Trump muet sur West et Fuentes lors d’une conférence d’un groupe juif
L'ex-président a fait la liste de ses initiatives pro-israéliennes devant un public orthodoxe amical et il a répété la nécessité, pour les Juifs, de lui afficher leur loyauté
L’ancien président américain Donald Trump n’a pas parlé d’un dîner privé très critiqué qu’il avait partagé, le mois dernier, avec un suprématiste blanc et négationniste de la Shoah, Nick Fuentes, et avec un rappeur antisémite, Kanye West, alors qu’il s’est exprimé vendredi lors d’une conférence réunissant des Juifs orthodoxes.
Il a indiqué au public qu’il était « le meilleur allié que vous n’avez jamais eu » dans son tout premier discours prononcé devant un auditoire juif depuis ce dîner qui avait eu lieu dans son domaine de Floride, Mar-a-Lago.
Trump a rendu hommage de manière répétée aux Juifs et il a souligné le soutien qu’il a apporté à Israël dans son allocution faite devant la Conférence des présidents annuelle de Torah Umesorah, une conférence organisée à son club National Doral, à Miami. Il a prétendu que le Congrès était dorénavant « presque anti-israélien » et il a affirmé que certains démocrates, à Washington, « haïssent passionnément Israël ».
Trump lutte pour retrouver un élan politique un mois après avoir été le premier à se déclarer officiellement candidat à la présidence, avec un scrutin qui aura lieu en 2024. Il avait espéré que cette annonce prématurée puisse effrayer des adversaires potentiels mais une série de revers politiques l’a plongé dans une vulnérabilité profonde alors même qu’il lance sa troisième campagne présidentielle.
Le républicain, aujourd’hui âgé de 76 ans, a dû faire face aux critiques de son propre parti, fin novembre, après avoir dîné avec Nick Fuentes, suprémaciste blanc et négationniste de la Shoah, et avec le rappeur Kanye West, qui se présente dorénavant sous le nom de « Ye ». Peu après le dîner, West avait déclaré : « J’aime les Juifs mais j’aime également les nazis ».
L’ancien vice-président, Mike Pence, avait appelé Trump à présenter ses excuses pour ce dîner, disant que ce dernier « a fait preuve d’un jugement profondément médiocre ».
Au moment des faits, Trump avait indiqué qu’il ignorait qui était Fuentes, et il ne l’avait pas condamné.
Trump a choisi d’ignorer cet épisode vendredi soir, tout en citant un extrait de son discours de l’État de l’Union prononcé en 2019 dans lequel il soulignait l’importance de condamner l’antisémitisme.
« Nous ne devons jamais ignorer le poison vil de l’antisémitisme ni ceux qui laissent se propager son venin », a dit Trump, lisant son ancien discours. « Nous devons affronter d’une seule voix cette haine, nous devons la confronter partout et nous devons la confronter avec beaucoup, beaucoup de force ».
Pendant son allocution de 28 minutes, Trump a lu longuement un article écrit par un partisan juif de droite qui avait fait la liste des initiatives pro-israéliennes lancées par l’ex-président « philosémite » lorsqu’il était à la Maison Blanche.
La foule orthodoxe a interrompu son discours de manière répétée sous une vague d’applaudissements, qui ont atteint leur maximum quand Trump a rappelé sa décision de commuer la peine de Sholom Rubashkin, cadre dans le secteur de la production de viande casher qui avait été reconnu coupable de nombreuses fraudes fiscales.
Sa peine – il avait été condamné à 27 ans de prison – avait été bien plus longue que cela n’avait été le cas pour d’autres personnes condamnées pour des crimes similaires – et il y avait eu notamment un procureur qui avait fait de sa judéité un problème dans l’affaire, disant que Rubashkin risquait de partir se réfugier en Israël sans qu’aucun élément puisse laisser penser que l’homme en avait l’intention.
« C’est plus applaudi, pensez-y, c’est plus applaudi que Jérusalem ? », s’est étonné Trump, en référence à sa décision prise en 2017 d’installer l’ambassade américaine dans la capitale.
« C’est plus important que Sholom, j’adore Sholom, mais c’est plus important que Sholom, pour moi, c’est le plus important », a-t-il dit ultérieurement en évoquant sa décision d’abandonner l’accord sur le nucléaire iranien, qui prévoyait un allègement des sanctions imposées à Téhéran contre la réduction des activités nucléaires de la république islamique.
Trump a répété sa déception face au soutien apporté aux Démocrates par les trois-quarts environ des Juifs américains et ce, malgré les initiatives positives qu’il a pu prendre, selon lui, pour Israël.
« Comment est-ce que c’est possible ? Comment est-ce que c’est possible alors qu’ils incitent réellement à la destruction d’Israël ? », s’est-il interrogé.
Trump se réfère régulièrement à « votre pays » lors des discours prononcés devant le public juif américain et il affirme qu’il mériterait plus de soutien de la part de la communauté.
Il a conclu son discours en donnant « un petit avis » aux personnes présentes dans la pièce – un avis qui a été largement le même que celui transmis, la semaine dernière, dans un post publié sur les réseaux sociaux, une publication dans laquelle il s’en était pris « aux leaders juifs » pour « leur manque de loyauté » après le flot de condamnations qui s’était abattu sur lui en raison de son dîner avec West et Fuentes.
« Il faut traiter vos amis avec dignité et il faut afficher de la loyauté à l’égard de vos amis. Parce que d’autres, à Washington, ne sont plus là pour Israël comme ils pouvaient l’être auparavant », a déclaré Trump. « Il y a un groupe qui s’oppose fortement à Israël et qui s’oppose franchement aux Juifs. Et ça, vous ne pouvez pas le tolérer ».
« Alors, quand vous avez un allié et je pense être le meilleur allié que vous n’ayez jamais eu… », a-t-il dit avant d’être interrompu par un tonnerre d’applaudissements.
Il a choisi ce moment pour arrêter son discours.