Face à la menace, les responsables de la sécurité juive appellent à la vigilance

Washington — En 2022, un tireur a ouvert le feu avec un fusil d’assaut dans un supermarché de la chaîne Safeway dans l’Oregon, tuant un employé et un client âgé de 84 ans.

Dans un manifeste, il a déclaré s’être inspiré d’une fusillade de masse survenue plus de vingt ans auparavant, à l’origine d’une série d’attaques meurtrières depuis lors : le massacre du lycée de Columbine, qui avait fait seize morts en 1999.

Après qu’un assaillant a tué deux employés de l’ambassade d’Israël à Washington, mercredi, les responsables de la sécurité de la communauté juive craignent que cette fusillade puisse inspirer d’autres individus. Ils ont donc exhorté la communauté à renforcer ses mesures de sécurité.

« Les tireurs actifs, ces individus qui commettent des attaques de masse, continuent de citer les auteurs de cette tuerie comme source d’inspiration pour leurs actions », a déclaré Michael Masters, directeur du Secure Community Network, un groupe de sécurité juif, à propos de Columbine.

« Le problème des attaques menées par des ‘copieurs’ est sans doute notre principale préoccupation », a poursuivi Masters.

« C’est ce qui nous inquiète. Je sais que c’est ce sur quoi nous nous concentrons, ce sur quoi nos partenaires se concentrent et ce sur quoi les forces de l’ordre se concentrent. »

Yaron Lischinsky et Sarah Milgrim. (Crédit : Autorisation)

Les analystes des services de renseignement juifs ont surveillé les discussions en ligne soutenant l’attaque, notamment les célébrations des meurtres et les appels à davantage de violence.

« Nous avons vu à maintes reprises comment une attaque pouvait être reproduite ailleurs », a déclaré Richard Priem, PDG du Community Security Service, un groupe qui forme des agents de sécurité bénévoles pour les synagogues.

Les responsables de la sécurité de la communauté juive ont appelé à la prudence avant de tirer des conclusions concernant le tireur présumé, Elias Rodriguez, dans l’attente des résultats de l’enquête menée par les forces de l’ordre. Des questions subsistent quant à sa méthode, ses liens avec d’autres personnes, la manière dont il a choisi ses cibles et les failles dans le dispositif de sécurité du Musée juif de la capitale mercredi soir.

Une chose est claire, selon Priem : ces meurtres doivent servir de « signal d’alarme ».

« Nous ne pouvons pas compter sur les autres pour nous protéger », a-t-il déclaré.

« Les vulnérabilités seront exploitées, alors n’attendons pas la prochaine [attaque]. »

Jeudi, les groupes de sécurité juifs ont publié une série de recommandations, notamment la coordination avec les forces de l’ordre, le contrôle des listes d’invités aux événements et la mise en place d’un contrôle d’accès.

Depuis la série d’attentats meurtriers qui a débuté avec le massacre de la synagogue Tree of Life en 2018, la communauté juive américaine a investi massivement dans la sécurité. Elle a notamment accordé des subventions pour renforcer la sécurité des synagogues, dispensé des entraînements de Krav Maga – art martial israélien – mis en place des centres de renseignement et recruté des agents de sécurité.

Des fleurs entourant les étoiles de David dans un mémorial de fortune devant la synagogue Tree of Life à Pittsburgh, en Pennsylvanie, le 31 octobre 2018, quatre jours après qu’un homme armé y a tué onze Juifs. (Crédit : Gene J. Puskar/AP)

Les suprémacistes blancs étaient considérés comme la principale menace violente ; le tireur de Tree of Life, par exemple, était un nationaliste blanc inspiré par des théories du complot anti-Juifs.

Les meurtres perpétrés la semaine dernière ont révélé la menace que représente l’extrême gauche, même si l’extrême droite reste un danger. Les islamistes constituent une autre menace.

« Je ne peux m’empêcher de penser que la diabolisation persistante des Israéliens et des Juifs, ainsi que la glorification des organisations terroristes, ont créé un environnement propice à ce genre d’événements », a déclaré Oren Segal, vice-président principal chargé de la lutte contre l’extrémisme et du renseignement à l’Anti-Defamation League (ADL).

« Je ne pense pas que cette fusillade change la menace que représentent les suprémacistes blancs. Malheureusement, la communauté juive est menacée par un large éventail d’acteurs malveillants », a-t-il déclaré.

Des agents de la police scientifique enquêtant sur les lieux de la fusillade meurtrière, devant le Capital Jewish Museum, à Washington, le 22 mai 2025. (Crédit : Drew Angerer/AFP)

Priem a souligné les actes terroristes passés commis par l’extrême gauche, tels que le détournement d’avion à Entebbe en 1976.

« La menace d’extrême gauche n’a jamais disparu », a-t-il rappelé.

« Al-Qaïda, État islamique, terrorisme d’État, Hezbollah, extrême droite, extrémisme local. Nous sommes menacés de toutes parts. »

La fusillade a eu lieu après une série d’attentats terroristes contre des Juifs américains qui ont révélé l’ampleur des menaces.

Au cours de l’année écoulée, un néonazi a été inculpé pour avoir planifié des attentats visant à faire un grand nombre de victimes parmi la communauté juive de New York ; un suspect a été arrêté au Canada alors qu’il tentait de se rendre à New York pour commettre une « fusillade de masse en soutien [au groupe terroriste sunnite] État islamique » dans un centre juif ; et des militants anti-Israël en possession d’explosifs ont été arrêtés à Pittsburgh.

« J’hésite à les classer sur un spectre politique, mais qu’il s’agisse de l’extrême gauche ou de l’extrême droite, la haine est très clairement présente. Elle est dirigée contre les Juifs, c’est de la haine antisémite », a poursuivi Masters.

« La réalité, c’est ce que nous avons vu hier [mercredi]. Des membres de la communauté qui aspiraient simplement à faire le bien et à vivre en paix ont perdu la vie. »