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Ce qu’il faut savoir sur le parti d’extrême-droite allemand de l’AfD

Avec une plate-forme focalisée sur l'islam et l'immigration et une rhétorique basée sur des tropes nazis, la forte élection de la formation de l'alternative pour l'Allemagne est un signal d'alarme pour les chefs juifs et musulmans

Alice Weidel,  co-dirigeante du parti de l'Alternative pour l'Allemagne, à Berlin après les élections allemandes, le 25 septembre 2017. (Crédit :Sean Gallup/Getty Images)
Alice Weidel, co-dirigeante du parti de l'Alternative pour l'Allemagne, à Berlin après les élections allemandes, le 25 septembre 2017. (Crédit :Sean Gallup/Getty Images)

JTA — La chancelière Angela Merkel a remporté son quatrième mandat et son parti de l’Union chrétienne démocrate (CDU) a maintenu sa majorité parlementaire lors des élections nationales allemandes, le dimanche 24 septembre.

Cette victoire n’a pas toutefois été un raz-de-marée : Avec environ 6 millions de votes, le parti populiste d’extrême-droite de l’Alternative pour l’Allemagne, ou AfD, a terminé à la troisième place, s’assurant 84 sièges au parlement national, le Bundestag, qui est maintenant constitué de 709 fauteuils en tout.

Avec une plate-forme qui s’est concentrée sur l’islam et l’immigration, et une rhétorique empreinte de tropes nazis, l’AfD a réuni 12,6 % des votes – un score presque trois fois meilleur qu’en 2013.

Cette démonstration de force sans précédent d’une formation d’extrême-droite dans l’Allemagne d’après-guerre a alarmé les chefs religieux juifs et musulmans.

« Un parti qui tolère des idées extrémistes de droite dans ses rangs est parvenu non seulement à remporter des sièges dans presque tous nos parlements d’état mais aussi au Bundestag, » a commenté Josef Schuster, chef du Conseil central des Juifs d’Allemagne, dans un communiqué.

Schuster a exprimé le souhait urgent que les leaders démocrates allemands « révèlent le vrai visage de l’AfD et exposent ses promesses vides et populistes ».

les partisans du parti populiste et anti-migrants AfD après l'annonce du résultat des élections à Schwerin, dans le nord est de l'Allemagne, le 4 septembre 2016. (Crédit : AFP/dpa/Daniel Bockwoldt)
les partisans du parti populiste et anti-migrants AfD après l’annonce du résultat des élections à Schwerin, dans le nord est de l’Allemagne, le 4 septembre 2016. (Crédit : AFP/dpa/Daniel Bockwoldt)

Voici un aperçu de l’AfD : Son histoire, ses dirigeants et ses soutiens, ainsi que les positionnements adoptés par le parti sur des questions essentielles.

Quand a été fondé le parti de l’AfD et pourquoi ?

Epousant une vague de ressentiment populaire contre le renflouement allemand d’états-membres de l’Union européenne en faillite, le parti a été lancé au mois d’avril 2013. L’AfD s’est depuis développé en adoptant le ton d’une formation anti-immigration, anti-musulmane et euro-sceptique.

Le parti a tout d’abord gagné en popularité en raison de ses attaques contre la politique libérale mise en oeuvre par Merkel envers les réfugiés – depuis 2015, l’Allemagne a ouvert ses portes à plus d’un million et demi de réfugiés, majoritairement des musulmans – et à travers sa plate-forme de campagne xénophobe et nationaliste. Avec un positionnement similaire à celui revendiqué par Trump, « America First », et adoptant le même rejet que le Royaume-Uni de l’Union européenne, l’AfD promeut une position « pro-Allemagne », allant jusqu’à recommander vivement aux citoyens d’avoir plus d’enfants « made in Germany ».

Qui sont les chefs du parti ?

Le parti a une fraction modérée et une fraction d’extrême-droite. A la tête de cette dernière, Alexander Gauland, avocat de 76 ans et journaliste qui a quitté le parti des Démocrates chrétiens conservateur après 40 années passées en son sein pour co-fonder l’AfD. Son homologue « modéré » est Alice Weidel, une économiste de 38 ans.

Gauland a récemment déclaré que les Allemands « ne doivent plus continuer à endosser la responsabilité de ces 12 années [de régime nazi]. Elles n’affectent plus dorénavant notre identité. Et nous n’avons pas peur de le dire ».

Les Allemands, a-t-il ajouté, « ont le droit d’être fiers des résultats accomplis par les soldats allemands lors des deux guerres mondiales ».

