Trump confie à ses alliés juifs Stephen Miller et Lee Zeldin des postes de premier plan
Miller, partisan de la ligne dure en matière d'immigration, à l'origine notamment de l'interdiction de voyager pour les musulmans, occupera le poste de chef adjoint du cabinet ; l'ex-député dirigera l'Agence pour la protection de l'environnement
Donald Trump a nommé Stephen Miller au poste de chef de cabinet adjoint, alors que l’ancien président américain va faire son retour pour un deuxième mandat. L’homme était l’un des conseillers juifs de premier plan de Trump lorsque ce dernier était à la Maison Blanche, et il avait été à l’origine de la plupart des politiques les plus radicales sur l’immigration qui avaient été adoptées sous sa première administration.
Miller prendra ses nouvelles fonctions après une campagne électorale qui a été l’occasion, pour Trump, de promettre l’expulsion massive de millions d’immigrants clandestins – une priorité pour lui, a-t-il expliqué. Miller a évoqué très largement la manière dont Trump pouvait atteindre cet objectif, disant au New York Times, l’année dernière, que le président élu ferait « tout ce qui sera nécessaire » pour y parvenir.
Trump ne s’est pas encore ouvertement exprimé sur la nomination de Miller depuis qu’elle a été annoncée par CNN dans la matinée de lundi, mais le vice-président élu JD Vance a salué cette désignation en parlant d’un « nouveau choix fantastique de la part du président ».
Pendant le premier mandat de Trump, Miller, qui est aujourd’hui âgé de 39 ans, avait aidé à l’élaboration de certaines de ses mesures les plus controversées en matière d’immigration. Il y avait eu l’interdiction d’entrée sur le sol américain qui avait été prononcée à l’encontre d’un certain nombre de pays à majorité musulmane ainsi qu’une politique qui avait séparé les enfants des immigrants sans papiers de leurs parents. Un large éventail de groupes juifs, issus de tout le spectre religieux, avaient fermement condamné ces deux politiques. La séparation des familles avait été l’une des initiatives qui avaient inspiré le mouvement activiste Never Again Action, qui milite pour les droits des immigrants clandestins.
Miller espérait également, semble-t-il, éliminer toutes les admissions de réfugiés aux États-Unis, démantelant une politique qui avait été mise en place dans le sillage de la Shoah.
Depuis le départ de Trump de la Maison Blanche, Miller a travaillé comme président du groupe conservateur America First Legal, qui tente de promouvoir la même idéologie via le système judiciaire.
Il est presque certain aujourd’hui que Miller jouera un rôle important dans la politique d’immigration qui sera proposée par Trump – et il a longuement évoqué de la manière dont il prendrait des mesures dans ce domaine. Le président élu a promis de lancer « la plus grande vague d’expulsions de toute l’Histoire américaine » dès son retour à la Maison Blanche.
Miller a laissé entendre que l’administration pourrait prendre d’autres mesures sans précédent pour mettre en œuvre ces expulsions, notamment en déployant des troupes de la Garde nationale, dans les états rouges, pour entrer dans les états bleus moins coopératifs. Il a également suggéré de placer les migrants détenus dans de « grands centres de détention dont le fonctionnement ressemblera à celui des centres de transit » – qui avaient été décrits comme des camps. Miller a déclaré au Times que ces installations seraient construites « sur des terrains vides au Texas et à proximité de la frontière. »
Il a également défendu une politique nativiste lors de la campagne de Trump. Le mois dernier, il avait pris la parole lors d’un rassemblement controversé au Madison Square Garden de New York qui avait été comparé à un rassemblement pro-nazi qui s’y était tenu en 1939.
« Qui va défendre les jeunes filles, les femmes et les familles d’Amérique ? », avait-il interrogé. « Qui va se lever et dire : ‘Les cartels ont disparu, les gangs ont disparu, l’Amérique est pour les Américains et uniquement pour les Américains’? »
Miller, qui est lui-même descendant d’immigrants juifs, avait épousé à l’hôtel Trump DC Katie Waldman, qui est également juive et qui a pris son nom de famille, pendant le premier mandat du nouveau président. Le mariage avait été célébré par le rabbin Aryeh Lightstone, qui avait joué un rôle dans les accords d’Abraham conclus par l’administration Trump et qui avaient permis à Israël de normaliser ses relations avec plusieurs de ses voisins arabes.
