Israël en guerre - Jour 496

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Opinion

Petit rappel 25 ans après l’assassinat d’Yitzhak Rabin

Israël s'est relevé de l'abîme après la nuit du 4 novembre 1995. N'oublions pas le danger des différences fondatrices qui menacent de déchirer une nation

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Un enfant serre la main de Yitzhak Rabin, chef du parti Avoda, lors d'un rassemblement électoral tenu le 20 juin 1992 à Tel Aviv, quelques jours avant la victoire électorale de Rabin. (Crédit : Nati Harnik/AP)
Un enfant serre la main de Yitzhak Rabin, chef du parti Avoda, lors d'un rassemblement électoral tenu le 20 juin 1992 à Tel Aviv, quelques jours avant la victoire électorale de Rabin. (Crédit : Nati Harnik/AP)

La semaine prochaine, cela fera vingt-cinq ans que l’État d’Israël fut ébranlé dans ses fondements par l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin.

Ayant conclu un traité de paix avec son ami le roi Hussein de Jordanie, l’ancien chef d’état-major de l’armée menait avec prudence une action visant à trouver une solution permanente au conflit israélo-palestinien.

Face à l’exaspérant Yasser Arafat, Rabin était prêt, à contrecœur, à renoncer à un territoire ayant une profonde résonance juive et qu’Israël avait repris lorsqu’il dirigeait l’armée israélienne pendant la guerre de 1967. Il était convaincu qu’Israël était suffisamment fort pour tenter un effort de paix qui pourrait cimenter sa légitimité régionale et assurer son avenir démocratique juif, mais il était loin d’être certain que le processus réussirait.

Le ministre israélien de la Défense, Yitzhak Rabin, lors d’un entretien le 18 mai 1989 au bureau du ministère de la Défense à Tel Aviv. (AP Phpto/Anat Givon)

Rabin jouissait d’une crédibilité unique en tant que « M. Sécurité » en raison de sa précédente carrière militaire, mais il a été contesté par une opposition, dirigée par Benjamin Netanyahu, qui s’opposait amèrement à sa stratégie, se méfiait totalement d’Arafat et soutenait que le Premier ministre abandonnait les valeurs juives et avait perdu la tête.

Dans les cercles religieux, d’ailleurs, et surtout parmi les dirigeants orthodoxes des implantations qui ont été directement touchés par le processus, certaines voix influentes ont fait valoir qu’il était intolérable, un véritable crime contre Dieu, de renoncer à un territoire promis par Dieu.

Lors de manifestations d’extrême droite, Rabin a été dénoncé comme un traître et un assassin, et assimilé à Adolf Hitler.

Dans cette atmosphère incendiaire, un homme armé a abattu le Premier ministre à la fin d’un rassemblement pour la paix et contre la violence dans le centre de Tel Aviv. Quelques minutes plus tôt, Rabin avait rejoint l’artiste Miri Aloni pour clôturer le rassemblement avec le « Chant pour la paix ». « Veille sur lui », a dit Miri Aloni à la femme de Rabin, Leah, après avoir chanté les paroles pleines d’espoir. « Je fais de mon mieux », a répondu Leah Rabin.

De droite à gauche, le Premier ministre Yitzhak Rabin, Miri Aloni, le ministre des Affaires étrangères Shimon Peres et le président de la Knesset Shevah Weiss chantent un « Chant pour la paix » à la fin d’un rassemblement à Tel Aviv, le samedi 4 novembre 1995. Rabin a été assassiné alors qu’il quittait le rassemblement quelques minutes plus tard. (Photo AP)

L’effort de paix s’est effondré à la suite de l’assassinat de Rabin. Pour ce que ça vaut, avec le recul, ce journaliste pense que cet effort se serait effondré s’il avait vécu – en s’appuyant sur la duplicité d’Arafat, détruit par le terrorisme que le chef de l’OLP n’a jamais abandonné ; Eitan Haber, l’assistant le plus fiable de Rabin, m’a dit un jour pourquoi il n’était pas d’accord, tout en soulignant que ce n’était, de toute évidence, qu’“une appréciation”.

On ne sait pas vraiment, bien sûr, comment aurait évolué la trajectoire d’Israël depuis cette époque jusqu’à aujourd’hui.

Le Premier ministre Yitzhak Rabin, (deuxième à partir de la gauche), tient sa tête dans sa main lors d’une cérémonie de signature de l’accord intérimaire sur la Cisjordanie et la bande de Gaza, dit Oslo II, le 28 septembre 1995, dans la salle Est de la Maison Blanche. De gauche à droite, le roi Hussein de Jordanie, Rabin, le président américain Bill Clinton et le chef de l’OLP Yasser Arafat. (AP Photo/Denis Paquin)

Ce qui est clair, c’est qu’Israël s’est sorti de l’abîme dans lequel il se trouvait la nuit du 4 novembre 1995. Nous avons intériorisé le fait que notre pays ne survivrait tout simplement pas s’il continuait à se déchirer de l’intérieur, pas dans cette région impitoyable.

Un quart de siècle plus tard, nos rues sont à nouveau pleines de manifestants et de contre-manifestants, qui dénigrent et défendent un Premier ministre, avec une rhétorique parfois féroce et un inquiétant mélange d’affrontements et de violence.

Et c’est donc par une drôle de coïncidence que Haber, l’homme qui a annoncé « avec horreur, une grande tristesse et un profond chagrin » la mort du Premier ministre, est lui-même décédé au début de ce mois. On espère qu’avec sa disparition, Haber nous rappellera les profondeurs auxquelles nous avons sombré, ainsi que l’impératif de tolérance et de respect du désaccord, même lorsque nous sommes confrontés aux dilemmes et aux défis les plus fondamentaux de notre pays.

Eitan Haber, entouré par des journalistes devant l’hôpital Ichilov de Tel Aviv, annonce le décès du Premier ministre Yitzhak Rabin, le samedi 4 novembre 1995. Rabin a été abattu par un extrémiste juif à la suite d’un rassemblement pour la paix dans le centre de Tel Aviv plus tôt dans la soirée. (AP/Eyal Warshavsky)

Nous sommes passés par là, nous sommes revenus du bord du gouffre, et nous nous devons, à nous et à notre précieux petit pays, de nous rappeler combien ce qui nous unit l’emporte sur nos divisions, et d’agir en conséquence. Et que d’autres pays tirent les leçons de notre histoire, en particulier dans les moments les plus fatidiques d’une dispute interne brûlante.

Les bizarreries du timing font également que l’anniversaire de Rabin a lieu un jour après qu’une Amérique déchirée se rende aux urnes pour choisir un président. Il n’est pas nécessaire de chercher des parallèles fabriqués. Mais il est manifestement nécessaire de souligner les dangers de désaccords fondamentaux qui peuvent dégénérer en une laideur susceptible de déchirer une nation.

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