La ligue de football des jeunes cherche à combler les divisions religieuses
L'organisation Tzav Pie trouve des façons pour permettre aux joueurs qui observent le Shabbat de se joindre aux pairs laïcs sur le terrain
PARDES HANNA, Israël (JTA) – Lorsque Yoel a décidé, à l’âge de 8 ans, à commencer à observer le Shabbat, il y avait seulement un problème : cela signifiait qu’il ne pouvait pas se joindre à la plupart des équipes de football d’Israël, qui jouaient le samedi.
Yoel, qui a maintenant 12 ans, a toujours vécu dans cette zone grise, qui s’agrandit entre les sociétés juives religieuses et laïques qui sont nettement séparées en Israël. Son père observe le Shabbat, pas sa mère. Il a été inscrit dans une école élémentaire religieuse mais a été transféré dans une école laïque cette année.
Il aime le fait que Shabbat l’oblige à s’éloigner de la télévision et des jeux vidéo, ce qui lui permet de se détendre. Mais en tant qu’attaquant en herbe, Yoel aime aussi la sensation de l’herbe sous ses crampons. Peu de choses l’excitent plus que de se retrouver en tête-à-tête contre un gardien de but et frapper un « missile » dans les buts.
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Aujourd’hui, Yoel n’a plus à choisir entre le Shabbat et le football, grâce à une équipe dirigée par Tzav Pius, un organisme à but non lucratif qui vise à combler le fossé entre les Juifs israéliens religieux et laïcs. Les équipes Tzav Pius organisent des matchs pendant la semaine, du dimanche au vendredi, permettant ainsi aux Israéliens religieux de participer aux matchs.
« Tzav Pie me permet de jouer au football », s’est réjoui Yoel, qui en tant que mineur ne pouvait pas donner son nom de famille sans la permission d’un parent. Affirmant avoir des amis religieux et laïcs, il ajoute : « je sais comment on se sent quand on fait partie de deux sociétés différentes ».
Tzav Pie, qui a 96 équipes de football pour les jeunes à travers Israël, vise à changer la manière dont la société religieuse du pays et l’establishment du football se voient. Parce que le sport le plus populaire d’Israël est pratiqué pendant le jour de repos, environ un tiers des Juifs israéliens – la proportion qui observe le Shabbat – ne peuvent pas regarder, assister ou jouer à des matchs.
Il en résulte que la culture du football est essentiellement laïque. La culture des fans du football, qui unit les nations et les villes du monde entier autour de leurs équipes favorites, est devenue un autre fossé dans la culture israélienne, créant deux groupes qui ont deux passions différentes le même jour.
« Il y a une culture séculaire des sports qui n’a aucun lien avec le Shabbat et les juifs religieux veulent faire partie de celui-ci », a déclaré Avner Michaeli, un conseiller pour jeune de Tzav Pie qui est laïc. « Quand j’étais gamin, mon monde entier le samedi était le football. Donc, en tant que Juif religieux, vous pourriez dire : ‘ne vous affolez pas, c’est juste du football’. Tout comme un Juif laïc peut dire à un Juif religieux, ‘on est en 2016, pourquoi ne conduisez-vous pas [pendant le Shabbat] ? ».
Chacune des 1 200 équipes de football des jeunes d’Israël, pour les enfants âgés de 10 à 18 ans, est lié à l’une des 234 équipes professionnelles du pays. Les enfants passent un essai pour entrer dans la ligue des jeunes, et les meilleurs athlètes sont préparés pour jouer pro. Le week-end abrégé d’Israël commence le vendredi après-midi et se termine le samedi soir ; les équipes jouent le samedi après-midi parce que les jeux de fin de semaine sont plus pratiques pour les familles.
Jusqu’à ce que Tzav Pie ne commence à s’occuper des équipes de jeunes il y a 12 ans, les joueurs de football religieux devaient soit rompre le Shabbat pour jouer ou abandonner le sport.
