En Galilée, un centre pour jeunes handicapés endommagé par la guerre se réinvente
Le campus de traitement et de réhabilitation de Mevo'ot HaHermon, fermé depuis le 8 octobre, comprend l'une des plus grandes piscines d'hydrothérapie de ce type en Israël
MERKAZ KACH – Samedi dernier, Beni Ben Muvhar, chef du conseil régional de Mevoot HaHermon, se trouvait sur le parking des bureaux du conseil municipal, en compagnie de son fils, lorsqu’il a entendu une énorme explosion : une roquette venait de s’écraser sur le toit du bâtiment du centre de rééducation par hydrothérapie tout proche, vide à ce moment de la journée.
« C’est un miracle que nous ne soyons pas morts », explique Ben Muvhar au Times of Israel lors d’un déplacement au centre, quelques jours plus tard. Son fils et lui se trouvaient encore à l’intérieur du bâtiment – qui fait partie d’un complexe composé d’une école maternelle et d’une école primaire pour enfants ayant des besoins spéciaux – quelques instants avant l’incident, souligne-t-il.
Le centre d’hydrothérapie fait partie d’un complexe de plusieurs bâtiments dédiés à la rééducation et à la thérapie pour enfants et adultes, à Merkaz Kach, zone industrielle situé sur la route 90 à plusieurs kilomètres au sud de Kiryat Shmona, et à seulement quatre kilomètres de la frontière libanaise.
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La roquette a ouvert un trou dans le toit, à travers duquel on peut voir le ciel, et a fait pleuvoir pans du plafond, rampes de luminaires et autres matériaux dans les deux bassins installés à l’intérieur du bâtiment. D’autres parties du bâtiment, comme la salle de physiothérapie et ses équipements spécialisés, ont subi les mêmes dégâts, laissant la quasi-totalité du bâtiment inutilisable.
Il n’y a pas eu à propremet parler d’explosion : les dégâts ont été occasionnés par l’impact de la roquette. L’unique zone épargnée est une petite pièce renforcée – l’abri anti-bombes du bâtiment – souvent utilisée pour des séances de thérapie ou des travaux corporels.
« Cet endroit est l’œuvre de toute ma vie », confie Ben Muvhar en me guidant dans les couloirs du bâtiment endommagé. « Avant, il n’y avait rien autrefois, ici. »
Lorsque nous entrons dans la grande pièce centrale, la piscine principale est calme, l’eau immobile. Partout gisent des pans du plafond, du verre brisé, des rampes de luminaires brisés et d’autres débris, même à l’intérieur de la piscine. Il n’y a ni électricité ni climatisation, et l’air sent le chlore et la poussière.
Tout en se frayant un chemin au bord de la piscine, non sans répondre aux incessants appels téléphoniques et questions du personnel sur place, Ben Muvhar nous montre la roquette en question, qui pourrait être un des projectiles du Dôme de fer tiré en défense contre des drones venus, samedi, du Liban. Ladite roquette se trouve toujours dans le plafond. L’une des lourdes poutres de soutènement du toit, en acier, s’est pliée sous l’impact.
Fermé à cause d’une guerre non déclarée dans le nord
Le « Centre de traitement et rééducation Mevoot HaHermon » est l’un des plus grands centres de ce type en Israël.
Hors période de guerre, le centre dispense plus de 20 000 séances de traitement individuel chaque année, sans compter des services additionnels pour le grand public, comme ces sessions pour les anciens combattants de Tsahal souffrant de stress post-traumatique ou d’autres difficultés. Le centre héberge par ailleurs une petite antenne de la Caisse de services de santé Clalit ainsi que les bureaux du conseil local.
En raison de sa localisation, l’accès à l’établissement est formellent interdit aux patients depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas et les attaques quasi-quotidiennes, depuis le 8 octobre, des forces dirigées par le Hezbollah sur les communautés israéliennes et postes militaires situés le long de la frontière libanaise. L’organisation soutenue par l’Iran assure le faire en signe de soutien à Gaza, et ce depuis le pogrom perpétré par le Hamas contre le sud d’Israël le 7 octobre dernier.
La semaine dernière, ce sont des drones chargés d’explosifs qui se sont écrasés, en représailles, explique le Hezbollah, à la frappe israélienne ayant coûté la vie à un commandant du Hamas au Liban.
Leur cible était la base militaire de Michve Alon, non loin de Maghar, dont l’organiation terroriste libanaise pensait qu’elle servait de base et de dépôt de munitions à l’armée israélienne. Située à 18 kilomètres environ de la frontière libanaise, Michve Alon est une base d’entraînement du Corps d’éducation et de jeunesse de Tsahal.
Depuis son bureau rempli de souvenirs, et notamment d’une belle collection d’appareils photo anciens, Ben Muvhar, sexagénaire sympathique mais sérieux, explique que le centre existe depuis 1998, soit un an seulement après sa première élection à la tête du conseil régional de Mevoot HaHermon.
« Quand je suis arrivé ici, il y avait une école avec 12 élèves ayant des besoins spéciaux, des cas très difficiles. Ils arrivaient en bus puis repartaient. Certains jours, cela fonctionnait, d’autres, pas vraiment », se rappelle-t-il.
L’école était très endettée, au bord de la faillite : « la logique aurait voulu qu’on la ferme », se souvient-il.
Loin de s’engager sur cette voie, il fait le pari de développer le complexe pour en faire un centre de traitement et d’éducation polyvalent. Le ministère de l’Éducation accorde des suventions aux écoles et le conseil local – aidé par de généreux donateurs – finance le reste.
Maintenant, « tout le nord du pays vient ici, il y a beaucoup de monde. Ils viennent de Tibériade, Afula, Safed, Kiryat Shmona, partout », annonce-t-il fièrement.
Là, les enfants handicapés peuvent faire l’expérience de l’eau
L’école maternelle et l’école primaire sont toutes deux spécialisées dans l’accueil d’« élèves ayant des besoins spéciaux, des cas « médians » aux plus lourds, qui doivent parfois être nourris par sonde », explique-t-il.
Certains élèves sont gravement handicapés et souffrent de difficultés qui ne leur permettent pas de bouger, d’autres sont en fauteuil roulant. D’autres encore sont « incapables d’apprendre, ou alors n’entendent pas », poursuit Ben Muvhar.
Inauguré en 2010, le centre d’hydrothérapie endommagé dispose de deux piscines intérieures proposant des températures différentes, ainsi que d’une foule d’équipements spécialisés, dont des harnais corporels qui permettent aux patients les plus handicapés physiquement de « faire l’expérience de l’eau », explique-t-il.
Depuis l’attaque, Ben Muvhar et son équipe « préparent activement le futur chantier de réparation et sollictent les autorisations nécessaires », mais leur calendrier est incertain.
« Cette zone est une zone militaire d’exclusion, nous ne pouvons pas obtenir l’autorisation de faire venir des entrepreneurs », explique-t-il.
Les réparations devraient être prises en charge par la puissance publique, ce qui n’empêche pas les membres du conseil local de préparer une collecte de fonds pour se doter d’« un centre de rééducation plus grand, meilleur encore et plus résistant », avec de nouveaux bâtiments et des installations supplémentaires, ajoute-t-il.
Il table en effet sur une augmentation du nombre de patients, civils et soldats, à cause du conflit.
Il est important que « des personnes bienveillantes et intelligentes, au sein du gouvernement » contribuent à cet effort sans multiplier les « obstacles bureaucratiques », précise Ben Muvhar.
« Je sais que nous allons encore améliorer nos installations », conclut-il.
Emmanuel Fabian et l’équipe du TOI ont contribué à cet article.
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