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Le Vatican célèbre la fin historique de l’antisémitisme officiel

La déclaration "Nostra Aetate" concernait essentiellement les juifs, après des siècles d' "enseignement du mépris" de la part de l'Eglise

Le pape François durant la messe à la basilique Saint-Pierre au Vatican, le 2 février 2014
Le pape François durant la messe à la basilique Saint-Pierre au Vatican, le 2 février 2014

L’Eglise catholique a célébré mercredi avec une audience inter-religieuse les 50 ans de « Nostra Aetate », une déclaration historique qui a jeté les bases, après des siècles d’anti-judaïsme, du dialogue avec les juifs et toutes les autres religions.

En présence de milliers de fidèles, des représentants de ces autres religions ont participé mercredi matin à l’audience hebdomadaire du pape François sur la place Saint-Pierre à Rome.

Le 28 octobre 1965, à la fin du Concile Vatican II, plus de 2 000 cardinaux, évêques et patriarches du monde entier ont adopté ce document très novateur.

Le passage le plus important concernait les juifs, après des siècles d’ « enseignement du mépris » d’une Eglise qui les accusait d’avoir provoqué la mort de Jésus et dont l’enseignement avait alimenté l’antisémitisme en Europe.

« L’indifférence et l’opposition se sont muées en collaboration et bienveillance. D’ennemis et étrangers, nous sommes devenus amis et frères », a salué le pape mercredi matin.

Le texte cinquantenaire « a montré la voie : ‘oui’ à la redécouverte des racines juives du christianisme, ‘non’ à toute forme d’antisémitisme et condamnation de toutes les injures, discriminations et persécutions qui en ont dérivé », a-t-il insisté.

Lors d’une conférence de presse après l’audience, le rabbin David Rosen, du Comité juif américain, a salué ce retournement « historique » ayant permis de construire une relation saine « après 2 000 ans de haine ».

Mais en raison de réticences internes, cette « révolution n’a pu aboutir qu’en y incluant la relation avec toutes les autres religions, ce qui constitue une bénédiction exceptionnelle », a-t-il ajouté.

Un passage moins connu et beaucoup plus bref de « Nostra Aetate » (« A notre époque ») exprime en effet l’ « estime » de l’Eglise pour les musulmans, et un autre s’adresse à toutes les autres religions, mentionnant le bouddhisme et l’hindouisme.

« L’Eglise ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions », affirme le texte, en soulignant que leurs doctrines « reflètent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes ».

Fraternité et service

« Le dialogue fondé sur un respect confiant peut porter des (…) germes d’amitié et de collaboration dans tant de domaines », a estimé le pape mercredi.

« Ensemble, nous pouvons louer le Créateur pour nous avoir donné le jardin du monde à cultiver et à garder comme un bien commun, et nous pouvons réaliser des projets communs pour combattre la pauvreté et assurer à chaque homme et à chaque femme des conditions de vie dignes », a-t-il ajouté.

En 1986, Jean Paul II avait complété « Nostra Aetate » avec une rencontre interreligieuse à Assise, rééditée en 1993 et en 2011. Des communautés catholiques comme Sant’Egidio ont ensuite intensifié ces échanges et ce dialogue.

Lors de ces rendez-vous se pose toujours une question délicate : peut-il y avoir des moments de prière ensemble ou seulement côte à côte ? Mercredi matin, l’audience s’est ainsi terminée par un moment de prière silencieuse au lieu du traditionnel « Notre Père » en latin.

« Que le Seigneur nous rendent plus frères entre nous et plus serviteurs de nos frères dans le besoin », a plaidé le pape avant ce moment de silence.

Avec les juifs, qualifiés de « grands frères » par Jean Paul II, le pape polonais et ses successeurs ont multiplié les gestes, se rendant par exemple plusieurs fois dans des synagogues.

Avec l’islam, les efforts constants des papes et du Saint-Siège ont connu des revers, et le dialogue avec le chiisme est aujourd’hui plus prometteur qu’avec les nombreuses autorités religieuses sunnites, relèvent les experts.

François a visité la Mosquée bleue d’Istanbul et prévoit de se rendre fin novembre dans celle de Bangui, capitale d’une Centrafrique qui peine à sortir d’un conflit interethnique entre milices chrétiennes et musulmanes.

Avec les religions traditionnelles animistes et les religions asiatiques le dialogue reste en revanche formel, limité à des messages et marques de respect, sans discussion théologique.

De son côté la l’Anti-Defamation League (ADL) a salué l’Episcopat polonais pour avoir déclaré, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la déclaration Nostra Aetate, que l’antisémitisme est un péché et a mis l’accent sur l’importance du dialogue entre l’Église catholique et le Judaïsme.

La lettre de l’Episcopat polonais a affirmé que « l’antisémitisme et l’anti-judaïsme sont des péchés contre l’amour de son prochain. »

« Le dialogue entre les chrétiens et les juifs ne doit jamais être traité comme un passe-temps secondaire mais devrait devenir une part conséquente du travail pastoral ».

Le Rabbin David Sandmel, directeur des affaires inter-religieuses de la Ligue Anti-Diffamation a déclaré « Alors que nous célébrons le rapprochement des relations entre Catholiques et Juifs à l’occasion de l’anniversaire de la déclaration Nostra Aetate, il est encourageant d’entendre l’Église polonaise dire, de manière non-équivoque, que l’antisémitisme est un péché et que tous les efforts pour voir le judaïsme maudit doivent être rejeté. »

Il a ajouté « avec le retour de l’antisémitisme en Europe, cette déclaration de l’Église polonaise arrive à temps et devrait représenter un exemple moral pour tous les leaders, institutions et individus sur le continent Européen. »

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