Moshe Yazdi, qui maintenait les entraîneurs de l’équipe Tzav Pius à Pardes Hanna, une ville entre Haïfa et Tel-Aviv, a grandi dans un cadre religieux mais aimait le football. Il a commencé à jouer à 16 ans. Il avait été accepté dans l’équipe locale de jeunes et se faufilait le samedi après-midi, sans le dire à ses parents, pour participer aux matchs et prenait le bus de l’équipe, si cela était nécessaire.
Les équipes Tzav Pius jouent maintenant les après-midi en semaine et la ligue exige des équipes rivales de planifier les matchs en conséquence. Pourtant, des difficultés peuvent surgir. Une équipe Tzav Pie avait oublié de demander un report de match et les joueurs ont dû marcher 8 kilomètres d’une ville à l’autre plutôt que de violer Shabbat en conduisant. L’année dernière, une équipe a dû passer la nuit dans une synagogue pour pouvoir jouer un match le samedi.
« Cela ne dérange pas qu’ils jouent en milieu de semaine », a déclaré Iddo Diamant, le directeur du programme de football Tzav Pie XII. « Les enfants viennent jouer au football. Voilà ce qui est bien à ce sujet. Ils ne se soucient pas de savoir qui est religieux ou laïc ».
Fondé après l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin en 1995 qui a alimenté les tensions amères entre religieux laïcs en Israël, Tzav Pie gère un réseau d’écoles mixtes religieux-laïc, des jardins d’enfants et des camps d’été qui favorisent ce qu’il appelle une société « intégrée ».
Tzav Pie – littéralement un « ordre de réconciliation », un jeu de mot avec la phrase hébreu pour un avis de conscription – n’hésite pas à faire la promotion de son message de coexistence pendant les entraînements.
Plusieurs fois par mois, avant que les enfants ne fassent des exercices et ne se mêlent, ils assistent à une séance d’information d’une heure sur le terrain, avec des jeux et des exercices conçus pour leur inculquer la tolérance et l’appréciation du pluralisme. Certaines activités visent également à lutter contre le racisme parmi les fans et les joueurs de football israéliens.
Dans un exercice, l’équipe des 13 ans de la ville est divisée en deux groupes. L’un a été autorisé à jouer avec les règles normales, avec un avantage : avoir deux gardiens de but. L’autre groupe jouait avec un seul gardien de but et ses joueurs ne pouvaient toucher le ballon que deux fois avant de faire la passe. L’exercice visait à enseigner aux enfants comment gérer une dynamique avec un pouvoir inégal entre les deux groupes.
Michaeli, qui dirige les exercices, a gagné en expérience en jouant avec des groupes venant d’horizons différents. Élevé dans un kibboutz, il a grandi en jouant dans une ligue avec des enfants de la ville, arabes et juifs. Alors Michaeli a expliqué que même si les enfants appréciaient les activités éducatives, ils ne réussissent pas toujours. Il a parlé d’un exercice qui abordait le fait de rompre le Shabbat pour jouer un match – le dilemme de base sur lequel Tzav Pie se penche. Le débat qui a suivi a fini par diviser l’équipe le long des lignes religieuses et laïques.
« C’est tout beau en théorie, mais en pratique, cela n’est pas toujours le cas », a déclaré Michaeli.
« Tout le monde défend sa position et n’est pas prêt à renoncer à lâcher du leste. Le laïc restera laïc, mais je pense que les enfants de l’équipe seront un peu plus ouverts ».
Bien que Tzav Pie permet à Yoel, 12 ans de jouer, il ressent toujours le conflit entre la religion et le football. S’il n’observait pas le Shabbat, a-t-il précisé, il pourrait rejoindre les meilleures équipes de jeunes et essayer de se frayer un chemin vers le sommet.
Mais Yoel est certain d’une chose : même s’il apprécie les exercices de coexistence, il préférerait jouer les matchs.
« Je préférerais avoir moins d’activités », a-t-il admis. « Les enfants ne les apprécient pas. Nous sommes éduqués à l’école ».
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