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Ukraine: malaise autour d’un hommage à des collabos nazis dans un cimetière juif

Le rabbin Yaakov Dov Bleich a déclaré que la cérémonie pour l'Armée insurrectionnelle ukrainienne était un compromis pour retirer des croix installées dans un cimetière juif

Yaakov Dov Bleich (d), grand-rabbin d'Ukraine, avec l'ambassadeur canadien en Ukraine Roman Waschuk, (g) et le métropolite d'Ukraine Epiphane, à la tête de l'Eglise orthodoxe, le 21 août 2019. (Crédit : Aliona Nikolaievych/Barcroft Media via Getty Images/via JTA)
Yaakov Dov Bleich (d), grand-rabbin d'Ukraine, avec l'ambassadeur canadien en Ukraine Roman Waschuk, (g) et le métropolite d'Ukraine Epiphane, à la tête de l'Eglise orthodoxe, le 21 août 2019. (Crédit : Aliona Nikolaievych/Barcroft Media via Getty Images/via JTA)

Certains ont estimé que c’était un compromis. D’autres l’ont perçu comme une absolution du rôle de l’Ukraine pendant la Shoah.

Le grand-rabbin d’Ukraine et d’autres dirigeants religieux ont contribué à l’inauguration d’un monument en hommage aux membres d’un mouvement ultra-nationaliste dont les adeptes ont collaboré avec les nazis.

Le rabbin Yaakov Dov Bleich a pris part à la cérémonie du 21 août destinée à commémorer les membres de l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), et de sa branche activiste, l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA), près d’un cimetière juif dans la ville de Sambir.

Selon des historiens de la Shoah, ces deux groupes sont responsables de la mort de milliers de Juifs et de 100 000 Polonais pendant la Seconde Guerre mondiale.

La ville de Sambir, dans l’ouest de l’Ukraine, a été le théâtre d’un pogrom en 1941, qui a amorcé l’extermination de la population juive locale, attribuée, par certains, à l’OUN.

Bleich a déclaré que la cérémonie a eu lieu après un compromis censé apaiser les Juifs de la ville. Il a déclaré qu’au terme d’intenses négociations entre militants juifs et résidents locaux, les deux partis ont accepté que des croix érigées en l’an 2000 dans le cimetière soient retirées si le monument en hommage à l’OUN était érigé sur le côté du cimetière, où il n’y a aucune tombe juive.

« La question est : quel est notre objectif ici ? Ne pas commémorer les Ukrainiens mais de retirer les croix et d’avoir un mémorial adapté aux Juifs qui ont été tués », a expliqué Bleich au JTA. « Ce dont vous parlez, c’est de l’émotion de la part des familles qui ne veulent pas de croix sur les tombes de leurs proches et pour cela, ils sont prêts à faire des compromis. »

« Tant que ces croix sont là, ces âmes ne connaissent pas le repos », a-t-il ajouté.

Les détracteurs de Bleich l’ont accusé d’avoir succombé aux efforts d’absolution du discutable patrimoine de l’OUN.

« Je suis sans mot », a déclaré Efraim Zuroff, du Centre Simon Wiesenthal. « Il est inconcevable qu’un rabbin participe à une telle cérémonie. C’est clairement une absolution des horribles crimes commis contre les Juifs de Sambir et cela ne fait que renforcer la très problématique tendance de l’Ukraine à dissimuler les crimes de la Shoah commis par des Ukrainiens. »

En 1941, peu après l’invasion allemande à Sambir, entre 50 et 100 Juifs ont été tués dans un pogrom commis par des Ukrainiens.

La quasi-totalité des 6 000 résidents juifs seront tués par les nazis.

Les corps des 1 200 dernières victimes ont été jetés dans une fosse commune du cimetière en 1943.

Statue de Stepan Bandera à Lviv, Ukraine, septembre 2014. (Avec l’aimable autorisation d’Andrey Syasko/via JTA)

Selon Yad Vashem, l’autorité israélienne sur la Shoah, l’OUN a combattu aux côtés de l’armée allemande contre les troupes soviétiques. Après que le groupe a été démantelé sous l’occupation nazie, ses membres ont continué à collaborer avec les nazis.

Durant les années qui ont suivi le régime communiste, Sambir ne comptait aucun Juif. Cependant, en 2000, un philanthrope juif canadien a érigé un monument en pierre en mémoire des victimes de la Shoah. Les résidents ont dégradé ce monument et installé, à sa place, des croix en bois de 9 mètres de haut.

Les résidents affirment que ces croix honorent les 17 jeunes membres de l’OUN qui ont été abattus par les nazis en 1944 et enterrés dans le cimetière juif. Si Bleich admet que cette histoire n’est que « rumeur », il a également dit qu’elle est « partiellement vérifiée » et que l’accord consistant à établir un monument d’hommage à l’OUN en valait la peine.

Per Rudling, un historien suédois expert de l’OUN, a déclaré que le récit des Ukrainiens était « douteux » et que l’OUN et les nazis avaient repris leur collaboration en août 1944.

« C’est toujours la même histoire », a estimé Rudlin. « Ils tentent de s’approprier la souffrance juive. »

‘Le dernier Juif de Vinnitsa’’. Cette photographie montre un membre des Einsatzgruppe nazis sur le point d’abattre un Juif agenouillé devant un charnier plein à Vinnitsa, en Ukraine, en 1941. (Crédit : capture d’écran YouTube)

« Ce qu’ils ont fait, c’est installer des crucifix et des monuments sur des tombes juives. Ils l’ont fait dans plusieurs localités de l’Ukraine occidentale. Ils en ont mis une à Babi Yar, s’appropriant Babi Yar et le transformant en sanctuaire de la souffrance des nationalistes ukrainiens. »

Babi Yar est un site près de Kiev où 33 000 Juifs ont été tués par des soldats allemands en septembre 1941.

Si Bleich a déclaré que les membres de l’OUN à qui est dédié le mémorial de Sambir étaient des jeunes qui n’étaient pas impliqués dans le meurtre de Juifs, Rudling a souligné que l’OUN, en tant qu’organisation, était très impliquée dans le meurtre de Juifs.

« Mettre une croix de l’OUN sur le lieu d’un pogrom où des Juifs ont trouvé la mort est bien pire que des croix », a-t-il dit.

Grzegorz Rossolinski-Liebe, un autre spécialiste de l’OUN, a approuvé. Il a expliqué au JTA que « la tendance générale est d’intégrer l’OUN et l’UPA à l’histoire nationale ukrainienne, que tous les Juifs d’Ukraine doivent accepter ».

Après le massacre du ravin de Babi Yar à Kiev, en Ukraine, au cours duquel 33 000 Juifs ont été assassinés entre les 29 et 30 septembre 1941. (domaine public)

« Cela ne fonctionne que si les deux groupes [Juifs et Ukrainiens] oublient la participation de l’OUN et de l’UPA à la Shoah et se souviennent des nationalistes ukrainiens comme des victimes des nazis », a-t-il dit.

Bleich, cependant, adopte un point de vue différent. Il indique que s’il estime que l’OUN est illégitime, « quand il est question des émotions des Juifs dont les proches y sont enterrés, il faut parvenir à une forme de compromis qui fonctionnera. Personne n’est content, mais nous avons atteint l’objectif, qui est de laisser ces personnes reposer en paix ».

Pour le moment, seulement l’une des croix a été retirée, en dépit de l’accord. Bleich a déclaré qu’il était confiant que les Ukrainiens tiendront leur part de l’accord et qu’il servira de précédent pour « leur faire retirer les croix » d’autres cimetières juifs.

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