Israël en guerre - Jour 536

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Des autocollants en hommage aux défunts deviennent une mosaïque de deuil sur la Toile

Ces autocollants qui montrent des Israéliens tués lors du pogrom, avec des messages puissants, sont apparus sur les voitures ou sur les murs dans le cadre d'une nouvelle commémoration

Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

Un mur de la gare de Hashalom remplis de  tous les autocollants commémorant les victimes tuées le 7 octobre et dans la guerre en cours. (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel).
Un mur de la gare de Hashalom remplis de tous les autocollants commémorant les victimes tuées le 7 octobre et dans la guerre en cours. (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel).

De nouveaux autocollants ont surgi en Israël au cours des douze derniers mois – ils apparaissent collés sur les voitures et sur les lampadaires, sur les murs des gares ferroviaires et sur les arrêts de bus. Ils présentent et rendent hommage à chaque victime, à chaque soldat ayant perdu la vie lors du pogrom commis par le Hamas, le 7 octobre, et pendant la guerre qui est encore en cours.

Ils ne sont pas le fait d’une seule organisation – ils ont été produits de manière indépendante, par les les familles et par les amis de tous ceux qui ont été assassinés, le 7 octobre et après. Une manière parmi de nombreuses autres pour ces proches de tenter de maintenir en vie la mémoire de leurs proches.

Lorsque Jeffrey Weiss a vu ces autocollants qui se multipliaient, il a rapidement réalisé qu’il assistait à un véritable phénomène. Il a commencé à les prendre en photo.

Aujourd’hui, il a créé Stickers of Meaning, un site internet où tous ces autocollants sont présentés accompagnés d’une courte biographie de chaque défunt, en hébreu et en anglais.

« Je m’attendais bien à ce que, comme dans n’importe quel pays, on respecte et on rende hommage à la mémoire des soldats morts au combat – c’est quelque chose de normal, d’universel », explique Weiss, avocat qui a immigré en Israël depuis Washington. « Mais il y avait ce petit quelque chose de nouveau sur chacun d’entre eux, ce message qui transmet une sorte de recommandation existentielle aux vivants ».

Ces messages sont émouvants et puissants, ajoute Weiss. L’un d’entre eux – qui rend hommage à un soldat – raconte qu’il avait choisi de combattre pour ceux qu’il aimait, et non par sentiment de haine à l’égard de ceux qu’il affrontait. Un autre autocollant, réalisé pour commémorer une femme qui avait été tuée à la rave-party Nova, rappelle l’optimisme dont faisait toujours preuve la défunte, où qu’elle soit amenée à aller.

Un autocollant à la mémoire de Yosef Malachi Gedalia, aperçu à Tkuma, près du kibboutz Reim, le 30 septembre 2024, indique : « Aimer la terre, notre pays, son peuple, se sacrifier pour lui, et comprendre que c’est quelque chose d’unique et que nous sommes uniques et que ce n’est pas quelque chose d’évident ». (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel)

Il souligne l’empreinte juive et israélienne de cette initiative – les autocollants reprenant souvent des phrases juives classiques telles que « Aime ton prochain comme toi-même », « Aime ceux qui te ressemblent, même ceux qui ne te ressemblent pas » ou encore « Vous avez couru après la justice et la paix, mais vous avez préféré l’amour ».

Cette utilisation de messages politiquement ou théologiquement chargés de sens et apposés sur des autocollants est loin d’être sans précédent en Israël – il y a déjà eu eu de telles campagnes dans le passé, avec des messages consacrés à l’unité de Dieu ou faisant état de revendications dans le cadre de la problématique des implantations. En 2004, avant que les autocollants ne disparaissent des panneaux d’affichage et autres pare-chocs au profit des murs Facebook et de Twitter, le phénomène avait été observé et analysé par l’auteur David Grossman et il avait été mis en musique par le groupe de rock Hadag Nahash.

C’est peu après le 7 octobre qu’ils ont fait un retour poignant. Des autocollants à l’effigie des victimes ont commencé à apparaître dans tout le pays et par centaines – sur les murs des gares routières et ferroviaires mais aussi dans d’autres lieux chargés de symbole, notamment sur le site du festival de musique électronique Supernova et à Tkuma, où des centaines de voitures calcinées, appartenant à ceux qui tentaient d’échapper aux terroristes, sont empilées dans le cadre d’une exposition.

