Le président de la Croix-Rouge condamne les implantations, qualifiées de « défi humanitaire »
Peter Maurer a déploré le processus d'"annexion de facto" et affirme que le Hamas viole le droit international en refusant de communiquer sur le soldats et les civils détenus
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Le chef du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a averti jeudi que les habitants de la bande de Gaza perdaient espoir, qualifiant de « désastreuse » la situation humanitaire dans l’enclave palestinienne.
Au terme de trois jours de visite en Israël et dans les Territoires palestiniens, Peter Maurer a affirmé que les conditions de vie dans la bande de Gaza empiraient de jour en jour, avec ses deux millions d’habitants recevant uniquement trois à quatre heures de courant électrique par jour.
Ces pénuries d’électricité ont provoqué une crise dans le système de distribution de l’eau et des eaux usées, qui, à son tour, a de graves répercussions sur la santé publique, a-t-il souligné.
Nous pouvons toujours débattre de la question de qui a pris telle décision et pour quelle raison, mais en attendant les conséquences sur le plan humanitaire (…) sont désastreuses et vraiment inacceptables », a affirmé M. Maurer lors d’une conférence de presse à Jérusalem.
Il a dit que « l’impression la plus tenace » qu’il avait eue dans la bande de Gaza était une « crise de l’espoir » au sein de la population.
Par ailleurs, le Hamas détient les dépouilles de deux soldats israéliens tués durant la guerre de 2014 ainsi qu’au moins deux civils Israéliens faits prisonniers. Le mouvement terroriste n’a pas officiellement confirmé ou nié ces accusations.
Netanyahu a demandé mercredi l’aide du CICR pour récupérer les deux dépouilles et libérer les civils.
Maurer a indiqué avoir discuté du sujet avec le Hamas et réitéré la position du CICR stipulant que cacher aux familles le sort de leurs proches était une violation au droit international, bien qu’il ait souligné que son organisation n’était pas en mesure de négocier un accord entre le Hamas et Israël pour garantir leur libération.
« L’activité implantatoire va à l’encontre des dispositions et de l’esprit du droit international, du droit de l’occupation, comme nous l’appelons », a déclaré Maurer dans une conférence de presse à Jérusalem Est.
Maurer a affirmé que les implantations étaient un « facteur clef » dans les défis humanitaires auxquels sont confrontés les Palestiniens.
« Nous en avons la preuve quotidiennement, en Cisjordanie et à Jérusalem Est : [les implantations] ont un impact énorme sur les populations, sur la liberté de mouvement, sur le tissu social et économique dans les territoires. Elles imposent un accès limité aux terres agricoles, freinent les opportunités éducatives et professionnels, complexifient l’accès à l’eau et à l’électricité dans les communautés palestiniennes. Et la liste ne s’arrête pas là », a-t-il dit.
Cette déclaration a fait écho aux doléances des Palestiniens sur le fait qu’ils perçoivent les implantations comme préjudiciables à la vie quotidienne et qu’elles représentent une difficulté notable pour eux. Un porte-parole du ministère des Affaires israélien a refusé de réagir aux accusations de Maurer.
Soulignant que la Croix-Rouge est une « organisation neutre et impartiale », qui fonde son analyse sur la loi, et non pas sur des objectifs politiques, Maurer a indiqué que son organisation n’a jamais dénoncé les implantations, parce qu’elles mettent en péril la solution à 2 États. Parallèlement, il a appelé à « redoubler d’attention » et à l’insistance internationale concernant l’activité implantatoire d’Israël.
La Convention de Genève, régulièrement invoquée pour revendiquer que les implantations sont illégales, parce qu’elle prohibe le transfert de population dans des territoires, reste le « meilleur cadre juridique » pour gérer le conflit israélo-palestinien, a assuré Maurer.
« Nous pensons que la politique d’expansion des implantations, menée ces dernières décennies pas les gouvernements israéliens successifs, encourage un processus d’annexion de facto. Elle a rendu difficile le dialogue entre les différentes communautés », a-t-il dit.
Au cours de sa visite, le patron du CICR a rencontré le chef du mouvement islamiste du Hamas qui gouverne la bande de Gaza, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et le chef du Hamas Yahya Sinwar.
Mardi, Maurer a demandé aux responsables du Hamas de l’autoriser à rencontrer les civils israéliens détenus par le groupe terroriste. Maurer a fait cette demande durant son échange avec Sinwar, le dirigeant politique de l’enclave palestinienne et avec le responsable Gazi Hamad, selon les médias palestiniens.
Sinwar a déclaré à Maurer que « toutes les institutions seront ouvertes avant que la Croix-Rouge ne s’assurer que les standards du droit humanitaire international n’est appliqué », selon un communiqué du Hamas. Cependant, une source du Hamas a confié à un média israélien que le groupe n’autorisera pas Israël à obtenir des informations sur ses captifs.
Face aux journalistes, à l’American Colony Hôtel, Maurer a affirmé que sa délégation avait rendu visite à des « détenus » en Israël, en Cisjordanie et à Gaza, mais n’a pas été autorisé à obtenir des informations sur les Israéliens détenus dans l’enclave dirigée par le Hamas.