Alexander Gauland, à gauche, et Alice Weidel, candidats du parti d'extrême-droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) au soir des élections générales, à Berlin, le 24 septembre 2017. (Crédit : John MacDougall/AFP)
Alexander Gauland, à gauche, et Alice Weidel, candidats du parti d’extrême-droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) au soir des élections générales, à Berlin, le 24 septembre 2017. (Crédit : John MacDougall/AFP)

Les politiciens de l’AfD sont-ils antisémites ?

Les partis d’extrême-droite en Allemagne ont appris au fur et à mesure du temps comment éviter les pièges : Ils ne nient pas l’Holocauste, ce qui est illégal. Mais ils peuvent dire que la Shoah n’a pas été aussi terrible que ce qu’ont prétendu les Juifs ou que le bombardement de Dresde a été pire.

Récemment, Bjorn Hocke, le chef du parti de l’AfD dans l’état de Thuringe, à l’est de l’Allemagne, a suscité la controverse lorsqu’il a estimé que l’attention selon lui démesurée accordée à l’Holocauste rendait l’histoire allemande « affligeante et risible ». Il a qualifié le monument consacré à la Shoah à Berlin de « monument de la honte » et il a recommandé un éloignement radical de « cette politique stupide consistant à être aux prises avec le passé ».

Hocke a déclaré que « nous n’avons besoin de rien d’autre que d’un renversement à 180 degrés de notre politique de commémoration ».

Un candidat du parti dans l’état occidental de la Sarre, Rudolf Muller, fait actuellement l’objet d’une enquête pour avoir vendu des accessoires nazis dans son magasin d’antiquités.

Concernant leurs attitudes envers les Juifs, « de nombreux membres de l’AfD partagent des idées antisémites », estime Jan Riebe, qui s’est penché sur la question de l’antisémitisme au sein du parti pour la fondation Amadeu Antonio berlinoise, dans un entretien accordé au Deutsche Welle.

Tandis que le parti lui-même peut ne pas être antisémite, un grand nombre de ses adhérents « pensent que les Juifs sont le cerveau de tous les maux », indique Riebe. « Et ainsi, dans ce sens, l’antisémitisme joue un rôle essentiel au sein de l’AfD ».

Riebe ajoute dans le même entretien qu’un ancien membre de la formation d’extrême-droite de la région de Weserbergland, Gunnar Baumgart, a écrit que le Zyklon B – le poison utilisé dans les chambres à gaz – « était utilisé pour protéger les vies. Aucun Juif n’a été tué par le Zyklon B ».

Dirk Hoffmann, un cadre du parti de la région Saxe-Anhalt, a pour sa part fait l’équivalence entre les politiques mises en place par Israël dans les territoires palestiniens et l’Holocauste.

Wolfgang Gedeon, législateur de l’AfD à Bade-Württemberg, a été accusé de faire se répandre une propagande anti-juive, entre autres en relançant le débat sur le célèbre hoax antisémite – de triste mémoire – du « Protocole des sages de Sion ».

« L’AfD instrumentalise le judaïsme et les Juifs mais il n’a aucun intérêt à une vraie vie juive en Allemagne », explique Sigmount Konigsberg, qui gère les questions relatives à l’antisémitisme au sein de la communauté juive dans un commentaire écrit pour un hebdomadaire juif allemand, le Juedische Allgemeine.

L’AfD veut aussi interdire l’abattage casher en Allemagne ainsi que l’importation et la vente de viande casher, conformément à son opposition au halal ou abattage rituel islamique.

« Cela les met complètement dans le camp du parti national-socialiste hitlérien qui avait interdit dès avril 1933 l’abattage casher », écrit Konigsberg.

Manifestation contre le parti d'extrême-droite allemand AfD à Berlin, après les élections du 24 septembre 2017. (Crédit : John MacDougall/AFP)
Manifestation contre le parti d’extrême-droite allemand AfD à Berlin, après les élections du 24 septembre 2017. (Crédit : John MacDougall/AFP)

De plus, ajoute-t-il, « si la commémoration de l’Holocauste est apparentée à un ‘culte de la culpabilité’ et que le président de l’AfD, Gauland, est fier de la Wehrmacht, alors nous sommes tous en mesure d’additionner deux et deux et d’en comprendre les conséquences ».

Certains observateurs ont noté que d’autres partis ont leur part d’antisémites également et qu’il faut y prêter de l’attention autant, sinon plus, qu’à l’AfD. En particulier, disent-ils, les partis de gauche ont plus de probabilité d’être anti-sionistes et de soutenir les mouvements de boycott contre Israël que les partis de droite.

Qui sont certains des législateurs du parti ?

Parmi ceux qui prendront un siège au Bundestag, il y a :

* Martin Hohmann, ancien membre de l’Union des démocrates-chrétiens qui, en 2003, s’était référé aux Juifs comme à une « nation de criminels ».

