80 ans après la rafle, des anciens enfants d’Izieu rendent hommage à leur refuge
Le 6 avril 1944, les 44 enfants juifs de 4 à 12 ans accueillis dans ce lieu en bordure de village étaient raflés par la Gestapo de Lyon sur ordre de Klaus Barbie, avec leurs sept éducateurs
Ils n’y ont parfois passé que quelques semaines mais sont restés pour toujours des « enfants d’Izieu » : 80 ans après la rafle dans cette maison de l’Ain qui accueillait des enfants juifs, quelques « anciens » participeront dimanche à une commémoration en présence d’Emmanuel Macron.
C’était « un endroit magnifique », où les enfants hébergés pouvaient être « entre copains et copines », suivre des cours ou se promener comme en temps de paix, se souvient Roger Wolman, 85 ans. Pourtant « on a su l’histoire des enfants d’Izieu bien après la guerre… »
Il avait cinq ans, son frère 12, leurs parents étaient déportés, quand ils ont passé quelques semaines dans ce refuge. Ils ont continué leur périple dans d’autres maisons en Auvergne après leur départ en octobre 1943.
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Le 6 avril 1944, les 44 enfants juifs de 4 à 12 ans accueillis dans ce lieu en bordure de village étaient raflés par la Gestapo de Lyon sur ordre de Klaus Barbie, avec leurs sept éducateurs, juifs également. Tous furent déportés dans les camps d’Auschwitz-Birkenau (Pologne) et de Reval (Estonie). Seule une éducatrice a survécu.
Entre mai 1943 et avril 1944, la colonie d’Izieu, fondée par Sabine Zlatin, résistante juive d’origine polonaise, a accueilli une centaine d’enfants.
« On était scolarisé, on avait une vie tranquille », même si les adultes savaient que « ça devenait de plus en plus dangereux », se rappelle Bernard Waysenson, arrivé à la fin de l’été 1943 avec sa sœur et son frère. Eux sont repartis fin novembre de la même année pour rejoindre leur famille réfugiée dans le Gard.
Comme lui, sept « anciens enfants » participeront de jeudi à dimanche aux commémorations organisées par le musée inauguré il y a 30 ans, pour que nul n’oublie l’histoire de la maison et de ses petits pensionnaires.
« Le souvenir que j’ai de la guerre, c’est surtout notre survie », confie M. Waysenson. Et ce jour où des soldats allemands ont finalement embarqué son père, quelques mois avant la Libération.
Comme beaucoup de rescapés de la Shoah, Bernard Waysenson, aujourd’hui âgé de 88 ans, témoigne dans les écoles.
« J’ai toujours considéré que c’était nécessaire de rappeler ce qui s’était passé (…), j’avais aussi un engagement moral vis-à-vis de Sabine Zlatin et surtout vis-à-vis de mes petits copains. Je me devais de porter leur mémoire », explique Samuel Pintel.
Cet ingénieur à la retraite a réalisé tardivement être passé par Izieu quand la justice s’est penchée sur la rafle pendant le procès de Barbie pour « crimes contre l’humanité », en 1987. Il identifie le lieu où il a été emmené après l’arrestation de sa mère. Il n’avait alors que « 6 ans et demi, bientôt 7 ».
« Aux scolaires, je parle du contexte de haine, d’antisémitisme et je leur fais percevoir que cette haine conduit, peut conduire, à des catastrophes », dit-il.
Ancien secrétaire général de l’association Maison d’Izieu Mémorial des enfants juifs exterminés, Samuel Pintel vient de publier « L’Enfant d’Izieu », un récit autobiographique (éditions Harper Collins).
En témoignant, Roger Wolman, fait « honneur à sa famille, ses parents assassinés ». « Si je ne le fais pas, qui va le faire ? ».
Quatre jours de commémorations
Deux mille personnes sont d’ores et déjà inscrites aux quatre journées de commémorations. « En 2024, on commémore la rafle essentiellement, mais aussi les derniers jours heureux, on va dire, de la colonie », explique le directeur de la Maison d’Izieu Dominique Vidaud.
Dans l’exposition temporaire, les dernières photos des enfants datent du 26 mars 1944. « On voit les visages heureux des enfants pour qui c’est un des premiers jours du printemps », décrit-il.
Le mémorial expose également un document retrouvé dans les archives de l’Hérault, laissé par la seule survivante de la rafle, Lea Feldblum. Elle avait à son retour de déportation fait une déposition auprès de la préfecture de Montpellier. Et elle avait témoigné au procès Barbie.
« On tient beaucoup à nos anciens enfants et à leur rôle de témoins », souligne Dominique Vidaud. « Mais bien sûr, on est conscient que c’est de plus en plus difficile pour eux. Il faut prendre le relais d’une manière ou d’une autre ».
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