Il a également refusé de spéculer sur un échange de prisonniers entre Israël et l’organisation terroriste.
« Tout ce que je peux vous dire, c’est que le rôle de [la Croix-Rouge] est d’attirer l’attention de toutes parts sur le cadre juridique applicable », a-t-il dit.
« Le texte de la Convention de Genève est très clair sur le fait que les familles sont en droit d’avoir des informations sur les proches capturés, et que les belligérants sont dans l’obligation d’informer les familles s’ils disposent d’informations et s’ils détiennent leurs proches. Et en ce sens, [la Croix Rouge] a été très explicite, et ce depuis un moment, sur le cadre juridique, qui est ouvertement violée dans ce contexte. »
Maurer, originaire de Suisse, a affirmé que la Croix Rouge n’est pas en mesure de négocier ces questions. « C’est au gouvernement israélien et aux autorités à Gaza de décider du moment et de la façon dont ils veulent négocier ces questions. »
Netanyahu, qui a reçu Maurer dans son bureau mercredi, a accusé le groupe terroriste de continue à détenir « cruellement » des civils israéliens et les corps des soldats de l’armée israélienne tués dans la bande de Gaza.
« Nous avons les corps de nos soldats tués qui sont détenus – les informations à leur sujet sont retenues – et nous avons des civils israéliens innocents et sans défense détenus dans le bande de Gaza, qui sont cloîtrés d’une façon très cruelle », a déclaré Netanyahu à Maurer.
« [Ils] sont détenus dans des conditions cruelles », a-t-il ajouté.
Netanyahu a remercié Maurer pour tous les efforts qu’il a mis en œuvre pour tenter de résoudre la situation, « face à la cruauté du Hamas », et ajouté que le groupe terroriste détenait ces captifs israéliens « en violant toutes les normes internationales et les idéaux pour lesquels la Croix-Rouge a été établie ».
Il a déclaré que la relation entre Israël et la Croix-Rouge est, dans le cadre de son mandat, « décente » et « ouverte », et « d’une grande valeur pour la Croix-Rouge, pour Israël et pour la paix ».
En réponse aux propos de Netanyahu, Maurer a déclaré que la mission de rapatriement des citoyens israéliens et des corps des soldats était l’une des « « plus longues opérations en cours » de la Croix-Rouge, et que son organisation a été chargée, par le droit international, d’œuvrer pour leur retour.
Le mois dernier, le ministre de la Défense, qui avait fustigé la Croix-Rouge, qui n’aidait pas assez au retour des Israéliens capturés, a déclenché un tollé dans les médias, après qu’il a indiqué qu’Israël ne doit pas reproduire « l’erreur » de l’accord Shalit, au cours duquel 1 000 prisonniers sécuritaires palestiniens ont été libéré, en échange de Gilad Shalit, retenu captif 5 ans par le Hamas.
Sinwar a réagi en indiquant à la presse qu’il n’y aura pas d’accord sans libération de prisonniers palestiniens par Israël, en référence aux nombreux agents du Hamas ré-arrêtés depuis leur libération dans le cadre de l’accord Shalit.
Les propos de Liberman ont déclenché la colère des familles des captifs. Le père de l’un des soldats a qualifié le ministre de la Défense de « faible » et de « lâche ».
Le Hamas détiendrait trois israéliens, Avraham Abera Mengistu, Hisham al-Sayed et Juma Ibrahim Abu Ghanima, qui seraient entrés dans le bande de Gaza par leurs propres moyens, ainsi que les dépouilles de deux soldats de l’armée israélienne, Oron Shaul et Hadar Goldin, qui ont été tués durant la guerre de 2014, qui a opposé Israël et le groupe terroriste.
Dans le cadre des efforts mis en œuvre pour récupérer les corps de Shaul et de Goldin, Israël aurait entretenu des négociations indirectes avec le Hamas, sur un éventuel accord d’échanges de prisonniers.
Lors d’une cérémonie commémorant le 3e anniversaire du conflit à Gaza, Netanyahu a fait allusion aux efforts israéliens mis en œuvre pour rapatrier les soldats et les civils détenus par le Hamas.
« Notre détermination à faire revenir à la maison Hadar Goldin et Oron Shaul est toujours d’actualité. Nous n’avons pas abandonné cette mission sacrée, notamment ces derniers jours. Cela s’applique également à Avraham Abera Mengistu et à Hisham al-Sayed, des citoyens israéliens détenus dans la bande de Gaza par un ennemi cruel », a-t-il dit, omettant de mentionner Abu Ghanima, le 3e civil israélien détenu par le Hamas.
Depuis la capture des corps de leurs fils, les familles Goldin et Shaul ont mené une campagne publique pour demander leur retour. La famille Goldin a récemment diffusé une vidéo exhortant le gouvernement à intensifier la pression exercée sur le Hamas jusqu’à ce que les deux corps leurs soient restitués.
L’AFP et l’équipe du Times of Israel ont contribué à cet article.