L’IA, un « game changer » pour l’avenir de la guerre, selon Eyal Zamir

Dans les dix prochaines années, les robots dotés d’intelligence artificielle (IA) domineront les champs de bataille terrestres, aériens et maritimes de la guerre moderne, a prédit mardi Eyal Zamir, directeur général du ministère de la Défense, lors du premier sommet international sur les technologies de la défense.

Dans son discours d’ouverture du sommet organisé à l’université de Tel Aviv (TAU), Zamir a souligné que les premières armées à adopter les capacités de l’IA bénéficieront d’un avantage considérable, tandis que les pays qui négligeront cet investissement révolutionnaire risquent de prendre un retard stratégique.

« L’IA n’est pas une innovation comme les autres, elle bouleverse totalement les règles du jeu », a expliqué Zamir. « Les champs de bataille de demain verront des essaims d’unités de combat mixtes où hommes et systèmes sans pilote combattront ensemble, ainsi que des unités entièrement autonomes capables de prendre leurs propres décisions et d’opérer de manière coordonnée. »

« D’ici dix à quinze ans, voire plus tôt, les robots IA terrestres, aériens et maritimes domineront un champ de bataille totalement interconnecté », a-t-il ajouté.

Zamir a insisté sur la nécessité pour Israël « d’intégrer ces nouvelles capacités afin d’être plus efficace et de sauver des vies ».

Le sommet, dirigé par la Direction de la défense, de la recherche et du développement du ministère de la Défense (connue sous l’acronyme MAFAT en hébreu) et le Centre de recherche en cyberespace Blavatnik de la TAU, a réuni 1 000 participants. Parmi eux figuraient des hauts fonctionnaires, des cadres dirigeants d’entreprises technologiques majeures comme Elbit, Nvidia et Microsoft, ainsi que des universitaires, des startups et des fonds de capital-risque.

Les participants se rassemblent lors du premier sommet international sur les technologies de défense à l’université de Tel Aviv, le 10 décembre. 2024. (Crédit : Dror Sithakol/Lense Productions)

Selon les experts, l’un des principaux enseignements tirés des conflits actuels dans le monde – qu’il s’agisse de la guerre en Ukraine ou du conflit d’Israël avec le groupe terroriste palestinien du Hamas – est que les armées, y compris Tsahal, ne sont pas suffisamment préparées aux guerres asymétriques. Ces armées doivent intégrer de nouveaux capteurs, drones et logiciels dans leurs systèmes militaires pour rester efficaces.

Bien que disposant de l’une des meilleures technologies de défense au monde contre les missiles et les roquettes, Israël a rencontré des difficultés face à la menace des drones lors de la guerre en cours. Aux premières heures du 7 octobre 2023, ce sont des drones du Hamas qui étaient les premiers à franchir la frontière israélienne depuis Gaza, et qui ont désactivé les systèmes de surveillance électronique. Cette action a permis un assaut transfrontalier massif, au cours duquel les terroristes ont perpétré un véritable pogrom au cours duquel ils ont sauvagement assassiné plus de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et ont kidnappé 251 personnes qu’ils ont emmenées dans la bande de Gaza.

« La défense aérienne et antimissile transforme le monde. Arrow 3 a été utilisé pour la première fois contre un missile lancé depuis le Yémen à une distance de plus de 1 500 km », a indiqué le général de brigade (Rés.) Daniel Gold, chef de la MAFAT. « Nous améliorons continuellement nos systèmes de défense aérienne et antimissile ; au cours de cette guerre, nous avons apporté des dizaines d’améliorations à nos systèmes. »

Gold, l’architecte du système de défense antimissile Dôme de fer, a également indiqué que Tsahal avait collaboré avec « des dizaines de startups sur le terrain » pendant la guerre.

« Nous avons créé une méthodologie pour intégrer une startup directement sur le terrain, une approche que le monde entier tente encore de comprendre, » a-t-il ajouté.

Les données présentées lors de la conférence ont révélé qu’après l’assaut meurtrier du 7 octobre 2023, des progrès ont été réalisés dans la collaboration entre l’establishment de la défense et les startups locales. Ces efforts visent à développer des systèmes de guerre modernes innovants et à garantir la sécurité à long terme d’Israël.

Le général de brigade (retraité) Dr. Daniel Gold, chef de la Direction de la défense, de la recherche et du développement (DDR&D) du ministère de la Défense, lors du premier sommet international sur les technologies de défense à l’Université de Tel Aviv, le 10 décembre 2024. (Crédit : Dror Sithakol/ Lense Productions)

Depuis le début de la guerre contre le Hamas en octobre de l’année dernière et jusqu’en septembre 2024, l’armée israélienne a collaboré avec 86 startups et petites entreprises israéliennes signant des contrats d’une valeur d’environ 168 millions de dollars, soit cinq fois plus que durant la même période l’année précédente, selon les données du MAFAT. Ces entreprises s’ajoutent aux quelque 200 autres startups déjà impliquées dans le développement de technologies et capacités innovantes pour l’armée.

Lors du sommet, le colonel Nir Weingold, responsable de la planification, de l’économie et des technologies de l’information au ministère de la Défense, a déclaré au Times of Israel qu’au cours des 430 jours de guerre, les startups et moyennes entreprises financées par l’establishment de la défense ont attiré 1 milliard de shekels d’investissements pour des commandes. En comparaison, environ 200 startups avaient reçu 100 millions de shekels pour des commandes lors des neuf premiers mois de 2023, a-t-il précisé.

Les intervenants du sommet ont souligné que la coopération renforcée entre le MAFAT et les startups israéliennes contribue à accroître l’indépendance de la production locale tout en stimulant l’économie nationale.

Zamir a annoncé qu’une nouvelle direction serait créée au sein du MAFAT, l’organisme chargé de trouver, de soutenir et d’étendre les projets d’innovation en matière de défense à l’utilisation sur le champ de bataille. Dotée d’un groupe de travail dédié, elle se concentrera sur les systèmes d’intelligence artificielle et d’autonomie, y compris la robotique, pour leur utilisation dans les systèmes militaires actuels et futurs.

« Nous voyons que les États-Unis utilisent l’IA principalement pour la connectivité, la robotique et les grands modèles de langage destinés au renseignement et à d’autres missions », a déclaré Weingold. « Nous allons intégrer l’intelligence artificielle jusqu’à la périphérie et l’appliquer sur le champ de bataille. »

Il a ajouté « nous considérons la technologie de défense comme un moteur de croissance. De la même manière que nous sommes devenus une ‘Startup Nation’ et un leader dans le cyberespace, nous aspirons à devenir la nation de la technologie de défense. »