Israël se trouve à un « moment historique d’examen des fondements de son existence », dit le Premier ministre à la cour
Netanyahu a tenu ces propos pour soutenir sa demande de tenir des session à huis-clos pour abaisser le nombre d'audiences à 2 par semaine ; les juges ont accepté de tenir une session
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré lundi, dans le cadre de son procès pénal, qu’Israël se trouvait à un « moment historique » et que les aléas de la situation sécuritaire avaient d’importantes conséquences pour l’avenir du pays, ce qui justifiait, selon lui, que le tribunal abaisse le nombre d’audiences de trois à deux par semaine.
S’adressant aux juges lors d’une audience du procès pour corruption qui lui est intenté, Netanyahu a expliqué que les questions qu’il traitait en ce moment étaient capitales pour l’existence-même d’Israël, ce que ses avocats ont formalisé par écrit dans la matinée. Un courrier qui demandait la tenue d’une audience à huis-clos au cours de laquelle le ministre de la Défense, Israel Katz, donnerait un aperçu des circonstances qui requièrent une disponibilité accrue de Netanyahu en matière de sécurité.
Les juges ont accédé à la demande de tenir une telle session, mais ils se sont opposés à ce que ce soit Katz qui anime cette audience d’information dans la mesure où il est un homme politique et non un spécialiste de la question. Ce sera donc normalement le secrétaire militaire de Netanyahu, le général de division Roman Gofman, qui expliquera la situation au tribunal.
Netanyahu avait commencé à témoigner dans le cadre de son procès le 10 décembre dernier, mais il n’est monté à la barre qu’à douze reprises depuis lors – audience d’aujourd’hui comprise.
Les audiences avaient été annulées à plusieurs reprises à la demande de Netanyahu en raison des impératifs urgents auxquels le Premier ministre avait dû faire face – à commencer par les questions liées aux combats contre le Hamas à Gaza et contre le Hezbollah au Liban, aux cessez-le-feu conclus sur ces deux fronts, aux négociations relatives à la prolongation de la trêve à Gaza pour libérer davantage d’otages, à son déplacement à Washington pour s’y entretenir avec le président américain Donald Trump ou encore à sa récente intervention chirurgicale d’ablation de la prostate.
La semaine dernière, le Premier ministre avait demandé que les audiences soient réduites à deux par semaine en raison des tensions sécuritaires et de la situation diplomatique complexe et lundi, il a réclamé une session à huis clos avec des protocoles de sécurité renforcés pour expliquer aux juges les motifs à l’origine de sa requête.

« Nous sommes à un tournant historique. Nous discutons de questions qui sont à la base-même de notre existence », a déclaré Netanyahu aux juges. « Ces circonstances ont des conséquences sur notre existence, sur l’avenir du pays. »
La séance à huis clos demandée par Netanyahu pour évoquer ce sujet nécessitera la présence du Directeur de la Sécurité des Services de la Défense, en charge des questions de sécurité et de la protection des secrets d’État au ministère de la Défense, afin de s’assurer que les informations classifiées seront protégées comme il se doit.
« Il s’agit d’une question de sécurité sensible, dont l’évocation implique le respect des prérequis des services de sécurité à commencer par la détermination du lieu où se tiendra l’audience en question », a expliqué le Directeur de l’agence, qui a été cité par l’avocat de Netanyahu dans les pièces du dossier judiciaire.
« Compte-tenu de la situation, nous faisons en sorte de trouver le meilleur équilibre entre deux nécessités : celle de tenir le procès et cellle de veiller à la sécurité nationale », a poursuivi Netanyahu, ajoutant que ses avocats ne pouvaient « même [pas évoquer] quelques-unes de ces questions » pour étayer le besoin de passer moins de temps au tribunal chaque semaine. Il a ajouté qu’afin d’être en mesure de démontrer le bien-fondé de la réduction du nombre d’audiences, il fallait « vous parler de l’iceberg qui se trouve devant nous, dont la majeure partie est encore sous l’eau ».

Le tribunal demande à la défense d’accélérer son interrogatoire de Netanyahu
Dans la journée de lundi, le tribunal a rendu une décision qui stipule que l’interrogatoire de Netanyahu par son avocat devra se limiter à 14 séances – y compris celle de ce lundi – concernant toutes les accusations qui ont été portées contre lui.
Le tribunal a expliqué sa décision « par le temps que le témoignage [du Premier ministre] a déjà pris » : le témoignage s’effectue en effet à un rythme lent avec des réponses détaillées à chacun des 300 éléments de preuve – voire plus – qui avaient été cités par les procureurs dans ce qui est le plus grave des trois procès intentés contre Netanyahu, un dossier connu sous le nom d’Affaire 4000.
Les juges ont essayé à plusieurs reprises d’obtenir de l’avocat de la défense de Netanyahu, Amit Hadad, qu’il accélère son interrogatoire, qu’il évite les questions répétitives et qu’il passe moins de temps sur certains détails, ce que Hadad et Netanyahu ont tous les deux refusé.
Hadad a déclaré la semaine dernière qu’il aurait besoin de 12 à 14 audiences de plus pour l’Affaire 4000, qui concerne des accusations de malversations entre Netanyahu et le propriétaire de Walla, Shaul Elovitch, dont une accusation de corruption, et de 10 audiences de plus pour les Affaires 1000 et 2000, dans lesquelles Netanyahu est accusé de fraude et d’abus de confiance.
L’accusation a fait savoir qu’elle aurait besoin, pour le contre-interrogatoire, de trois fois plus d’audiences que le nombre total d’audiences de la défense, ce qui pourrait conduire à plus de 120 audiences de plus pour le seul témoignage de Netanyahu.
Le procès a débuté en mai 2020 et, au rythme actuel, il est peu probable qu’il se termine avant 2028 ou 2029, sans compter les possibles appels.
Le tribunal a ordonné lundi aux avocats de la défense de lui fournir d’ici le 26 février une liste de témoins de la défense susceptibles de témoigner une fois par semaine, si le tribunal acceptait la demande de Netanyahu de ne témoigner que deux fois par semaine. Ce qui signifie que si les juges en viennent à accéder à la demande de la défense, ils souhaitent toutefois que les audiences annulées permettent d’entendre d’autres témoins afin d’accélérer le processus.
Une fois que la défense aura présenté sa proposition sur la question, les services du procureur de l’État, qui est très défavorable à la réduction du nombre d’audiences pour Netanyahu, pourra alors donner sa réponse et le tribunal rendre sa décision.
Netanyahu devra témoigner trois fois par semaine jusqu’à ce que cette décision soit prise, a indiqué le tribunal.