Israël en guerre - Jour 560

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Depuis la tragédie, un survivant du festival Supernova a ouvert un restaurant druze israélien à New York

En ouvrant Taboonia après le 7 octobre, Raif Rashed a trouvé du réconfort dans la nourriture de sa jeunesse et dans le soutien que Juifs et Israéliens lui témoignent

Raif Rashed, Druze israélien propriétaire de Taboonia, dépose du labneh sur une pita à New York, en mars 2025. (Crédit : Jackie Hajdenberg/ JTA)
Raif Rashed, Druze israélien propriétaire de Taboonia, dépose du labneh sur une pita à New York, en mars 2025. (Crédit : Jackie Hajdenberg/ JTA)

New York Jewish Week – Ouvrir un restaurant casher à New York n’était pas le rêve de Raif Rashed, Druze originaire du village d’Isfiya, dans le nord d’Israël.

Mais comme Rashed, aujourd’hui propriétaire de Taboonia – tout nouveau restaurant druze du Garment District en cours de certification casher – vous le dira, la vie peut parfois prendre un tour inattendu, surtout après une tragédie.

Ingénieur de formation, Rashed, qui est âgé de 40 ans, était parti s’installer à Hackensack, dans le New Jersey, en 2019, pour travailler dans une entreprise manufacturière israélienne. En octobre 2023, il était venu en Israël rendre visite à ses proches et avait prolongé son séjour pour aider son frère, Radda – qui y dirige une entreprise de restauration elle aussi appelée Taboonia – sur un événement très important.

L’événement en question n’était autre que le festival de musique Supernova. Ce qui aurait dû être une soirée dansante de 15 heures s’est mué en l’un des massacres les plus meurtriers, lorsque des milliers de terroristes dirigés par le Hamas ont envahi Israël le 7 octobre 2023.

Au milieu du chaos, Rashed a été séparé de son frère, qui a survécu. Il s’est abrité derrière une voiture appartenant à son ami, Erick Peretz, qui était venu au festival avec sa fille de 16 ans, Ruth, atteinte de paralysie cérébrale et en fauteuil roulant. Rashed a vu Peretz et sa fille se mettre à l’abri derrière une ambulance, puis, à sa grande horreur, a vu des combattants du Hamas mettre le feu au véhicule. Les corps d’Erick et Ruth Peretz ont été identifiés 12 jours plus tard : ils font partie des plus de 360 personnes assassinées au festival ce jour-là.

Ce que Rashed a vécu ce jour-là a changé sa vie. « J’ai été en crise pendant un an », confie Rashed, qui précise qu’à l’issue de l’attaque, il avait « pris des années en seulement quelques heures ».

Rashed est resté coincé en Israël pendant plusieurs mois, car son passeport a été volé lors de l’attaque. Lorsqu’il a finalement pu rentrer aux États-Unis, il a quitté son emploi d’ingénieur. En quête de réconfort, il s’est mis à cuisiner ce qu’il mangeait lorsau’il était enfant, à commencer par le manakish – un type de pain plat servi avec des garnitures comprenant du za’atar, du houmous et du labneh – ou encore la pita druze très fine et croustillante, servie roulée dans un papier et remplie de salade de concombre et de tomates, de houmous, d’œufs durs, de feta et de pois chiches.

Illustration : Une femme prépare une pita dans un village druze près de Haïfa, le 15 juillet 2015. (Garrett Mills/Flash90/Fichier)

Les Druzes forment une petite minorité religieuse et ethnique du Moyen-Orient, forte d’une population d’environ un million de personnes réparties entre la Syrie, le Liban et Israël. (Israël s’est engagé à protéger les Druzes de Syrie s’ils étaient attaqués par le nouveau régime, et cette semaine, des Druzes syriens se sont rendus sur un site druze israélien pour la première fois depuis des décennies.) En Israël, les communautés druzes, qui comptent pour moins de 2 % de la population, sont plutôt patriotes et font volontiers leur service militaire et pour beaucoup d’entre eux servent à de hauts postes, à l’image de Rashed. « Nous n’avons pas de pays à nous, mais nous servons le pays dans lequel nous vivons », explique-t-il.

Encouragé par ses retrouvailles avec la cuisine druze, Rashed a décidé d’ouvrir une annexe de Taboonia en Amérique.

« Pour moi, le fait de vendre des plats venus de notre culture, et en particulier les recettes de ma mère, c’est un peu comme mon bébé », poursuit-il.

