Un tiyoul en fauteuil roulant dans la Vieille Ville de Jérusalem plus accessible
Après un projet de rénovation de neuf ans, les touristes et citoyens en situation de handicap peuvent maintenant accéder à la plupart des fameuses attractions de Jérusalem
George (ce n’est pas son vrai nom) vit entre deux ruelles étroites dans le quartier chrétien de Jérusalem. Depuis 20 ans, il est immobilisé sur un fauteuil roulant – et l’endroit le plus éloigné de chez lui où il a été en mesure de se rendre est un petit jardin pavé, situé aux abords de sa porte. Pendant de longues années, il s’est assis là, jour après jour, sur un vieux matelas placé pour lui par quelqu’un.
Et ce n’était pas uniquement dans le quartier chrétien que les rues et allées étaient impraticables pour son fauteuil roulant.
C’était le cas dans presque toute la Vieille Ville, à l’exception du quartier juif.
Recevez gratuitement notre édition quotidienne par mail pour ne rien manquer du meilleur de l’info Inscription gratuite !
Heureusement, en 2010, quelqu’un, au sein de l’Autorité du développement de Jérusalem, a décrété que cette situation était intolérable.
Vingt millions de shekels et neuf ans plus tard, 60 % des voies, dans les quartiers musulman, chrétien et arménien de la Vieille Ville, sont dorénavant accessibles en fauteuil roulant. Et l’accessibilité est possible dans 90 % des rues. Les travaux continuent, pour leur part, dans les 10 % restants.
Actuellement, les lieux saints des trois religions majeures à Jérusalem sont accessibles – au moins partiellement. Et George peut se rendre dans tous les quartiers de la Vieille Ville qu’il a toujours désiré visiter.
Cela ne signifie pas, bien sûr, que tout est parfait.
Se déplacer en fauteuil roulant peut s’avérer très mouvementé et exige un accompagnateur pour emprunter certaines montées et descentes difficiles. Mais ces travaux ont changé la vie des habitants de la Vieille Ville – et pour les touristes qui affluent pour en découvrir ses nombreux sites.
Avec notre amie Dina, nous avons tenté l’aventure par nous-mêmes. Nous avons choisi un dimanche matin, avant que la foule ne se presse sur les marchés, dans les lieux saints et les ruelles.
Et voici ce que nous avons appris de notre visite en fauteuil roulant de la Vieille Ville est : parfois, il faut contourner les rues empruntées habituellement pour parvenir là où on désire aller. Mais quand on le fait, on se retrouve souvent dans des lieux et devant des panoramas que l’on aurait tristement manqués sans cela.
Nous avons commencé la journée à la porte de Sion et avons emprunté un trottoir en direction du mont du Temple. Là-bas, nous avons été rapidement aidés à l’entrée et sur la rampe qui mène au sommet.
Le mont Moriah – ou mont du Temple – est le site où Abraham aurait reçu l’ordre de sacrifier son fils. Des siècles plus tard, lorsque le roi David décida d’ériger un temple pour le Seigneur, il acquit les hauteurs du mont Moriah auprès du fermier jébuséen Araunah. Mais c’était le fils de David, Salomon, qui avait finalement pris en charge cette tâche sur ce site bien précis.
L’un après l’autre au cours des millénaires, le Premier temple puis le Second construit après furent détruits. Le mont Moriah devînt une décharge à ordures grouillant de déchets jusqu’à la conquête de Jérusalem par les Arabes musulmans, en l’an 638.
A l’époque de la chute de la ville, le calife Omar gouvernait le monde musulman. Comme les autres membres de sa confession, Omar vénérait un grand nombre des personnalités les plus importantes de l’Ancien testament. Il honorait également les lieux saints – et notamment ce sommet où Salomon avait érigé son Temple somptueux. À son arrivée sur le mont Moriah, Omar fut furieux de découvrir l’esplanade remplie de déchets. Il en ordonna le nettoyage (d’après certaines sources, il y aurait également participé) et érigea une mosquée simple en bois, construite à l’extrémité sud de la place du mont du Temple.
Les musulmans vénèrent le mont du Temple, qu’ils appellent Haram al-Sharif (Complexe sacré) et est considéré comme le troisième site le plus saint dans l’islam après la Mecque et Médine. Il héberge la mosquée al-Aqsa, construite en l’an 710, et le Dôme du rocher de forme octogonale et nappé d’or, bâti en l’an 691.
Notre fauteuil roulant a longuement arpenté l’ensemble du mont du Temple, ce qui nous a permis de découvrir des points de vue que nous aurions manqués si nous étions sortis par l’une des portes non accessibles aux personnes en situation de handicap.
Ainsi, nous avons pu observer l’arrière de la Porte dorée, bloquée, et dont l’ouverture a été récemment décidée de ce côté-là à l’occasion des prières musulmanes. Et avant de monter la rampe menant au Dôme du rocher, nous avons eu le plaisir de découvrir un point de vue de cette structure stupéfiante – un point de vue dont peu de visiteurs ont la chance de profiter.
Puis, nous nous sommes rendus avec aisance au mur Occidental, où des Juifs se recueillent 24 heures sur 24. Même s’il ne s’agit que d’une petite section du mur de soutènement qui entourait le Second temple, sa proximité avec le sanctuaire lui confère un statut sacré. Au cours des siècles, lorsqu’ils pouvaient accéder à la ville sainte, les Juifs se rendaient devant ce seul vestige du temple et pleuraient sa perte.
