Trump « tout sauf décidé » à se retirer de l’accord sur le nucléaire – médias
Téhéran a expliqué que l'Iran ne resterait pas dans l'accord en cas de retrait des Etats-Unis ; Zarif a rejeté les efforts européens de négociation d'un nouveau pacte

Le président américain Donald Trump est « tout sauf décidé » àse retirer de l’accord sur le nucléaire iranien et pourrait ne pas s’en extraire complètement, a fait savoir Reuters jeudi.
Deux responsables de la Maison Blanche et une troisième source ont fait savoir à l’agence de presse que le président mettrait probablement un terme aux dispenses portant sur la levée des sanctions iraniennes le 12 mai, lorsqu’il faudra signer leur renouvellement. Néanmoins, l’un d’entre eux a indiqué qu’il était possible qu’il décide d’un compromis et qu’il ne s’agisse pas d’une « sortie complète », même si la forme que prendrait une telle décision reste encore indéterminée.
La source a précisé que la rencontre, la semaine dernière, entre Trump et le président français Emmanuel Macron pourrait avoir poussé l’occupant de la Maison Blanche à rester dans le pacte d’une manière ou d’une autre.
Macron a fait une visite d’Etat de trois jours à Washington, principalement pour convaincre Trump de ne pas abandonner l’accord sur le nucléaire de 2015 négocié entre Téhéran et six puissances mondiales.
Macron a répété mercredi son engagement envers l’accord mais a admis qu’il devait être renforcé.
« Je ne sais pas ce que le président décidera le 12 mai », a confié Macron au cours d’une visite à Sydney.
Le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne – les trois pays européens qui ont signé le pacte – auraient tenté de persuader Trump de ne pas l’abandonner.

Un haut-conseiller du chef suprême iranien Ali Khamenei a annoncé jeudi que la république islamique ne resterait pas dans l’accord si les Etats-Unis décidaient de se retirer.
« Si les Etats-Unis se retirent du pacte sur le nucléaire, nous n’y resterons pas », a déclaré son conseiller en politique étrangère Ali Akbar Velayati, des propos repris par la télévision d’Etat.
« L’Iran accepte l’accord sur le nucléaire tel qu’il a été préparé et nous n’accepterons pas qu’il y soit fait ni ajout, ni suppression », a-t-il noté.
« Même si les pays alliés aux Etats-Unis, en particulier les Européens, cherchent à réviser l’accord sur le nucléaire… L’une de nos options sera de nous en retirer », a ajouté Velayati.
« Je veux simplement dire que quelle que soit la décision, nous devrons alors nous préparer à une négociation et une convention bien plus larges parce que je pense que personne ne veut d’une guerre dans la région et que personne ne veut d’escalade en termes de tensions dans la région », a-t-il dit.
Pour sa part, sur YouTube, le ministre des Affaires étrangères iranien a critiqué la menace de Trump de déserter l’accord et a également dénoncé les propos de l’Union européenne évoquant un nouveau traité, affirmant que Téhéran ne « renégociera ni n’ajoutera quoi que ce soit » au pacte.
La vidéo de Mohammad Javad Zarif, qui a été également postée sur la plateforme de réseau sociaux préférée de Trump, Twitter, a semblé s’adresser à l’opinion publique après qu’il s’est précédemment adressé aux médias, sur tout le territoire américain, pour défendre l’accord.
Cette vidéo de cinq minutes a montré Zarif derrière son bureau, délivrant son message sur l’accord. Il y explique tout d’abord les origines du pacte puis évoque Trump en critiquant l’Union européenne qui, selon lui, « offre aux Etats-Unis plus de concessions sorties de notre poche ».
« A 11 occasions depuis lors, l’observatoire du nucléaire de l’UE a confirmé que l’Iran a mis en oeuvre toutes ses obligations », a expliqué Zarif, qui a étudié aux Etats-Unis, dans un anglais teinté d’accent américain. « En comparaison, les Etats-Unis ont constamment contrevenu à l’accord, en particulier en harcelant les autres pour les empêcher de faire du commerce avec l’Iran ».
Il a fustigé les nations européennes qui tentent de convaincre Trump qu’un nouvel accord pourrait être trouvé pour combler ce que le président considère comme des failles dans le pacte.
Iran's Message: There is Only One Way Forward, and It's U.S. Compliance; Not Appeasement. #IranDeal https://t.co/CBehxCAv26
— Javad Zarif (@JZarif) May 3, 2018
« Il apparaît maintenant que la réponse apportée par certains Européens est d’offrir aux Etats-Unis plus de concessions – sorties de notre poche », a continué Zarif. « Cet apaisement comprend les promesses d’une nouvelle convention qui inclurait des éléments que nous avions décidé d’exclure au commencement de nos négociations, notamment les capacités de défense et l’influence régionale ».
« Nous n’avons attaqué personne depuis des siècles », a-t-il continué, « mais nous avons été envahis, plus récemment par Saddam Hussein, qui était appuyé par les Etats-Unis et ses alliés régionaux ».
Zarif a ajouté : « Etablissons-le clairement une bonne fois pour toute : Nous n’externaliserons pas notre sécurité pas plus que nous renégocierons ou ferons des ajouts dans un accord que nous avons d’ores et déjà appliqué de bonne foi ».
Il n’y a pas eu de réponse de Washington dans l’immédiat.
Dans la vidéo, Zarif a également semblé se moquer de Trump, magnat de l’immobilier, en disant : « Pour le dire dans des termes propres au secteur de l’immobilier, quand vous achetez une maison et emménagez avec votre famille dedans, ou que vous la détruisez pour construire un gratte-ciel, vous ne revenez pas deux ans après pour renégocier le prix ».
Dans une possible allusion voilée à la présentation faite en direct à la télévision par le Premier ministre Benjamin Netanyahu de documents confisqués par le Mossad sur le programme nucléaire clandestin de la république islamique, Zarif a estimé que les Etats-Unis avaient d’ores et déjà rompu l’accord passé en faisant des « allégations caricaturales ».

« S’appuyer sur des allégations caricaturales, ressorties plus d’une décennie plus tard et qui ont été gérées par l’IAEA pour trouver un prétexte pour annuler l’accord ne trompe personne », a-t-il dit.
Netanyahu a fait savoir que des dizaines de milliers de documents découverts récemment par des agents des renseignements à Téhéran avaient prouvé que le principal ennemi du pays, l’Iran, avait un programme nucléaire secret qu’il pouvait faire passer à l’action quand la république islamique le voulait.
Mais certains analystes et partisans de l’accord sur le nucléaire, et notamment l’AIEA, chargée de contrôler la conformité de l’Iran avec l’accord sur le nucléaire signé en 2015, ont clamé que Netanyahu avait présenté des détails déjà connu et n’avait pas été en mesure de produire des preuves attestant du fait que l’Iran ne respectait pas le pacte.