Le 5 octobre 2024 – soit près d’un an après l’atttaque terroriste – Rashed a ouvert le stand de nourriture Taboonia, avec ses spécialités druzes – et son café – au New Meadowlands Market du MetLife Stadium à East Rutherford, dans le New Jersey, le samedi, et au Grand Bazaar, dans l’Upper West Side de Manhattan, le dimanche. Le succès fut immédiat.

Le mois de l’ouverture, il a rencontré celui qui allait devenir son partenaire d’affaires, Ray Radwan. Druze, lui aussi, mais né dans le New Jersey au sein d’une famille originaire du Liban, Radwan travaillait déjà dans la restauration. Les deux hommes ont dès lors décidé d’ouvrir un avant-poste physique de Taboonia au 832 Sixth Avenue, à New York. La construction de cet espace de restauration rapide et sans prétention, capable d’accueillir une dizaine de personnes, a commencé en novembre dernier et le restaurant a ouvert ses portes progressivement le mois dernier.

Raif Rashed, de Taboonia, remplace un autocollant sur son téléphone qui combine les drapeaux du peuple druze avec les drapeaux américain et israélien, à New York, en mars 2025. (Crédit : Jackie Hajdenberg/ JTA)

Jusqu’à récemment, le seul et unique restaurant druze de New York était Gazala’s, dans l’Upper West Side, dirigé par Gazala Halabi. Lorsque Gazala a été la cible d’actes de vandalisme anti-Israël en février 2024, des dizaines de Juifs des environs sont venus lui témoigner leur soutien. La même chose s’est répétée en juillet : à la suite d’une attaque à la roquette du Hezbollah qui a coûté la vie à 12 enfants et adolescents dans une ville druze du nord d’Israël qui jouaient au football, les Juifs new-yorkais sont venus en grand nombre au Gazala.

« On a vraiment l’impression de faire partie d’une grande famille », explique Halabi à propos du soutien de la communauté juive à l’époque. « J’ai vraiment l’impression, encore une fois, de ne pas être seule. »

Mais l’importante population de Juifs new-yorkais qui mangent casher n’ont pas pu le faire. En effet, Gazala’s n’est pas casher et sert des crustacés en plus des spécialités du Moyen-Orient comme le kibbeh, les feuilles de vigne farcies à la viande, le shawarma ou encore l’agneau.

Taboonia est végétarien, ce qui rend relativement facile l’obtention de la certification casher. Rashed estime que son restaurant devrait recevoir sa certification du rabbin Zev Schwarcz au Conseil international casher (IKC) dans les prochaines semaines et qu’il y aura ensuite une grande fête pour l’ouverture, probablement après Pessah. Et comme Taboonia n’appartient pas à un Juif, il devrait pouvoir ouvrir le jour de Shabbat tout en gardant son statut casher – un avantage de plus.

« Vous voyez, être druze est un plus », dit-il. Rashed a déclaré que c’est tout simplement une bonne affaire de chercher à obtenir une certification casher. « Kosher, tout le monde peut manger, d’accord ? », dit-il. « Mais s’il n’est pas casher, tout le monde ne peut pas y manger. »

Rashed est très reconnaissant du soutien reçu de la part des Juifs de New York et d’ailleurs – comme la récente vidéo virale que l’actrice et militante pro-israélienne Noa Tishby a publiée à son sujet sur Instagram.

« Ma communauté est juive », ajoute-t-il en rappelant ses années d’école aux côtés d’élèves juifs et en assurant qu’il parle mieux hébreu qu’arabe ou anglais. « Je vis entouré de Juifs depuis que j’ai 13 ans. »

Une des créations de Raif Rashed, le börek « bagel » de Taboonia, rend hommage à ses racines new-yorkaise et druze. (Jackie Hajdenberg/JTA)

Les six années que Rashed a passées à New York et dans le New Jersey ont eu une influence sur son goût comme sur la carte du restaurant. En plus des plats druzes traditionnels, Taboonia propose également des gourmandises venues d’autres horizons, comme des böreks au goût de bagels farcis de mozzarella.

Rashed espère que Taboonia va devenir un lieu incontournable pour les New-Yorkais, d’où qu’ils viennent, pour se restaurer et reprendre des forces.

« Les autres Druzes et moi, des Druzes libanais, nous faisons tous ensemble face à la guerre, en plein New York, pour montrer qu’il est possible de faire les choses différemment, et peut-être faire changer d’avis certaines personnes ? » conclut Rashed en forme de question. « Parce qu’ici, on entend parler arabe, hébreu et anglais. Et personne ne juge qui que ce soit sur quoi que ce soit. »

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