Harris rejette les allégations selon lesquelles la judéité de Shapiro et son soutien à Israël ont influencé son choix

WASHINGTON — Est-il étrange que Kamala Harris ait choisi Tim Walz comme colistier plutôt que Josh Shapiro ?

Dès que la vice-présidente a annoncé mardi que le gouverneur du Minnesota serait son colistier, les détracteurs de ce choix ont suggéré qu’elle avait écarté le gouverneur de Pennsylvanie en raison de sa judéité.

« Harris a-t-elle rejeté Shapiro uniquement parce que les progressistes n’aiment pas qu’il soit juif ? », a tweeté Alan Dershowitz, l’avocat qui se dit démocrate, mais qui a souvent défendu Donald Trump.

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Maury Litwack, cadre au sein de l’Orthodox Union, qui se concentre sur les politiques éducatives, a tweeté : « Démocrates : on peut se réjouir du choix de Walz mais aussi être triste qu’une campagne carrément antisémite ait été menée contre Shapiro. Un examen de conscience s’impose ».

L’équipe de campagne de Harris a rejeté les allégations selon lesquelles elle aurait cédé à la campagne progressiste anti-Shapiro qui a pris de l’ampleur la semaine dernière. Dans une déclaration à la Jewish Telegraphic Agency, un collaborateur de Harris a rejeté l’accusation selon laquelle la foi ou les positions de Shapiro sur Israël auraient été prises en compte.

« Les affirmations laissant entendre que la vice-présidente Harris n’a pas choisi le gouverneur Shapiro en raison de sa religion ou de ses opinions sur Israël sont absolument ridicules et offensantes », a déclaré un assistant.

« La vice-présidente Harris a un engagement inébranlable envers la sécurité d’Israël, comme elle l’a réaffirmé hier soir à la suite de la réunion dans la ‘Situation Room’, où elle et le président Joe Biden ont participé à un briefing sur les plans iraniens d’attaque d’Israël », a déclaré le conseiller. « Elle combattra toujours l’antisémitisme, où et quand elle le verra. »

Les experts – juifs et non juifs – ont débattu du rôle éventuel de l’identité juive de Shapiro dans le choix de Harris de ne pas le sélectionner. Bien que tous les principaux candidats soient pro-israéliens, les progressistes ont cherché à dépeindre Shapiro comme trop favorable à l’Etat hébreu et intolérant à l’égard de ses détracteurs, et certains ont été jusqu’à le surnommer « Genocide Josh ».

La vice-présidente américaine Kamala Harris et le gouverneur de Pennsylvanie Josh Shapiro s’adressant à la presse lors d’une halte au Reading Terminal Market, à Philadelphie, en Pennsylvanie, le 13 juillet 2024. (Crédit : Ryan Collerd/AFP via Getty Images via JTA)

Les républicains ont profité de la nomination de Walz pour dépeindre les démocrates comme étant antisémites. Mais si les démocrates juifs se sont inquiétés de l’antisémitisme des détracteurs de Shapiro, ils se sont rangés derrière Walz et ils ont réfuté l’idée que l’antisémitisme avait joué un quelconque rôle dans la décision.

De nombreux commentateurs ont rappelé que le mari de Kamala Harris, Doug Emhoff, est juif.

« Plusieurs choses peuvent être vraies : certaines voix extrêmes ont ciblé Shapiro. Et Harris – qui est mariée à un Juif et le met fièrement en avant – a retenu Walz parce qu’elle pensait qu’il était un meilleur choix », a tweeté Amy Spitalnick, PDG du Jewish Council for Public Affairs, qui avait lacéré la campagne anti-Shapiro et dont le groupe s’allie fréquemment aux progressistes.

La branche juive officielle du parti démocrate a fait remarquer que Walz, comme la plupart des responsables démocrates, est un fervent partisan d’Israël.

