Washington déplore la frappe « dévastatrice » à Rafah, exhorte Israël à mieux protéger les civils
La réponse de la Maison Blanche a été moins critique qu'elle a pu l'être après des incidents similaires survenus pendant la guerre
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Les États-Unis ont déploré, lundi, les images « dévastatrices » et « déchirantes » d’une frappe au missile israélienne commise la nuit précédente – une attaque qui visait deux hauts-responsables du Hamas mais qui aurait également entraîné la mort de dizaines de civils palestiniens qui s’abritaient sous des tentes à Rafah, une ville du sud de la bande de Gaza.
« Israël a le droit de s’en prendre au Hamas, et nous comprenons que cette frappe a tué deux terroristes de haut rang du Hamas. Mais comme nous l’avons dit clairement, Israël doit prendre toutes les précautions possibles pour protéger les civils », a déclaré un porte-parole du Conseil de sécurité national de la Maison Blanche.
Si la Maison Blanche n’a pas dissimulé sa consternation face à ce bilan meurtrier élevé du côté des civils, cette déclaration a néanmoins été moins critique que certaines condamnations sans équivoque que l’administration Biden n’avait pas hésité à émettre en direction de l’État juif, ces derniers mois.
« Nous appelons de manière active l’armée et les partenaires, sur le terrain, à évaluer ce qui est arrivé », a ajouté le porte-parole, laissant entendre que la Maison Blanche pourrait être amenée à s’exprimer davantage sur le sujet lorsqu’elle disposera d’informations suffisantes.
Au mois d’avril, après un bombardement de Tsahal qui avait coûté la vie à sept travailleurs humanitaires, le président américain Joe Biden avait déclaré être « indigné » et il avait menacé de changer de façon radicale sa politique concernant la guerre à Gaza si Israël ne prenait pas d’initiatives significatives en faveur de l’amélioration de la situation humanitaire dans la bande.
Au début du mois, Biden avait averti qu’il allait suspendre certaines livraisons d’armes destinées à Israël si Tsahal devait lancer une offensive dans les centres de population de Rafah.
Deux officiels américains ont expliqué au site Axios, lundi, que Washington était encore en train de déterminer si l’attaque de dimanche avait franchi la ligne rouge fixée par Biden.
La semaine dernière, l’administration Biden a fait part de sa satisfaction face aux changements survenus dans le plan de l’incursion à Rafah – qui devait initialement être massive et qui s’avère être une opération plus limitée.
La frappe qui a touché le camp de déplacés, à Rafah, a provoqué les condamnations féroces de l’Union européenne, des Nations unies, de l’Égypte, du Qatar, de l’Arabie saoudite, de la France et d’autres qui ont réclamé un cessez-le-feu immédiat à Gaza.
Israël a reconnu relativement rapidement sa faute et le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré que « malgré tous les efforts que nous avons déployés, un incident tragique s’est produit hier. Nous enquêtons sur ce qui s’est passé et nous en tirerons les conclusions ».
La frappe, qui a eu lieu dans le secteur de Tel Sultan, dans la partie Ouest de Rafah, avait pris pour cible le commandant du « quartier-général du Hamas en Cisjordanie » – accusé d’avoir organisé des attentats anti-israéliens en Cisjordanie et depuis cette dernière – et d’autres membres de premier plan de son unité. Le commandant a été tué.
Selon les autorités du Hamas, environ 45 civils ont perdu la vie dans cette attaque, qui a également touché plusieurs tentes et autres abris où des milliers de personnes avaient trouvé refuge – un grand nombre d’entre elles après avoir été déplacées de manière répétée dans le contexte de la guerre.
Tsahal a annoncé que des investigations sur l’incident avaient été lancées par une instance militaire indépendante qui a la charge d’examiner les incidents inhabituels survenant dans le cadre du conflit.
L’armée a aussi fait savoir que la frappe avait été lancée après avoir obtenu des renseignements sur la présence dans le secteur de deux commandants de premier plan du Hamas, Yassin Rabia et Khaled Najjar. Les militaires ont affirmé avoir pris « de nombreuses initiatives » pour minimiser les atteintes aux civils et avoir cru que ces derniers seraient protégés.
Une source militaire a indiqué que deux missiles avec une ogive « de taille réduite », qui était adaptée pour de telles cibles, ont été utilisés.
Tsahal a noté que l’attaque n’avait pas eu lieu dans « la zone humanitaire désignée » de la région d’al-Mawasi, qui se trouve sur la côte, où les Palestiniens ont été appelés à évacuer par l’armée, ces dernières semaines. Les Palestiniens disent que le secteur est surpeuplé, ce qui les oblige à trouver des refuges aux alentours.
La guerre à Gaza avait éclaté le 7 octobre – lorsque 3 000 terroristes, placés sous l’autorité du Hamas, avaient franchi la frontière séparant la bande et Israël et qu’ils avaient mené une attaque brutale dans le sud du pays, semant la dévastation. 1 200 personnes avaient été tuées et 252 personnes avaient été kidnappées et prises en otage à Gaza – des civils en majorité. Les hommes armés s’étaient livrés à des atrocités, à des actes de torture et ils avaient perpétré des violences sexuelles à grande échelle.
Le ministère de la Santé, qui est placé sous l’autorité du Hamas, à Gaza, a indiqué qu’environ 36 000 personnes avaient été tuées au sein de l’enclave à l’occasion de la campagne militaire israélienne, une incursion qui aurait aussi fait 80 420 blessés.
Ces chiffres sont invérifiables et seulement environ 25 000 corps sans vie ont été identifiés dans les hôpitaux jusqu’à présent. Ce bilan humain comprend les 15 000 terroristes environ qu’Israël affirme avoir abattus dans le cadre de la guerre. L’armée a aussi fait savoir qu’elle avait tué un millier de terroristes sur le sol israélien, le 7 octobre.