plus de fonds publics pour les cantines, le transport, les manuels scolaires ou d’autres services après le 30 juin.

Le Talmud Torah de Kasho n’a pas répondu à une demande de commentaire. Rosa Friedman, la directrice de la Yeshiva Bnei Shimon Yisroel de Sopron, a déclaré dans une réponse à un courriel de la Jewish Telegraphic Agency ne « rien faire d’illégal ». Elle n’a pas répondu aux questions complémentaires.

Le conflit remonte à une dizaine d’années, lorsqu’un groupe d’anciens élèves de ces écoles a signalé aux autorités gouvernementales que leur scolarité s’était concentrée presque exclusivement sur l’instruction religieuse, les laissant non préparés à la vie adulte. Les plaintes ont conduit à des enquêtes sur des dizaines d’écoles juives talmudiques, ainsi qu’à une série d’articles très médiatisés dans le New York Times sur les allégations de normes éducatives inférieures aux normes dans les écoles talmudiques de New York.

À la suite de l’enquête du Times, en 2023, les responsables de l’éducation avaient constaté que 18 écoles ne proposaient pas un enseignement « substantiellement équivalent » à celui proposé par les écoles publiques, ce qui représente une petite fraction des écoles juives talmudiques de la ville. La plupart ont accepté un processus de médiation, à l’exception des deux qui font maintenant l’objet de sanctions.

Les dirigeants orthodoxes ont longtemps qualifié l’application par le gouvernement de normes laïques d’attaque contre leur communauté et d’empiètement sur leur droit d’élever leurs enfants selon les traditions religieuses, tout en défendant leur système éducatif comme étant rigoureux et supérieur, dans l’ensemble, à ce qui est proposé par les écoles publiques.

Plusieurs groupes qui défendent généralement l’enseignement dans les écoles juives talmudiques dans les médias n’ont pas répondu aux demandes de commentaires ou ont refusé de s’exprimer sur l’affaire.

Parallèlement, les défenseurs de l’éducation laïque, dont beaucoup ont grandi dans des familles ultra-orthodoxes et fréquenté des écoles juives talmudiques, ont fait pression sur l’État pour qu’il agisse. L’un des principaux groupes à l’origine de cette initiative est Young Advocates for Fair Education, ou YAFFED, qui a informé JTA et d’autres médias des avis d’exécution après une réunion d’information privée avec le département de l’Éducation.

Un panneau d’affichage de YAFFED devant une yeshiva, exhortant les parents à penser à l’éducation laïque de leurs fils. (Crédit : Yaffed)

« Ces lettres constituent une action sans précédent et attendue depuis longtemps pour garantir que tous les enfants reçoivent l’éducation à laquelle ils ont droit en vertu de la loi de l’État de New York », a déclaré Adina Mermelstein Konikoff, directrice exécutive de YAFFED, dans un communiqué. « Les enfants de ces écoles se voient refuser une éducation de base, ne reçoivent que peu ou pas d’enseignement dans les matières laïques, ce qui les laisse mal préparés à la vie après l’obtention de leur diplôme. »

L’enseignement dans les écoles juives talmudiques est devenue un sujet important dans la politique new-yorkaise, et pourrait gagner en importance à l’approche des primaires démocrates pour la mairie en juin, dans lesquelles les électeurs hassidiques pourraient jouer un rôle important. La décision de l’État intervient également alors que le maire Eric Adams fait face à des appels de plus en plus nombreux à la démission en raison de son inculpation pour corruption, que l’administration Trump cherche à faire rejeter.

Adams a défendu l’instruction dispensée dans les écoles juives talmudiques par le passé. En 2023, il a déclaré que ces écoles talmudiques « fournissent une éducation de qualité qui est bénéfique pour nos enfants », et a appelé les autres écoles à « s’inspirer de ce qui se fait dans les écoles talmudiques pour améliorer l’éducation ».

L’un des candidats qui le défiait, en revanche, le contrôleur Brad Lander, a déclaré en 2021 à propos des écoles juives talmudiques que toutes les écoles « ont l’obligation de dispenser un enseignement laïque substantiellement comparable et compétent, en particulier lorsque la ville passe des contrats avec ces écoles pour le transport et les livres ».

L’autorité du gouvernement d’ordonner aux parents de retirer leurs enfants des écoles non conformes est contestée devant les tribunaux par Parents for Educational and Religious Liberty in Schools, ou PEARLS, un groupe de défense des écoles juives talmudiques. En 2023, un tribunal de première instance a jugé que l’État avait outrepassé son autorité, mais une cour d’appel a annulé la décision.

L’affaire doit maintenant être examinée par la plus haute juridiction de New York.

Un membre de la police de New York patrouillant devant une synagogue, dans le quartier de Williamsburg, à Brooklyn, à New York, le 13 octobre 2023. (Crédit : Stephanie Keith/Getty Images/AFP)

PEARLS n’a pas répondu à une demande de commentaire sur l’ordonnance du département de l’éducation de l’État.

Par ailleurs, une semaine avant l’entrée en fonction de la nouvelle administration Trump, PEARLS a déposé une plainte fédérale pour discrimination contre les agences éducatives de la ville et de l’État au nom de quatre écoles talmudiques. La plainte décrit une série d’actions des agences qui interféreraient avec l’autonomie des écoles en matière de programmes et d’embauche.

« Prises dans leur ensemble, ces pratiques discriminatoires priveraient les écoles juives talmudiques de leur caractère juif essentiel », indique la plainte.

Le bureau des droits civiques du département américain de l’Éducation n’a pas encore annoncé d’enquête sur les allégations contenues dans les plaintes, mais l’administration Trump a précédemment déclaré qu’elle accorderait la priorité à la fois à la protection de la liberté religieuse et à la lutte contre l’antisémitisme dans ses politiques éducatives.