Le bagel et New York, une longue histoire sociétale
Sa popularité a grossi dans le Lower East Side, peuplé par la communauté juive arrivant de Pologne où l'anneau de pain se mangeait depuis plusieurs siècles déjà
Le bagel et New York sont indissociables. S’il n’existe pas de statistiques officielles sur la production quotidienne de ce petit anneau de pain, il est vendu par environ 500 boutiques indépendantes spécialisées dans la ville, selon Sam Silverman, directeur exécutif de l’organisme BagelUp.
Il a bien évolué depuis son arrivée à New York. La date exacte fait toujours débat mais les historiens s’accordent à dire que c’était vers la fin du 19e siècle.
Sa popularité a grossi dans le Lower East Side, le sud-est de l’île de Manhattan, peuplé par la communauté juive arrivant de Pologne où le bagel se mangeait depuis plusieurs siècles déjà.
En 1900, New York comptait soixante-dix boutiques.
Mais les conditions de travail étaient « terribles », raconte Maria Balinska dans son livre The Bagel : The Surprising History of a Modest Bread (« Le bagel: L’histoire surprenante d’un modeste pain »), consacré à une grève des boulangers en 1909 qui a permis d’améliorer salaires et conditions de travail, initiant un mouvement social plus vaste.
Les Années folles
L’engouement pour la version emblématique – le bagel « lox », à savoir saumon fumé et fromage à tartiner – a commencé dans l’entre-deux-guerres et ne s’est jamais tari. C’était un best-seller dans les épiceries fines juives.
L’écrivain Jeffrey A. Marx en date l’origine à la fin des années 1920, quelque 50 ans après l’invention du fromage à tartiner par le producteur laitier William Lawrence.
Des produits comme le saumon fumé « symbolisaient le luxe, un rappel que la deuxième génération avait franchi les barrières socio-économiques séparant les immigrés pauvres du Lower East Side de ceux nés Américains », a écrit Marx.
Pour Balinska, le bagel s’est diffusé au-delà de la communauté juive dans les années 1960.
Il a bénéficié de progrès technologiques comme le four rotatif qui a permis d’augmenter les cadences et de vendre des bagels chauds directement au consommateur alors qu’auparavant, ils n’étaient disponibles que chez des grossistes.
Les Années 60
Les frères Lender ont aussi été prépondérants dans la « bagélisation » de l’Amérique en commercialisant à grande échelle à partir des années 1960 un bagel congelé.
L’une de leurs innovations a consisté à vendre un bagel pré-tranché pour éviter que les consommateurs ne se blessent en tentant de couper un bagel congelé.
Au fil des ans, les garnitures extérieures se sont diversifiées (sel, graines de sésame, de pavot, oignon, ail, etc) et même un « everything bagel » – ou un « bagel-à-tout » – les associant toutes et qui est désormais décliné pour d’autres produits (barres chocolatées, chips, etc).
La boutique BO’s Bagels dans West Harlem vend davantage de « everything bagel » que toutes les autres variétés réunies, selon son propriétaire Andrew Martinez.
La culture « foodie » du 21e siècle a suscité des expérimentations plus ambitieuses à côté desquelles le traditionnel « lox » fait pâle figure : sushi, porc braisé, cheddar/piment, sans parler de toutes les associations possibles et imaginables de charcuteries et d’oeuf.
Le fromage à tartiner n’a pas fait exception avec des options aux myrtilles, avocat/ail, ou encore des versions colorées.