Le grand œuvre de l’artiste Charlotte Salomon reparaît en français
Elle sera arrêtée en septembre 1943 et déportée au camp d'Auschwitz, où elle meurt, enceinte, dans une chambre à gaz le 10 octobre

Le grand œuvre de l’artiste allemande Charlotte Salomon, morte en déportation à Auschwitz, des centaines de pages de ce qu’on n’appelait pas encore « roman graphique », reparaît en français jeudi, à un prix réduit.
Vie ? Ou théâtre ? est réédité par les éditions Le Tripode, avec le texte allemand traduit dans les marges de ce volume de 3,5 kg et 820 pages. Il est vendu 65 euros, contre 95 euros pour la première édition chez le même éditeur en 2015.
Salomon, juive de Berlin, a 22 ans quand elle quitte la capitale allemande pour Nice, en janvier 1939. Ses parents, quant à eux, rejoignent Amsterdam deux mois plus tard.
« Conçu dans une solitude extrême, ‘Vie? Ou théâtre?’ était le fruit de mois de travail sans repos d’une jeune femme qui avait fui l’Allemagne nazie et avait voulu répondre par cette œuvre au chaos du monde », écrit l’éditeur dans la présentation de l’ouvrage.
Ses peintures forment un ensemble autobiographique foisonnant, pouvant être lu de manière cohérente. Elle les remet à son médecin français au cours de l’année 1943. Elle est arrêtée en septembre de cette année-là et déportée au camp d’Auschwitz, où elle meurt, enceinte, dans une chambre à gaz le 10 octobre.
« On a revu toute la photogravure, changé le papier, pour une différence spectaculaire. Et à un prix moindre », explique à l’AFP le directeur général du Tripode, Frédéric Martin, qui a fondé cette maison d’édition en 2013.

La première édition avait déjà été vendue à quelque 8 000 exemplaires. Salomon connaissait alors un regain de notoriété après le roman Charlotte de David Foenkinos, prix Renaudot et prix Goncourt des lycéens 2014.
« C’est non seulement le premier cas historique de roman graphique. C’est aussi une œuvre exceptionnelle, réalisée dans des conditions de création inimaginables. Il y avait des tas de raisons qui nous disaient d’en abaisser le prix », selon Martin.
Les couleurs de la palette de la jeune peintre apparaissent avec encore plus d’éclat.
« Charlotte Salomon n’a travaillé qu’avec les trois couleurs primaires, tandis qu’on imprime en quadrichromie, noir compris. Son œuvre, on peut dire, est en RVB [rouge, vert, bleu], ce qui donne des pages frappantes », souligne l’éditeur.