Katie Miller avait été attachée de presse du premier vice-président de Trump, Mike Pence, et du département de la sécurité intérieure. Il est difficile de dire pour le moment si elle assumera, elle aussi, une fonction au sein de la prochaine administration Trump. Alors que la politique portant sur la séparation des familles battait son plein, elle s’était rendue dans des centres de détention à la frontière mais elle avait déclaré qu’elle ne ressentait aucune compassion pour les immigrants qui y étaient détenus.
Miller s’est à plusieurs reprises attiré l’opprobre de dirigeants d’organisations et de militants juifs, nombre d’entre eux invoquant la défense historique des droits des immigrés par les Juifs américains. Pendant le premier mandat de Trump, toute une série d’élus et de groupes juifs, y compris les mouvements conservateur, réformé et reconstructionniste, avaient demandé la démission de Miller après la fuite de courriels marqués par l’utilisation d’une rhétorique nationaliste.
Il est arrivé à Stephen Miller d’invoquer son identité juive pour répondre à ses détracteurs. En 2019, il avait déclaré à Fox News qu’il était ciblé parce qu’il était Juif.
« C’est une tentative de la part du Parti démocrate d’attaquer et de diaboliser un membre juif de l’administration », avait-il assuré à l’époque, alors qu’il répondait à des informations portant sur ses préoccupations, proches de celles exprimées par le mouvement suprématiste blanc. « Et ne vous y trompez pas, il y a un profond filon d’antisémitisme qui traverse le Parti démocrate d’aujourd’hui. »
Ce qui n’a pas empêché ses détracteurs Juifs de se rappeler à son bon souvenir cette année. Juste avant les élections, un ancien rabbin de Miller a soutenu Kamala Harris, la rivale démocrate de Trump, déclarant à propos de Miller : « Je me suis senti gêné et honteux qu’un Juif occupant un poste de direction puisse donner une voix et un soutien à une telle inhumanité. »
Zeldin pour l’EPA
Lundi également, Trump a annoncé que Tom Homan, son ancien directeur par intérim du Service de l’immigration et des douanes, deviendrait le « tsar des frontières » dans le cadre de sa deuxième administration. Homan, partisan enthousiaste de la politique de répression qui est celle de Trump en matière d’immigration, avait été réprimandé par un survivant de la Shoah lors du premier mandat du président républicain.
Trump a également fait savoir, lundi, qu’il nommerait l’ancien député juif républicain, Lee Zeldin, à la tête de l’Agence de protection de l’environnement.
« Il veillera à ce que les décisions de déréglementation soient justes et rapides et il s’assurera qu’elles seront bien adoptées de manière à libérer toute la puissance des entreprises américaines, tout en respectant les normes environnementales les plus élevées, avec notamment l’air et l’eau qui seront les plus propres de la planète », a dit Trump dans un message qui a été publié sur sa plateforme de réseaux sociaux Truth Social.
Trump cherchera probablement à annuler de nombreuses règles administrées par l’EPA sur la question de la combustion des énergies fossiles – notamment une règle qui réduit les émissions de carbone des centrales électriques et une autre qui diminue les émissions des véhicules.
« Nous rétablirons la domination énergétique des États-Unis, nous revitaliserons notre industrie automobile pour ramener les emplois américains et nous ferons des États-Unis le leader mondial de l’IA », a écrit Zeldin dans un post publié sur sur X.
Zeldin avait représenté le 1er district du Congrès de New York, dans l’Est de Long Island, de 2015 à 2023. Il s’était aussi fait connaître davantage en 2022 en menant une campagne étonnamment compétitive pour le poste de gouverneur de l’État de New York. Il avait toutefois perdu face à la gouverneure Kathy Hochul avec moins de sept points d’avance – le meilleur score obtenu par un républicain dans ce scrutin depuis la réélection du gouverneur George Pataki, il y a deux décennies.
Lors de sa campagne électorale pour 2022, Zeldin s’était appuyé sur ses origines juives pour rallier les communautés orthodoxes, racontant aux électeurs de Brooklyn que son grand-père avait fondé une synagogue et que sa mère avait enseigné dans une yeshiva de Brooklyn. À l’époque, les médias et les militants accusaient le système des yeshivas de ne pas respecter les normes de l’État en matière d’éducation laïque – ce qui avait transformé la question en enjeu majeur pour les électeurs orthodoxes.
Zeldin avait rejoint le conseil d’administration de la Coalition juive républicaine peu après cette élection.
Zeldin était un fervent défenseur de Trump lorsqu’il siégeait au Congrès – mais il s’était tenu à l’écart de ce dernier pendant la course au poste de gouverneur de l’État de New York, où l’ancien président était alors impopulaire.