Au cours du 16e siècle, le gouvernant turc ottoman Soliman le Magnifique accorda au culte juif une portion minuscule du mur Occidental. Pendant l’ère ottomane, ce dernier incarnait l’espoir juif, la prière patiente et fervente.
Avec la division de Jérusalem en 1948, la Jordanie s’empara de la Vieille Ville, et même le modeste périmètre alloué par les Turcs fut dorénavant interdit aux Juifs. Mais le 7 juin 1967, Jérusalem-Est et Jérusalem-Ouest furent réunifiées. Quand le drapeau israélien fut fièrement hissé sur le mur Occidental, certains des parachutistes en uniforme de combat, qui avaient lutté pour soustraire la Vieille Ville au contrôle jordanien, ne purent contenir leur émotion et éclatèrent en sanglots.
Les Juifs et les non-Juifs glissent souvent des vœux sur papier dans les fissures du mur. Même en fauteuil roulant, nous sommes parvenus à nous en rapprocher suffisamment pour glisser notre souhait dans une minuscule crevasse.
En partant du mur, nous avons facilement emprunté la rue Al Wad (Haguy) qui mène au quartier musulman. Là-bas, nous avons pu observer avec attention l’un des projets les plus intéressants menés dans la Vieille Ville : des revêtements en métal recouvrant les canalisations et les fils hideux qui nuisaient autrefois à l’apparence de la ville.
Nous avons aussi découvert des voiturettes de golf et des vélos de livraison circulant avec aisance dans les ruelles et transportant touristes et marchandises.
Rue Haguy, nous avons franchi les troisième, quatrième et cinquième stations de la Via Dolorosa. Également appelée le Chemin de croix ou le chemin de la souffrance, elle représente le parcours suivi par Jésus de Nazareth depuis sa condamnation jusqu’à sa crucifixion. Nous avons été également ultérieurement en mesure de voir la septième station.
En tournant dans la rue Beit Habad, dans le quartier chrétien, nous sommes arrivés à l’église du Saint-Sépulcre, construite par les croisés sur des ruines byzantines. Là-bas, nous avons eu l’une des plus grandes surprises de notre petit périple d’une journée en fauteuil roulant. Car même si une rampe nous a permis de descendre les escaliers, près de l’entrée, nous sommes restés perplexes lorsque nous avons atteint la large marche qui précède l’entrée. C’est le moment qu’a choisi notre guide, Gura Berger, de la compagnie du développement de Jérusalem-Est, pour aller derrière l’une des portes massives et en tirer une rampe en métal, ce qui nous a permis d’entrer sans difficultés.
Nous nous sommes ensuite dirigés vers le Muristan, dont l’importance remonte à l’époque des Croisés. Aux 12è et 13è siècles, le Muristan était le siège des chevaliers hospitaliers, un ordre catholique peu commun de moines soldats.
De là, nous avons traversé les marchés de la Vieille Ville en direction du Cardo, un boulevard qui se retrouve dans de nombreuses villes romaines des premiers siècles après l’ère commune. Le Cardo de Jérusalem mesure 22 mètres de large et est orné de colonnes de part et d’autre.
Sur le mur, une copie d’une carte détaillée en mosaïque de Jérusalem telle que la ville se présentait à l’ère byzantine. Découverte en 1884, l’original décorait le sol d’une église de la ville jordanienne de Madeba et est ainsi universellement connue sous le nom de carte de Madeba.
Parmi les ajouts récents aux murs du Cardo, des photos de mosaïque. Elles montrent aux visiteurs de manière saisissante les objets qui auraient été en vente à l’époque dans cette rue animée.
Il n’y a pas de sortie accessible en fauteuil roulant. Alors à moins de pouvoir monter des escaliers, les visiteurs en situation de handicap doivent faire demi-tour et rebrousser chemin. Ils peuvent ensuite quitter la Vieille Ville par le quartier juif ou repartir par la porte de Sion, la porte de Jaffa ou celle de Damas.
—
Informations d’accessibilité : il est possible de louer une voiturette de golf à la porte de Jaffa. Elle se déplace dans tous les endroits accessibles en fauteuil roulant et coûte 350 shekels de l’heure. Pour davantage d’informations, appelez le 972 54 953-6331 ou en Israël : 054 953-6331.
Des cartes des itinéraires accessibles sont disponibles gratuitement au centre d’information touristique officiel de la porte de Jaffa. Pour vous déplacer seul, vous pouvez également utiliser une nouvelle application appelée Accessible JLM (en neuf langues) et/ou faire appel à une visite guidée des sites accessibles appelée Vocal Tours à Jérusalem. Les deux applis sont gratuites et disponibles pour iPhone et Android.
Note importante : le projet d’accessibilité de la Vieille Ville de Jérusalem a été initié par l’Autorité du développement de Jérusalem et financé par le ministère de Jérusalem et du patrimoine en collaboration avec le ministère du Tourisme, le département d’accessibilité de la municipalité de Jérusalem, l’Agence d’assurance nationale israélienne et l’Autorité israélienne des Antiquités. Le projet a été mené par la Compagnie de développement de Jérusalem-Est, avec l’aide de consultants en accessibilité en fonction des restrictions topographiques locales.
Certains extraits de cet article figurent dans le livre « Jerusalem EasyWalk »s d’Aviva Bar-Am.
Shmuel Bar-Am est un guide agréé qui propose des visites privées personnalisées en Israël pour les personnes seules, les familles et les petits groupes.
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel