Des manifestants organisent un simulacre d’obsèques des otages tués et exigent un accord
Des milliers de personnes ont marché vers le QG de Tsahal à Tel Aviv avec 27 cercueils - symboles des otages tués par le Hamas - pour la 5e nuit consécutive de manifestations après l'assassinat de six otages à Gaza
Des milliers de manifestants ont défilé jeudi à Tel Aviv avec 27 faux cercueils, symboles des 27 otages tués en captivité par le Hamas à Gaza, pour demander un accord en vue de la libération des derniers otages. Par ailleurs, des foules compactes se sont formées à Rehovot, Eilat et Jérusalem.
Il s’agissait de la cinquième nuit consécutive de manifestations, après le rapatriement, samedi dernier, de la dépouille de six otages israéliens. Ces derniers avaient été exécutés à bout portant quelques jours avant l’arrivée des soldats israéliens, 11 mois après leur enlèvement en Israël lors du pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre.
La nouvelle de l’exécution des otages a suscité une vive indignation en Israël et a valu au Premier ministre Benjamin Netanyahu des critiques quant à sa volonté réelle de négocier avec le Hamas. Certains lui reprochent en effet de ne pas avoir fait les concessions qui auraient permis aux otages israéliens de rentrer vivants mais qui auraient mis en danger sa coalition au pouvoir.
A Tel Aviv, alors que les manifestants se rassemblaient sur la place Habima avant le départ du cortège, Gil Dickmann, dont la cousine Carmel Gat est l’une des six otages tuées, a accusé Netanyahu d’avoir « condamné ma cousine à mort ».
On a pu entendre la foule crier : « Assassin ! »
« Elle a été abandonnée à la mort par un gouvernement qui aurait pu la sauver », a déclaré Dickmann en rappelant le nombre de jours pendant lesquels Gat a été otage. « Il y avait eu 327 occasions de la sauver, et chacune d’entre elles a été manquée. »
Les familles des otages et leurs soutiens, portant des cercueils, ont organisé un simulacre de cortège funèbre le long de la rue Bégin, en direction de l’intersection Begin-Kaplan, devant le quartier général de Tsahal.
Depuis que les corps des otages tués ont été retrouvés, le week-end dernier, cette artère de Tel Aviv a été le lieu de manifestations en faveur d’un accord pour la libération des otages et bloquée par les manifestants chaque nuit.
Lorsque les 27 cercueils sont arrivés au croisement en question, la manifestation a commencé, forte de ses 2 000 participants qui ont scandé des slogans contre le gouvernement et en faveur d’un accord.
« Nous sommes tous otages d’un gouvernement sanguinaire ! » ont crié les manifestants. « L’absence d’accord condamne tout le monde ! »
« S’il n’y a pas d’accord, nous brûlerons le pays – c’est la dernière chance ! » a scandé la foule.
Un feu de joie a été allumé rue Begin, puis rapidement éteint par la police. Une partie de la foule avait tagué le nom des otages sur le sol, une autre brandissait des cartons sur lesquels on pouvait lire : « Ici reposent nos otages ».
Dans la foule, un homme en tenue hassidique a attiré l’attention et les applaudissements en se lançant dans une diatribe contre Netanyahu.
« Tout faire pour récupérer les otages, c’est tout le sens de la Torah ! » a-t-il crié dans un mégaphone.
Selon une organisation chargée de l’aide judiciaire aux manifestants détenus par la police, les forces de l’ordre auraient interpelé six personnes lors de cette manifestation. La police n’a pas fait de commentaire.
Alors que la manifestation se terminait, la police montée a repoussé une centaine de manifestants qui tentaient de défiler à l’extérieur de la zone de manifestation rue Begin.
Le chef de la police du centre de Tel Aviv, Micah Gafni, a été vu en train de pousser un manifestant hors de la foule et de lui arracher son mégaphone.
Une colonne de policiers est ensuite entrée dans le cortège pour confisquer le tambour d’un manifestant, ce qui leur valu des applaudissements sarcastiques.
A Jérusalem, des manifestants se sont rassemblés près des domiciles du ministre de l’Économie Nir Barkat, du membre de la Knesset Aryeh Deri et du ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer, ainsi que sur la place Sion, au centre-ville.
À Rehovot, les manifestants ont défilé derrière une banderole donnant à voir le visage des six otages tués retrouvés la semaine dernière, à côté de l’injonction biblique : « Ne restez pas les bras croisés face au sang versé de votre prochain ».
Netanyahu aurait tenu jeudi soir une réunion sur la façon de se venger du Hamas pour la mort des six otages.
Selon la Treizième chaîne, des représentants des autorités militaires devaient dire à Netanyahu qu’il serait difficile de prendre des mesures punitives et que toute action considérée comme une vengeance nuirait aux négociations en vue de la conclusion d’un cessez-le-feu assorti d’un accord de restitution des otages.
Israël et le Hamas auraient tous deux durci leurs positions depuis la mort des six otages, mais les États-Unis continuent de tenter de trouver un accord. Les autorités américaines ont annoncé la publication prochaine – peut-être dès la semaine prochaine – d’une « proposition finale ».
Ces pourparlers seraient au point mort depuis des semaines au sujet du corridor de Philadelphie, langue de terre située le long de la frontière entre Gaza et l’Égypte : Israël exige le maintien de sa présence militaire pour empêcher la contrebande, ce à quoi le Hamas et l’Égypte s’opposent.
Netanyahu a, à plusieurs reprises ces derniers jours, tenté de justifier sa position sur le corridor, qui empêche la conclusion d’un accord.
On estime que 97 des 251 otages enlevés par le Hamas le 7 octobre se trouvent toujours à Gaza, y compris les corps de 33 otages dont le décès a été confirmé par l’armée. 105 civils ont été libérés au cours d’une trêve d’une semaine à la fin du mois de novembre, et quatre otages ont été remis en liberté avant la trêve. Huit otages, dont une soldate, ont été secourus vivants par les forces israéliennes, et les corps de 37 otages ont également été récupérés, dont trois ont été tués par erreur par l’armée lors d’un incident tragique en décembre.
Le Hamas détient par ailleurs deux civils israéliens entrés de plein gré dans la bande de Gaza, respectivement en 2014 et 2015, ainsi que les corps de deux soldats israéliens tués en 2014.
Lazar Berman et l’équipe du Times of Israel ont contribué à cet article.