Finalement, après avoir pris des photos de quelque 400 autocollants, Weiss, avocat spécialisé dans les brevets, a commencé à classer les autocollants dans différentes catégories en fonction de leur type et du message qu’ils transmettaient.

Il a eu le sentiment qu’un site internet qui présenterait chaque autocollant mettrait en évidence l’ampleur de ce mémorial national – et la puissance émotionnelle que peut avoir un simple autocollant.

Weiss n’était pas en Israël le 7 octobre. Il s’était envolé pour les États-Unis, le 4 octobre, pour rendre visite à ses quatre enfants adultes avant un ultra-marathon de plus de cent kilomètres qu’il devait courir autour du lac Tahoe, le 14 octobre – et pour lequel il s’entraînait depuis des mois, note-t-il.

Amoureux depuis toujours d’Israël, ayant immigré à Tel Aviv en 2022, Weiss avait ressenti un véritable malaise à l’idée d’être en dehors du pays au lendemain du pogrom – les hommes armés avaient massacré, en ce Shabbat noir, plus de 1 200 personnes et ils avaient kidnappé 251 personnes qui avaient été prises en otage dans la bande de Gaza. Lorsqu’il était enfin rentré, quelques jours après sa course, il s’était porté volontaire dans le cadre d’initiatives diverses, cherchant un moyen d’aider à soulager la terrible angoisse, la douleur et la souffrance qui frappaient un si grand nombre d’Israéliens.

Il a ensuite remarqué les autocollants – et il a été surpris par la similarité entre les messages écrits sur ces derniers et les dictons circulant dans le monde du sport de l’endurance extrême, dans lequel il évolue en raison de son amour des marathons.

« Ils parlent tous d’une vie joyeuse, où il faut montrer de l’audace ; d’une vie qui est pleine de sens, d’objectifs et de résilience », indique Weiss.

Un mur sur le site de Tkuma, près du kibboutz Reim, à la mémoire des personnes tuées le 7 octobre et pendant la guerre en cours (Crédit : Jessica Steinberg/Times of Israel).

Il a entrepris de mettre en place le site internet « Stickers of Meaning » en classant les autocollants par catégorie. Il a ensuite engagé des développeurs – et des avocats qui l’ont aidé à contacter chaque famille, chargés de s’assurer que toutes accepteraient que l’autocollant figure sur le site.

Son équipe a rencontré certaines des familles, recueillant des histoires sur l’être cher qu’elles ont perdu.

Une famille a ainsi raconté à Weiss et à son équipe que la citation figurant sur l’autocollant était inscrite sur la porte de la chambre de leur fils, côté intérieur. Il était déterminé à intégrer une unité d’élite de l’armée et il s’entraînait à cette fin depuis l’âge de 16 ans, rampant dans les dunes dans la nuit noire.

L’une de ses sœurs, ajoute-t-il, s’est faite faire un tatouage qui reprend la phrase préférée de son frère : « Soyez heureux dans votre vie ». Une devise qu’elle portait sur un bracelet et qui a été finalement imprimée sur un autocollant.

« J’ai été frappé par le fait que les Israéliens semblent vraiment avoir cette volonté ardente de célébrer la vie et qu’ils sont prêts à utiliser tous les moyens pour atteindre cet objectif », indique Weiss. « Il ne s’agit pas seulement ici des soldats des unités d’élite, mais aussi des victimes de la rave et d’ailleurs qui ont perdu la vie le 7 octobre. Il y a cette constance dans la nécessité d’être joyeux, d’être optimiste, de vivre pleinement son existence. Il n’y a pas de colère dans ces autocollants, il y a toujours quelque chose de positif ».

Weiss a lancé le site internet dans la semaine qui a précédé le 7 octobre. Il examine la possibilité d’écrire un livre consacré à la signification de ces autocollants et des messages qu’ils véhiculent.

De son côté, une famille en deuil envisage de lancer un programme éducatif pour les lycées qui se concentrera sur les messages transmis par les autocollants.

« Il est plus facile actuellement de focaliser son attention sur ce qui est difficile et douloureux. Vous pouvez facilement passer toutes vos journées dans l’angoisse », s’exclame Weiss. « Ce que ces autocollants ont fait, c’est révéler quelque chose d’étonnant sur le caractère des Israéliens, quelque chose qui est très impressionnant ».

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