« Mes enfants m’ont glissé des mains », raconte le père du petit Ayral Kurdi
Son frère Ghaleb, cinq ans, et leur mère, Rihanna, 27 ans, se sont également noyés ; Cameron critiqué par les médias britanniques
Le père d’un enfant syrien de 3 ans mort noyé au large de la Turquie, dont les images ont horrifié le monde entier, a raconté jeudi que ses fils lui avaient « glissé des mains » lorsque l’embarcation qui les conduisait en Grèce a chaviré.
« Nous avions des gilets de sauvetage mais le bateau a subitement chaviré parce que des gens se sont levés. Je tenais la main de ma femme. Mais mes enfants ont glissé de mes mains », a raconté Abdallah Ebdi à l’agence de presse Dogan.
« Il faisait noir et tout le monde criait. C’est pour ça que ma femme et mes enfants n’ont pas pu entendre ma voix. J’ai essayé de nager jusqu’à la côte grâce aux lumières mais je n’ai pas pu retrouver ma femme et mes enfants une fois à terre », a expliqué M. Ebdi, « je suis allé à l’hôpital et c’est là que j’ai appris la mauvaise nouvelle ».
L’homme, originaire de la ville kurde de Kobané (nord de la Syrie), a également indiqué à Dogan avoir vainement tenté une première fois de rallier la Grèce avec sa famille, leur bateau ayant été intercepté par les garde-côtes grecs.
Douze réfugiés syriens qui tentaient de rejoindre l’île grecque de Kos, porte d’entrée vers l’Union européenne (UE), sont morts dans la nuit de mardi à mercredi au large de la station balnéaire turque de Bodrum (sud-ouest) .
Parmi eux figuraient Aylan, trois ans, dont les images du corps gisant sur la plage, relayées par les réseaux sociaux et la presse, ont suscité une vague d’émotion et d’indignation dans le monde entier.
Le Premier ministre britannique David Cameron s’est dit jeudi « profondément ému » par la mort d’un petit Syrien de trois ans dont la photo sur une plage turque a bouleversé le monde, s’engageant à prendre « ses responsabilités morales » dans cette crise.
« Quiconque a vu ces photos ne peut qu’être touché et, en tant que père, j’ai été profondément ému par la vue de ce petit garçon sur une plage en Turquie. La Grande-Bretagne est une nation avec des valeurs morales et nous allons prendre nos responsabilités morales », a dit David Cameron lors de la visite d’une usine Hitachi de fabrication de trains dans le nord de l’Angleterre.
Le Royaume-Uni, accusé de ne pas accueillir suffisamment de réfugiés, est sous la pression de responsables politiques européens, de l’ONU et du Conseil de l’Europe.
S’y ajoutent les journaux britanniques qui, bouleversés par la découverte sur une plage turque du corps sans vie du petit Syrien mort noyé, avaient choisi jeudi de mettre la photo de ce drame en Une, accompagnée le plus souvent de messages appelant à en faire davantage pour les Syriens.
« Monsieur Cameron, l’été est fini… maintenant gérez la plus importante crise à laquelle l’Europe doit faire face depuis la Deuxième Guerre mondiale », titre ainsi à la Une le tabloïd The Sun, pourtant jusque-là tenant d’une ligne dure face aux migrants, une de ses éditorialistes les ayant même comparés à des « cafards » cet été.
Prenant le contre-pied de ces appels à plus d’implication, David Cameron avait jugé mercredi que « le plus important était d’apporter la paix et la stabilité » dans les régions de crise, plutôt que de prendre en charge « de plus en plus de réfugiés ».
Jeudi, il a repris la même formule, mais a insisté sur son émotion, tout en assurant que le Royaume-Uni se sentait « bien concerné » par cette crise.
« Nous accueillons des milliers de réfugiés et nous continuerons à le faire, en concertation avec nos partenaires européens », a-t-il dit.
Selon les chiffres officiels, seuls 216 « personnes vulnérables » ont été accueillies en tant que réfugiés au Royaume-Uni depuis mars 2014 et au total 5 000 Syriens ont obtenu l’asile au cours des quatre dernières années.
Depuis le début de la guerre civile en 2011, plus de quatre millions de Syriens ont quitté leur pays.