Israël en guerre - Jour 433

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Dans son projet pour l’après-guerre, Netanyahu veut des « autorités locales » à Gaza

Le Premier ministre envisage une coopération avec l'Égypte et une reconstruction à la charge des pays arabes, qui la conditionnent à la solution à deux Etats

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, 2e à gauche, dirigeant la réunion hebdomadaire du cabinet au ministère de la Défense, à Tel Aviv, le 7 janvier 2024. (Crédit : Ronen Zvulun/AFP)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, 2e à gauche, dirigeant la réunion hebdomadaire du cabinet au ministère de la Défense, à Tel Aviv, le 7 janvier 2024. (Crédit : Ronen Zvulun/AFP)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a présenté jeudi soir à son cabinet de sécurité un document d’orientation pour la gestion de Gaza dans l’après-guerre, qui entend installer des « autorités locales » non affiliées au terrorisme pour administrer la bande de Gaza en lieu et place du Hamas.

Rendu public en Israël durant la nuit, ce document d’une page résume les principes énoncés par le Premier ministre depuis le début de la guerre, et présentés au cabinet à des fins d’approbation pour la première fois officiellement.

Cela fait plus de quatre mois que Netanyahu reporte les discussions au sein du cabinet de sécurité concernant l’«après» guerre, de crainte que cela ne fragilise sa coalition de droite.

Certains de ses ministres d’extrême droite ont l’intention d’utiliser ces réunions pour faire pression en faveur du rétablissement des implantations israéliennes à Gaza et d’un contrôle permanent par Israël de la bande de Gaza – politiques auxquelles le Premier ministre dit s’opposer et qui conduiraient très certainement à la dissipation des derniers soutiens à Israël en Occident.

Netanyahu a martelé qu’il ne laisserait pas l’Autorité palestinienne gouverner Gaza, mais a nuancé ses propos en disant qu’Israël ne permettrait pas à l’Autorité palestinienne sous sa forme actuelle de revenir dans l’enclave palestinienne, mais pourrait vivre avec une Autorité palestinienne réformée, sur le modèle de la proposition de l’administration Biden. A d’autres moments, il est arrivé à Netanyahu de refuser catégoriquement l’idée d’un « Fatahstan » – allusion au parti politique dirigé par le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Le document d’orientation présenté par Netanyahu à ses ministres du cabinet de sécurité lors de la réunion de jeudi soir ne cite pas nommément l’Autorité palestinienne mais n’exclut pas sa participation à la gouvernance d’après-guerre de Gaza. Il indique que les affaires civiles de Gaza seront confiées à des « fonctionnaires locaux » avec une « expérience administrative » et dépourvus de liens avec « des pays ou des entités qui soutiennent le terrorisme ».

Des gens marchent dans une rue détruite par les bombardements israéliens dans la ville de Gaza, le 10 février 2024. (Crédit : AFP)

Très vague, ce libellé pourrait renvoyer à des organisations qui perçoivent des fonds du Qatar ou de l’Iran – comme le Hamas – voire à l’Autorité palestinienne, dont le programme d’aide sociale est caractérisé par des prestations aux terroristes condamnés et à leurs proches.

Selon un communiqué du cabinet de Netanyahu, ce document s’appuie sur des principes communément admis par la population et servira de base à de futures discussions sur la gestion de l’après-guerre à Gaza.

Ce projet s’ouvre sur l’énoncé d’un principe de court terme : Tsahal poursuivra la guerre jusqu’à l’atteinte de ses objectifs, à savoir la destruction des capacités militaires et infrastructures administratives du Hamas et du Jihad islamique, la libération des otages enlevés le 7 octobre 2023 et l’élimination à long terme de toute menace issue de la bande de Gaza.

L’armée israélienne pourra librement, et sans restrictions dans le temps, intervenir dans toute la bande de Gaza afin de prévenir la résurgence du terrorisme, indique le document, décrivant cela comme un principe de moyen terme.

Le projet précise en outre qu’Israël poursuivra ses travaux pour établir une zone tampon de sécurité du côté palestinien de la frontière avec la bande de Gaza, qui restera en place « aussi longtemps que nécessaire pour des raisons de sécurité ».

Ce plan est en contradiction directe avec l’un des principes de l’administration Biden pour la bande de Gaza d’après-guerre, à savoir la préservation de l’intégrité territoriale de l’enclave.

Des soldats de Tsahal opèrent à l’intérieur de la bande de Gaza sur une photo non datée publiée le 22 février 2024. (Crédit : Armée israélienne)

Le document présenté par Netanyahu donne également des détails concrets sur les projets israéliens pour la question de la frontière entre l’Égypte et Gaza, en proie à une intense contrebande à la fois en surface et en sous-sol, et stipule qu’Israël imposera un « bouclage sud » de la frontière pour empêcher la reprise des activités terroristes.

Le bouclage sera maintenu avec l’appui des États-Unis et,« autant que possible », en coopération avec l’Égypte, indique le document, allusion à la désapprobation du Caire envers ce plan en raison qui viole ostensiblement sa souveraineté.

Le Caire a refusé la proposition d’Israël de prendre le contrôle du corridor de Philadelphie, situé à la frontière entre l’Égypte et Gaza, tout en montrant en privé davantage de flexibilité, ont expliqué au Times of Israël des diplomates américains et arabes. Il semble que les États-Unis et l’Égypte soient peu susceptibles d’apporter leur soutien à un projet étranger à l’initiative destinée à ouvrir la voie à un État palestinien – ce que Netanyahu refuse.

Le document ajoute que « le bouclage sud aura vocation à empêcher la contrebande en provenance d’Égypte – à la fois sous terre et en surface, y compris au point de passage de Rafah – ».

Toujours lors de la phase intermédiaire, Israël gardera le contrôle sur la sécurité « dans toute la zone à l’ouest de la Jordanie », sur terre, dans les airs et en mer, « pour empêcher la reprise du terrorisme en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, et contrecarrer leurs menaces envers Israël », indique le document.

Le plan de Netanyahu envisage la « démilitarisation complète de Gaza… au-delà du nécessaire pour les besoins du maintien de l’ordre public », ce dont se chargera Israël dans un avenir proche, laissant la porte ouverte à l’intervention d’autres acteurs pour finir le travail.

Un Palestinien marche dans les décombres de l’immeuble de la famille Khatab après une frappe aérienne israélienne à Deir al Balah, dans la bande de Gaza, le mercredi 21 février 2024. (Crédit : AP Photo/Adel Hana)

En plus des « autorités locales » auxquelles Netanyahu envisage de confier la gestion de l’ordre public et des services publics, le document ajoute qu’Israël fera également la promotion d’un « plan de déradicalisation… dans toutes les institutions religieuses, éducatives et sociales de Gaza », « si possible avec la participation et le soutien des pays arabes expérimentés dans la promotion de la déradicalisation ».

Cette phrase semble faire allusion aux pays du Golfe -l’Arabie saoudite ou les Émirats arabes unis -, bien que tous deux aient clairement indiqué, et à plusieurs reprises, qu’ils ne joueraient aucun rôle dans la reconstruction de Gaza sauf à ce qu’il y ait une perspective de solution à deux États.

Les analystes de la question se disent sceptiques face à l’objectif de Netanyahu d’adouber des chefs de clan palestiniens non affiliés, tout dirigeant de la communauté palestinienne coopérant ouvertement et unilatéralement avec Israël risquant de perdre rapidement toute forme de légitimité, sans parler des dangers pour sa vie. Ils rappellent que les États-Unis ont mis en oeuvre un projet semblable après l’invasion de l’Irak, il y a une vingtaine d’années, lequel a fini par se retourner contre eux.

La communauté internationale fait pression pour que l’Autorité palestinienne soit chargée de la gouvernance Gaza, dans la mesure où elle dispose déjà d’une partie des infrastructures. Sa légitimité auprès des Palestiniens fait défaut, mais les parties prenantes espèrent que cela changera après la mise en oeuvre d’une série de réformes.

Des fusées au-dessus de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 20 février 2024. (Crédit : Atia Mohammed/Flash90)

Un membre des autorités israéliennes, qui a révélé jeudi que ce dernier aspect du projet était bien avancé, a expliqué que l’Autorité palestinienne ne devait pas prendre part à la gouvernance de Gaza dans l’après-guerre, en raison de son refus de condamner l’attaque du Hamas du 7 octobre contre Israël, qui a vu des milliers de terroristes dirigés par le Hamas se déchainer dans le sud d’Israël et tuer 1 200 personnes et faire 253 otages.

Un autre aspect clé du document d’orientation de Netanyahu est la fermeture de l’agence de secours de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, l’UNRWA. Ce document dénonce l’implication de 12 membres du personnel de l’UNRWA dans l’attaque du 7 octobre et indique qu’Israël fera le nécessaire pour remplacer l’agence par des « organisations d’aide internationale responsables.

À court terme, un haut responsable israélien a indiqué au Times of Israël, le mois dernier, que Jérusalem ne souhaitait pas la dissolution immédiate de l’UNRWA, principale organisation responsable de la distribution de l’aide humanitaire sur le terrain. Sa fermeture immédiate risquerait selon lui d’entraîner une catastrophe humanitaire de nature à acculer Israël à la cessation des combats contre le Hamas.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken (à gauche) et le président de l’AP Mahmoud Abbas se serrant la main lors de leur rencontre, à Ramallah, en Cisjordanie, le 7 février 2024. (Crédit : Mark Schiefelbein/AP Photo/Pool)

Le document précise en outre qu’Israël ne permettra la reconstruction de Gaza qu’après la démilitarisation de la bande de Gaza et le début du « processus de déradicalisation ».

« Le plan de reconstruction sera financé et dirigé par des pays acceptables pour Israël », indique le document, ce qui exclut de facto de nombreux donateurs potentiels, qui conditionnent la reconstruction de Gaza à l’existence d’un horizon politique pour les Palestiniens.

Le projet de Netanyahu conclut en rappelant deux principes adoptés cette semaine à la fois par le Conseil des ministres et la Knesset, à savoir qu’Israël rejette catégoriquement tout diktat international concernant un règlement permanent avec les Palestiniens, lui préférant le jeu de négociations directes entre les parties prenantes sans conditions préalables, et qu’Israël continuera de s’opposer à la reconnaissance unilatérale d’un État palestinien, qu’il considère comme une « récompense pour le terrorisme ».

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