Pour soutenir le désir de manifester des lycéens, un directeur de Tel Aviv démissionne
200 lycéens comptaient annoncer leur refus de servir dans l'armée, invoquant la refonte judiciaire et la présence israélienne en Cisjordanie
Le directeur d’une école de Tel Aviv a annoncé sa démission dimanche, après que le conseil d’administration de l’établissement a annulé une manifestation organisée par quelque 200 élèves et anciens élèves qui entendaient annoncer leur refus de faire leur service militaire.
Les élèves du célèbre lycée Herzliya Hebrew Gymnasium de Tel Aviv avaient déclaré qu’ils présenteraient une lettre dans laquelle ils proclameraient leur refus de servir à l’occasion de cette manifestation, prévue pour dimanche, afin de protester contre les projets de refonte du système judiciaire du gouvernement et contre l’occupation de la Cisjordanie par Israël, qui dure depuis des dizaines d’années.
Le conseil d’administration de l’école s’est réuni samedi et a décidé d’interdire la manifestation, contrairement à la décision du directeur Zeev Degani.
Ce dernier a annoncé dimanche au conseil d’administration que, suite à la décision « d’empêcher les anciens élèves de l’école de faire entendre leur voix, contre mon avis, j’ai le regret d’annoncer que je ne peux plus travailler sous votre supervision ».
Les adolescents avaient prévu d’organiser des « cours alternatifs sur la pelouse portant sur la véritable démocratie et la résistance », avec des intervenants comprenant des activistes, un groupe de jeunes communistes et des représentants de plusieurs organisations de défense impliquées dans le dérèglement climatique, les droits des transsexuels et la documentation des violations présumées des droits en Cisjordanie.
« Nous devons arrêter la refonte judiciaire et nous devons arrêter de nous enrôler dans une armée qui est au service des colonies et de l’occupation », a déclaré Tal Mitnick, 17 ans, l’un des organisateurs de l’initiative « Jeunesse contre la dictature », dans une déclaration sur vidéo. « Nous avons décidé d’utiliser notre pouvoir, en tant que prochains appelés au service militaire, pour protester et dire que nous ne nous enrôlerons pas ».
À la suite de cette déclaration, le ministère de l’Éducation a menacé de supprimer le financement de l’école. Le directeur général adjoint du ministère, Meir Shimoni, a écrit à l’école pour lui signifier que « l’utilisation des locaux de l’école comme tribune pour des opinions tendancieuses (…) est inappropriée et irrespectueuse ». Il a également affirmé que l’événement, tel qu’il était prévu, était contraire à la réglementation.
Les étudiants ont déclaré que le conseil « a cédé à l’assaut anti-démocratique qui tente de faire taire nos voix…. Nous n’arrêterons pas et nous organiserons l’événement – à l’intérieur ou à l’extérieur de l’école ». Ils ont remercié Degani de les « avoir soutenus et de ne pas avoir cédé ».
L’organisation de droite Im Tirtzu a salué la décision du conseil, la qualifiant de « victoire de la raison, victoire du sionisme… ». Nous remercions tous ceux qui ont exprimé leur colère justifiée et demandé que soit interdit cet événement honteux. La société israélienne a encore des valeurs ».
On a vu à plusieurs reprises de petits groupes de lycéens refuser de servir dans l’armée israélienne pour protester contre la politique du pays à l’égard des Palestiniens. Israël accorde des exemptions de service militaire pour un certain nombre de raisons, notamment des problèmes de santé mentale et médicale ou des objections religieuses. Les Arabes israéliens sont pour leur part exemptés, mais les objecteurs de conscience le sont rarement. Le refus de servir est l’une des questions qui divisent le plus la société israélienne.
La référence faite dans la lettre à la refonte du système judiciaire – les efforts du gouvernement pour affaiblir le pouvoir judiciaire – intervient alors que des milliers de réservistes protestent en masse et ont averti qu’ils cesseraient de se présenter au service volontaire, arguant que les projets du gouvernement visant à affaiblir le pouvoir judiciaire rendraient Israël antidémocratique.
Certains réservistes ont depuis mis leur menace à exécution, à la suite de l’adoption par la coalition, en juillet, de la « loi de raisonnabilité », qui prive les juges du pouvoir de réexaminer les décisions prises par les élus. Aucun chiffre officiel n’a été publié sur le nombre de réservistes qui, jusqu’à présent, ne se sont pas présentés au service.
De hauts responsables de Tsahal ont averti que les protestations des réservistes avaient un impact de plus en plus préjudiciable sur l’état de préparation de l’armée, s’attirant les reproches du Premier ministre Benjamin Netanyahu, d’autres législateurs et de partisans du gouvernement.
La coalition de Netanyahu a qualifié les manifestations des réservistes de forme dangereuse et sans précédent de chantage politique de la part de l’armée. Certains législateurs de la coalition ont suggéré que les manifestations s’apparentaient à une tentative de coup d’État militaire.