* Siegbert Droese, un nationaliste qui, l’année dernière, avait attiré l’attention lorsqu’il s’était avéré que l’une de ses voitures portait la plaque d’immatriculation AH 1818 – les initiales d’Adolf Hitler en lettres et en chiffres.

* Wilhelm von Gottberg, qui, dans un essai datant de 2001, avait cité des négationnistes italiens et commenté : « Nous n’avons rien à ajouter ».

* Detlev Spangenberg, ancien informateur auprès de l’appareil sécuritaire d’Allemagne de l’est, qui est un nationaliste qui, selon des informations, voudrait voir restaurées les frontières de 1937 dans le pays.

Quels sont les points de vue sur Israël de l’AfD ?

Même si l’AfD a fait le choix de ne pas inclure de débat sur Israël dans la plate-forme de sa formation, en raison, soi-disant, de l’inquiétude nourrie par certains chefs du parti à l’égard d’éventuels « crimes de guerre » israéliens, les attitudes viennent néanmoins généralement soutenir l’Etat juif.

Les observateurs disent qu’il y a deux raisons à cela : Israël est considéré comme un rempart contre l’islam radical et Israël est utilisé comme alibi contre les accusations d’antisémitisme.

Mais seulement vingt-quatre heures après les élections de dimanche, Gauland a soulevé un débat sur la question de savoir si le droit d’Israël à exister devait être vraiment une « raison d’Etat » allemande, se référant à la déclaration de solidarité faite par Merkel à la Knesset en 2008.

« Bien sûr, nous nous tenons aux côtés d’Israël », a souligné le co-leader de la formation lors d’une conférence de presse alors qu’il s’interrogeait sur la place que devait occuper le problème de la viabilité d’Israël sur l’agenda de l’Allemagne. Mais cela voudrait dire « que nous sommes véritablement prêts à sacrifier nos existences pour l’Etat d’Israël », a-t-il continué. « Je n’envisage pas les choses comme ça ».

Un partisan du parti populiste de droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) porte une pancarte montrant des femmes en niqab barrées d'une croix durant une manifestation contre la politique d'asile du gouvernement allemand pendant une manifestation organisée par l'AfD à Berlin, le 7 novembre 2015 (Crédit : AFP PHOTO / JOHN MACDOUGALL)
Un partisan du parti populiste de droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) porte une pancarte montrant des femmes en niqab barrées d’une croix durant une manifestation contre la politique d’asile du gouvernement allemand pendant une manifestation organisée par l’AfD à Berlin, le 7 novembre 2015 (Crédit : AFP PHOTO / JOHN MACDOUGALL)

Pour sa part, le chef de l’AfD dans la région Rhénanie du nord-Westphalie Marcus Pretzell, a indiqué au journal Suddeutsche Zeitung qu’il ne soutiendrait plus aucun changement dans le soutien allemand apporté à Israël qui, selon lui, est le seul partenaire fiable du pays au Moyen-Orient.

En Israël, les réactions au succès de l’AfD sont mitigées : Tandis que certains politiciens israéliens s’intéressent au soutien apporté par les partis populistes européens dans la lutte contre l’islam radical, d’autres qualifient l’appel du pied évident lancé par l’AfD aux extrémistes et racistes de droite de signal d’avertissement pour Israël et les Juifs.

Qui soutient le parti ?

La plus grande base de soutien provient des régions de l’Allemagne de l’est, où la formation a reçu plus de 20% des votes. Dans tout le pays, l’AfD revendique 23 000 membres. En comparaison, les Démocrates chrétiens de Merkel en alignent plus de 400 000.

Les soutiens juifs de l’AfD peuvent ne pas être nombreux ou démonstratifs mais certains – comme l’artiste de Berlin Pavel Feinstein — ont ouvertement déclaré que l’AfD est « le seul parti qui mettra un terme à l’invasion » des extrémistes islamistes.

« Vous n’avez pas besoin de vous marier » avec l’AfD, a déclaré dans une interviewx accordée l’année dernière Feinstein à JTA.

Certains observateurs disent que l’AfD a su attirer des électeurs de l’ensemble du spectre politique, notamment des gens qui ne s’étaient jamais rendus aux urnes. Le parti a comparé son succès à l’approbation, l’année dernière, du Brexit au Royaume-Uni et à l’élection de Trump aux Etats-Unis. Un phénomène électoral qui a été décrit comme une « radicalisation du centre » même s’il reste à établir si la démonstration de force de l’AfD amènera les formations prédominantes en Allemagne à adopter un ton un peu plus populiste.

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