De gauche à droite : Doug Emhoff, candidat démocrate à la présidence, Kamala Harris, candidate démocrate à la vice-présidence, Tim Walz, candidat démocrate à la vice-présidence, et sa femme Gwen Walz saluent les partisans lors d’un rassemblement de campagne au Girard College le 6 août 2024 à Philadelphie, en Pennsylvanie. (Crédit : Andrew Harnik / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP)

« L’idée que [la vice-présidente] n’a pas choisi le gouverneur Shapiro en raison de sa position sur Israël est ridicule », a déclaré Halie Soifer, présidente du Jewish Democratic Council of America, dans un tweet. « Kamala Harris et le gouverneur Walz partagent le soutien sans faille du gouverneur Shapiro à l’égard d’Israël. C’est la position de notre parti, et si quelqu’un a des doutes, qu’il consulte la plateforme du parti démocrate ».

Les républicains ont déclaré que le fait que Walz et Shapiro étaient sur la même longueur d’onde sur Israël était précisément la raison pour laquelle le choix était antisémite.

« Les opinions de Shapiro et de Walz sur Israël ne sont pas si différentes », a analysé dans un tweet Tom Cotton, sénateur de l’Arkansas. « Mais Harris s’est pliée à sa base pro-Hamas et antisémite qui rejette Shapiro parce qu’il est Juif. »

Outre la déclaration de la campagne de Harris, Shapiro lui-même a laissé entendre que ses opinions sur Israël et son identité juive n’avaient pas été prises en compte dans la décision. Dans sa déclaration suite à la nomination de Walz, Shapiro a laissé entendre qu’il n’était pas tout à fait prêt à quitter son poste, dans lequel il est extrêmement populaire, après seulement 18 mois. Politico a également rapporté qu’il était ambivalent à l’idée de terminer prématurément son mandat.

Josh Shapiro, accompagné de son épouse Lori, se rend à une cérémonie pour prêter serment en qualité de 48e gouverneur de Pennsylvanie au Capitole de l’État à Harrisburg, en Pennsylvanie, le 17 janvier 2023. (Crédit : AP Photo/Matt Rourke)

« Les Pennsylvaniens m’ont élu pour un mandat de quatre ans en tant que gouverneur, et mon travail ici est loin d’être terminé », a-t-il déclaré. Lors d’un rassemblement à Philadelphie plus tard dans la journée pour présenter Walz, Shapiro a déclaré qu’il était « fier de sa foi ».

Outre la politique israélienne, les détracteurs de Shapiro ont relevé des éléments allant de sa position sur les bourses scolaires à son examen d’une affaire de 2011 impliquant la mort d’une femme. Parmi ses opposants, on trouve également des partisans d’Israël : le sénateur de Pennsylvanie John Fetterman, l’un des démocrates pro-israéliens les plus affirmés à Washington, a également mis en garde contre le gouverneur, et il a affirmé que Shapiro était essentiellement motivé par son ego.

Les militants qui avaient mené la campagne contre Shapiro ont célébré le choix de Walz comme une victoire et ont déclaré qu’ils espéraient qu’il serait un signe avant-coureur de l’intensification des critiques de Harris à l’égard d’Israël.

« Je pense qu’il s’agit clairement d’une victoire pour ceux d’entre nous qui ont mis en avant les antécédents de Shapiro au sujet d’Israël. Je suis conscient que Walz (et Harris) sont loin d’avoir un bilan parfait », a tweeté David Klion, l’écrivain juif qui a été l’une des voix les plus proéminentes à s’opposer à Shapiro. « Mais je pense que nous avions le droit de souligner l’engagement profond de Shapiro envers Israël tout au long de sa vie. »

Le gouverneur de Pennsylvanie, Josh Shapiro, prononce une allocution lors de la cérémonie d’inauguration du nouveau complexe Tree of Life de Pittsburgh, le dimanche 23 juin 2024. La nouvelle structure remplace la synagogue Tree of Life dans laquelle 11 fidèles ont été assassinés en 2018, dans l’acte antisémitie le plus meurtrier de toute l’histoire des États-Unis. (AP/Rebecca Droke)

« Dear White Staffers », un compte Instagram anonyme qui a contribué au lancement de la pétition « No Genocide Josh », a publié une photo de Walz berçant un porcelet et souriant.

« Réjouissez-vous aujourd’hui et ne cédez rien », peut-on lire sur le compte d’un collaborateur de la représentante de Pennsylvanie, Summer Lee, qui est une critique acharnée d’Israël. « Il ne faut rien lâcher. Nous avons réussi. Il nous a fallu tout le monde ».

