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Latifa Ibn Ziaten et Antonio Guterres reçoivent le prix Zayed de la fraternité

La mère d'Imad Ibn Ziaten multiplie rencontres et projets éducatifs pour accompagner les jeunes depuis l'assassinat de son fils par Mohamed Merah

Latifa Ibn Ziaten a créé l’association « Imad Ibn Ziaten pour la jeunesse et la paix ». (Crédit : Facebook)
Latifa Ibn Ziaten a créé l’association « Imad Ibn Ziaten pour la jeunesse et la paix ». (Crédit : Facebook)

Pour prévenir les dérives sectaires et extrémistes, il faut avant tout « investir dans l’accompagnement des jeunes », plaide Latifa Ibn Ziaten, figure de la lutte contre la radicalisation en France, qui recevra jeudi un prix international aux Émirats arabes unis.

Cette Franco-Marocaine de 61 ans multiplie les rencontres et projets éducatifs pour accompagner les jeunes depuis l’assassinat de son fils par le jihadiste Mohammed Merah, le 11 mars 2012, dans le sud de la France.

Pour son engagement, le prix Zayed de la fraternité lui sera remis jeudi (ainsi qu’au secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres), lors d’une cérémonie virtuelle à Abou Dhabi, présentée par le pape François et le grand imam d’Al-Azhar. « C’est un grand honneur » et « ça va vraiment m’aider dans mon travail, dit-elle, « très touchée ».

« Après l’assassinat de mon fils, j’ai voulu créer quelque chose, pour qu’il ne soit pas oublié », rappelle-t-elle, près de huit ans après la mort à Toulouse (sud-ouest) d’Imad, 30 ans, première victime de Mohammed Merah qui avait tué deux autres soldats, Abel Chennouf, Mohamed Legouad et le rabbin Jonathan Sandler et deux de ses enfants, Gabriel, 3 ans, et Aryeh, 6 ans ainsi qu’une autre petite fille de 8 ans, Myriam Monsonégo en mars 2012 à l’école Ozar HaTorah de Toulouse.

Les portraits des sept victimes – Imad Ibn Ziaten, Abel Chennouf, Mohamed Legouad, Gabriel Sandler, Aryeh Sandler, Myriam Monsonégo et Jonathan Sandler – de Mohamed Merah pendant une cérémonie de commémoration organisée par le CRIF à Toulouse, le 19 mars 2014. (Crédit : Rémy Gabalda/AFP)

« La moitié de mon cœur est partie avec lui et je ne voulais pas qu’il soit oublié. Tout le travail que je fais me permet de voir mon fils grandir chaque jour à travers l’association. »

L’association appelée « Imad pour la jeunesse et la paix » organise des interventions dans des écoles, des maisons d’arrêt ou des foyers, mais aussi des projets éducatifs comme la restauration d’un musée au Maroc par « une vingtaine de jeunes en difficulté, issus d’un milieu social défavorisé » en 2018.

Dans ses nombreuses conférences, Latifa Ibn Ziaten raconte que sa volonté de « tendre la main vers l’autre » lui est venue d’une discussion avec des jeunes, dans le quartier de Toulouse où habitait Mohammed Merah.

Des jeunes « rejetés de partout »

« Ils m’ont dit : ‘Madame, vous ne regardez pas la télé ? Mohammed Merah, c’est un martyr.’ Là je me suis dit qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Je leur ai demandé : ‘Comment pouvez vous dire que c’est un martyr ? C’est un assassin. Je suis la mère d’Imad.’ J’ai vu leur visage changer, ils m’ont répondu : ‘On est vraiment désolé, mais regardez où on habite. La République nous a oubliés.' »

Latifa Ibn Ziaten à l’ambassade d’Israël en France. (Crédit : AFP)

Pour Latifa Ibn Ziaten, le « piège » de la radicalisation plane sur les jeunes « livrés à eux-mêmes », « fatigués et rejetés de partout ».

« Il faut réussir à savoir ce qu’il se passe dans la tête d’un jeune et quelles solutions on peut lui proposer », résume-t-elle. « Quand vous n’avez pas les chances à disposition pour réussir, quelqu’un peut vous récupérer. »

L’accompagnement quotidien des enfants placés en foyer est un des enjeux clefs, juge-t-elle, tout comme l’accès à des assistants de service social dans tous les établissements scolaires et la réinsertion des détenus à leur sortie de prison.

Si elle salue « le travail » fait par le gouvernement, notamment sur la fermeture de certaines mosquées soupçonnées de prôner un islam radical, Latifa Ibn Ziaten prône surtout l’engagement des citoyens.

Les fossettes rieuses, elle expose d’un ton calme le principe fondateur de sa démarche : « Tant qu’un enfant est en difficulté, il ne faut pas lâcher. »

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