USA : La Jewish Historical Society renonce à des événements liés au BDS
La décision est survenue après des plaintes des militants de droite impliquant certains participants des débats et des conférences
L’AJHS (American Jewish Historical Society) a annulé deux événements associés à un groupe juif qui soutient le mouvement BDS.
Cette décision provient d’une petite partie du bureau, selon Lila Corwin Berman, présidente de la commission universitaire de l’organisation. Elle survient après des plaintes de militants de droite qui ont également tenté de déchoir de son nouveau poste David Myers, responsable tout juste nommé du Centre d’histoire juive (CJH) – institution partenaire de l’AJHS – en raison de son soutien apporté à des groupes de gauche comme le New Israel Fund et J Street.
L’organisation a donc annoncé mardi qu’elle annulait un débat prévu au mois d’octobre consacré à la déclaration Balfour ainsi que la lecture prévue d’une pièce au mois de décembre.
Le débat, qui s’intéressait à la déclaration de soutien à un foyer juif en Palestine par le Royaume-Uni en 1917, devait faire intervenir deux militants pro-palestiniens et était parrainé par l’organisation Jewish Voice for Peace (JVP), qui soutient le mouvement BDS (Boycott, Divest from and Sanction) anti-israélien.
L’AJHS a également déprogrammé la lecture d’une pièce intitulée « Rubble Rubble » dont l’auteur, Dan Fishback, est membre de l’organisation JVP. L’oeuvre, selon une description de l’événement, était partiellement consacrée à « un habitant juif américain d’implantation qui accueille son neveu anti-sioniste lors d’une visite ». Les membres de JVP avaient droit à un tarif d’entrée préférentiel.
« Après plus ample réflexion, l’AJHS abandonne sa conférence Balfour prévue le 26 octobre ainsi que la lecture de la pièce de ‘Rubble, Rubble’ qui devait avoir lieu le 14 décembre », a fait savoir un communiqué. « Tandis que ces programmes peuvent avoir en eux-mêmes du mérite, ils ne correspondent pas à la mission de l’AJHS.”
Berman, qui est également le directeur du centre Feinstein d’histoire juive américaine à la Temple University, a déclaré que cette décision d’annulation avait été prise « par une petite partie du bureau ».
« Ils ont pris la décision qui, selon eux, avait le plus de sens conformément à la mission poursuivie par l’AJHS », a-t-elle dit. « Nous sommes dans un climat politique horriblement troublant en ce moment lorsqu’on en vient à la politique autour des questions d’Israël et des Juifs américains ».
L’AJHS, de vastes archives qui documentent l’histoire de la communauté juive américaine de 1654 à aujourd’hui, indique que ses programmes publics ont pour objectif de promouvoir « les échanges interculturels et la recherche multidisciplinaire tout en élargissant les débats sur l’histoire, la culture et l’identité de la communauté juive et des arts.”
La directrice de la programmation de l’AJHS, Shirly Bahar, a écrit sur sa page Facebook personnelle que son objectif est de « favoriser des programmes culturels, politiques et universitaires critiques, pointus et provocateurs où les discussions difficiles sur les Mizrahim, les Juifs de couleur, la Palestine, la solidarité trans-culturelle et l’anti-racisme sont mis en valeur plutôt que censurés ».
Bahar soutient un boycott d’Israël. Au mois de décembre dernier, elle avait rédigé une « déclaration en soutien au boycott des institutions académiques israéliennes » pour les membres de la MLA (Modern Language Association) qui sont favorables à un boycott des facultés au sein de l’Etat juif.
« Je soutiens le BDS en tant qu’Israélienne dont la citoyenneté juive israélienne marquée sur sa carte d’identité l’exempte de la difficile oppression que les Palestiniens expérimentent au quotidien », avait écrit Bahar. « Les privilèges particuliers et la sûreté que me garantissent mon identité juive ne m’intéressent pas s’ils s’exercent au détriment des vies et des droits de base des Palestiniens ».
Fishback, le dramaturge, a déclaré que personne n’avait laissé entendre à l’avance que la pièce pourrait être annulée. Il a indiqué soutenir le boycott des oeuvres culturelles financées par le gouvernement israélien pour influencer ses politiques, mais ne pas boycotter les artistes en raison d’un désaccord avec leurs points de vue.
« Cela arrive régulièrement dans les institutions juives », a écrit dans un courriel à JTA Fishback, qui se qualifie de « Juif antisioniste ». « Les gens qui font le travail sur le terrain ont l’esprit très ouvert. Les financeurs et ceux qui sont détachés de ce vrai travail – c’est eux qui prennent de mauvaises décisions comme celle-là ».
Un autre membre du bureau a confirmé à JTA que le bureau dans l’ensemble n’était pas impliqué dans cette décision d’annulation. Les tentatives d’entrer en contact avec le personnel et les autres membres de l’AJHS ont été vaines.
Le soutien pour le mouvement BDS est considéré comme une ligne rouge pour les plus importantes organisations de défense juives et pro-israéliennes, y compris celles qui partagent des points de vue ou tolèrent des groupes de gauche tels que le New Israel Fund et J Street.
L’ADL (Anti-Defamation League) a condamné l’organisation JVP dans un rapport en 2014, disant que ses « positionnements sur BDS, sa volonté de partenariat avec des organisations anti-israéliennes qui nient le droit à l’existence d’Israël et son refus de soutenir une solution à deux états au conflit israélo-palestinien démontrent un positionnement sur la ligne dure ».
La décision d’annuler les événements à l’AJHS suit une lettre ouverte qui a été rédigée par Ronn Torossian, professionnel en relations publiques qui nourrit un point de vue de droite sur Israël, qui s’était intéressé aux liens existant entre JVP et ces événements.
Torossian a été à la tête d’une campagne visant à déchoir de son poste Myers, ancien professeur d’histoire juive à l’UCLA. Torossian avait fini sa lettre d’opinion en écrivant que « David N. Myers ne doit pas continuer en tant que chef du centre d’histoire juive ». Les cinq institutions accueillies par l’organisation cadre CJH — L’AJHS, la fédération sepharade américaine et le musée de la Yeshiva University – opèrent indépendamment de leur hôte.
Le mois dernier, le conseil d’administration du Centre d’histoire juive avait déclaré dans un communiqué que Myers « bénéficie du soutien sans faille du conseil et du personnel ».