Certains progressistes du Minnesota ont reconnu que le bilan de Walz sur Israël ne correspondait pas à ce qu’ils attendaient d’un candidat à la vice-présidence, mais ils ont dit espérer qu’il pourrait changer. « Le gouverneur Walz a fait preuve d’une remarquable capacité à évoluer en tant que leader public », a déclaré Elianne Farhat, directrice exécutive de Take Action Minnesota et conseillère principale de Uncommitted, un mouvement visant à faire pression sur le Parti démocrate pour qu’il se défasse de son soutien à Israël. « Bien que ses positions passées en tant que membre du Congrès aient pu entrer en conflit avec les électeurs anti-guerre, nous espérons qu’il pourra évoluer sur cette question comme il l’a fait sur d’autres, par exemple en passant d’une note A à une note F de la part de la NRA ».

Nathan Diament, directeur de l’Orthodox Union à Washington, un groupe dont les électeurs penchent pour les Républicains, a déclaré qu’il était satisfait du choix et des considérations de Harris, mais qu’il avait hâte que l’équipe de campagne de cette dernière s’exprime.

Des manifestants anti-Israël défilent entre l’hôtel de ville de Philadelphie et le campus de l’Université de Drexel où ils ont installé un campement à Philadelphie, en Pennsylvanie, le 18 mai 2024. (Matthew Hatcher / AFP)

« Les extrémistes crient déjà victoire et elle doit s’y opposer », a-t-il déclaré. « C’est la bonne chose à faire et il y a un impératif politique à le faire ». Diament a souligné l’importance de la population juive en Pennsylvanie : un revirement au sein de l’électorat juif pourrait déterminer la répartition des voix des grands électeurs de l’État.

Van Jones, un commentateur de CNN proche de Harris, a également déclaré que le parti devait faire un bilan interne en raison du sectarisme qui s’est manifesté au cours de la campagne contre Shapiro.

« L’antisémitisme s’est incrusté dans ce parti. On peut être pour les Palestiniens sans être un fanatique antijuif, mais il y a des personnalités antijuives et il y a une certaine inquiétude aujourd’hui », a-t-il déclaré. « Dans quelle mesure ce qui vient de se passer est-il dû au fait que l’on a cédé à certaines des parties les plus sombres du parti ? Il va donc falloir trouver une solution. Il va falloir en parler. »

Mark Mellman, président du groupe Democratic Majority for Israel, a déclaré qu’il était absurde de prétendre que Harris, dont le mari est juif, serait réticente à l’idée d’avoir un Juif comme colistier.

« La vice-présidente Harris a déjà choisi des hommes juifs pour occuper des postes importants dans sa vie. L’idée que cette nomination puisse être antisémite est absurde à première vue », a-t-il déclaré dans une interview.

Le Second Gentleman Doug Emhoff, à gauche, pose une main sur le dos du rabbin Jeffrey Myers, de la congrégation Tree of Life et rescapé de l’attentat du 27/10, après la cérémonie d’inauguration du nouveau complexe Tree of Life, à Pittsburgh, le 23 juin 2024. (Crédit : Rebecca Droke/AP)

À l’instar de Jones, il a toutefois estimé qu’il fallait tenir compte de l’intensité de l’opposition à laquelle Shapiro a été confronté. « Il ne fait aucun doute, cependant, qu’il y a eu un niveau inquiétant d’invectives antisémites au cours de ce processus, et cela devrait être condamné par toute personne de bonne conscience ».

Toutefois, des démocrates de premier plan ont déclaré que l’idée selon laquelle les Juifs n’étaient pas les bienvenus dans leurs rangs était absurde, compte tenu du nombre de Juifs qui occupent des postes de direction au sein du parti.

Lorsque le commentateur conservateur Erick Erickson a tweeté « Aucun juif n’est autorisé au sommet du parti démocrate », il a reçu une réponse de Chuck Schumer, le chef de la majorité au Sénat, qui est l’élu juif le plus haut placé de l’Histoire.

« Merci de me l’apprendre ! », a écrit Schumer.